Ghardaïa : Les mères et épouses des détenus en sit-in devant la wilaya
El Watan, 8 décembre 2014
Après les cris du cœur des mères et des épouses des détenus de Guerrara à Oued Souf qui ont organisées le 19 novembre passé une marche à travers les artères de leur ville , voilà que des mères et des épouses de détenus de Ghardaïa à Sétif battent le pavé face aux grilles du siège de la wilaya jouxtant la bâtisse de la cour de justice.
En effet, et de mémoire d’habitants jamais au grand jamais des femmes ne se sont ainsi affichés dans les rues. C’est dire à quel point ces mères et ces épouses souffrent de l’absence prolongé de l’être cher, croupissant depuis le mois de décembre de l’année 2013 dans des cachots à travers le territoire national.
En effet , il est vraiment rare , très rare même que dans une région aussi conservatrice des femmes occupent la rue et pourtant , une quinzaine de femmes, mères, épouses et sœurs de 11 détenus malékites , tous du quartier de Ben Smara devant être jugés aujourd’hui par le tribunal de Sétif sont sorties hier, à Ghardaïa , pour crier leur colère et exiger la libération de leurs proches qu’ils affirment « être accusés à tort d’avoir attenté à la vie d’un citoyen Mozabite » .
Ces jeunes sont accusés de tentative d’homicide volontaire pendant les troubles de l’année dernière qui ont mis aux prises des jeunes des deux communautés. Ils devaient d’ailleurs comparaître devant le tribunal criminel de Sétif pour répondre de l’accusation de tentative de meurtre. Le procès finalement reporté, s’ouvrira donc demain toujours devant la même cour.
« Savez vous que nous sommes toutes parties à Sétif pour assister au procès de nos enfants et que nous avons été interdites d’accès à l’enceinte du tribunal. Nous n’avons pas pu ne serait ce qu’apercevoir nos enfants. Les forces de l’ordre ont été d’une brutalité inqualifiable » affirme l’une mères, dont deux enfants de 35 et 28 ans figurent parmi les détenus.
« Nous irons toutes demain à Sétif et nous ferons tout pour accéder à cette salle d’audience. Pourquoi nous empêcher de voir nos enfants ? C’est inhumain », ajoute une autre mère de famille, dont l’époux fait parie des 11 détenus. Stoïques, déployant des banderoles sur lesquelles « De quel droit colle t on à nos enfants des accusations infondées ? » ou alors « nous demandons la libération des innocents que leurs enfants attendent», elles attirent le regard de tous les passants sur ce boulevard, le plus grand et le plus important de Ghardaïa.
Certains s’arrêtent pour les réconforter, d’autres lisent les banderoles sans s’arrêter de marcher. A titre de rappel, ces arrestations ont été opérées après les évènements qui se sont produits en novembre 2013 à Guerrara après la sortie des supporters du stade de l’amitié où une rencontre entre deux équipes locales venait d’avoir lieu. Si dans le stade tout s’était très bien passé, ce n’était pas le cas dehors puisque des affrontements violents se sont produits entre les jeunes des deux communautés provoquant la mort d’un jeune habitant.
Ces violences ont été le détonateur de celles qui ont embrasés la région pendant près d’un an provoquant 6 autres décès, des centaines de maisons, de commerces et d’édifices publics détruits, tant à Guerrara, Berriane qu’à Ghardaïa. Depuis, la région a été mise sous étroite surveillance sécuritaire avec le déploiement de milliers de policiers et de gendarmes. Des dizaines de personnes ont été arrêtées dans ce sillage, mises sous mandats de dépôts et transférés dans les prisons de Laghouat, Sétif, Oued Souf, Biskra et Saïda et seront ainsi jugés par les cours de justices de ces sièges de wilaya.
Ces décision de dispatching de prisonniers auraient été prises par les autorités pour, nous dit on, d’une part séparer les prisonniers et d’autre part éloigner ceux-ci du lieu de résidences pour éviter que leurs proches assiègent leurs lieux de détentions et surtout de leur jugement in situ.
K. Nazim