Salah-Eddine Sidhoum: Lettre ouverte à l’opinion publique et aux ONG des Droits Humains

Lettre ouverte à l’opinion publique et aux ONG des Droits Humains

Mes chers ami(e)s,

Les putschistes d’Alger tentent encore une fois de me faire taire en me harcelant de convocations.

En effet aujourd’hui, samedi 26 février 2005, aux environs de 11h 30, deux civils armés venus à bord d’un véhicule banalisé de type R19 de couleur bleue nuit, se sont présentés en tant que policiers à mon domicile à El Mouradia, alors que j’étais sur mon lieu de travail et auprès de mes patients à opérer. Ils remirent une convocation à ma vieille tante âgée de 86 ans (celle-là même qui a eu à affronter les escadrons de la mort venus m’assassiner en décembre 1994 et les hommes du sinistre PCO d’El Madania en décembre 2002 venus intimider ma famille durant ma clandestinité forcée) en lui intimant l’ordre de décliner son identité, ce qu’elle refusa avec courage et dignité, en les invitant à aller exercer leur « hogra » ailleurs. Cette situation a provoqué l’émoi des habitants du quartier qui se sont rassemblés devant mon domicile pour réconforter la vieille tante et qui sont venus m’informer des faits dès mon arrivée à 16h à mon domicile, scandalisés par ce harcèlement mesquin d’un homme qu’ils connaissent depuis cinquante ans dans ce quartier, pour sa disponibilité au service des humbles et des « mahgourines ».

Cette convocation émane de la 14e BMPJ (brigade mobile de la police judiciaire) de Birkhadem et me demande de me presenter à la dite brigade dès réception du document, muni du livret de famille (sic) pour une « étude générale » (dirassa aâma) (resic) selon la dite convocation (ci-joint une copie).

Il est clair que ma dénonciation des atteintes quotidiennes aux droits de l’homme dans mon pays à travers l’Observatoire des Droits Humains en Algérie (ODHA) avec mes ami(e)s d’Algeria-Watch et mes efforts avec de nombreux compatriotes de tous les horizons sans exclusion, à rassembler les volontés intellectuelles et politiques en vue d’une alternative pour un changement radical et pacifique de régime, dérangent ceux qui ont mis le pays à feu et à sang pour préserver leurs privilèges mal acquis et qui essaient aujourd’hui d’éviter le Tribunal Penal par une pseudo-reconciliation et une pseudo-amnistie garantissant en réalité leur impunité contre leurs crimes contre l’Humanité.

Je pense encore une fois que ceux qui veulent me faire taire se trompent d’adresse et que leurs méthodes staliniennes archaïques et révolues n’ébranleront pas d’un iota mes profondes convictions dans ma lutte pour le respect de la Dignité Humaine, pour un changement radical et pacifique de régime et pour une Algérie de toutes et de tous, sans exclusion ni exclusive, profondément ancrée dans ses valeurs civilisationnelles et grandement ouverte sur l’Universel. Et je suis prêt à retourner au sinistre bagne de Serkadji pour mes idées et mon combat pour la dignité et la liberté. C’est un grand honneur pour moi et une honte pour les putschistes tapis dans l’ombre, après leurs méfaits sanglants.

A ces derniers je rappelerais seulement les sages paroles d’un intellectuel tchèque :

« Un régime ne se caractérise pas par son comportement envers des millions de citoyens obéissants, mais par la façon dont il traite une personne désobéissante »

J’en appelle à l’opinion publique nationale et internationale et aux ONG pour dénoncer cette campagne d’intimidation et m’apporter leur soutien comme ils l’ont toujours fait, dans ma lutte pour la dignité et la liberté contre ce régime corrompu et criminel.

Alger le 26 février 2005
Dr Salah-Eddine SIDHOUM
Chirurgien
Militant des droits Humains

Voir aussi la campagne de 2003: