Détenus algériens en Libye: Des cas troublants d’injustices flagrantes
Détenus algériens en Libye
Des cas troublants d’injustices flagrantes
El Watan, 10 mai 2008
Selon l’avocat Abdelmadjid Kalfali, ils seraient une soixantaine d’Algériens et d’Algériennes condamnés par la justice libyenne à la peine capitale, à la prison à perpétuité ou à l’amputation de la main pour différents crimes commis sur le sol libyen.
Sollicité pour commenter les informations diffusées par plusieurs médias nationaux et étrangers faisant état d’une grève de la faim observée depuis des jours par des détenus algériens en Libye, lesquels se seraient littéralement cousus les lèvres en signe de protestation contre leur situation, Abdelmadjid Kalfali, avocat près la cour de Biskra, mandaté par les familles de certains d’entre eux pour représenter et défendre les intérêts qui d’un père, qui d’un frère ou d’un fils, a déclaré à El Watan : « Sur mes conseils, la majorité des grévistes a mis fin, mardi dernier, à cette action de désespoir après avoir eu l’assurance que cette affaire était entre les mains des plus hautes instances des deux pays. » L’ambassadeur d’Algérie à Tripoli devrait incessamment leur rendre visite. » Selon le bâtonnier, ils seraient une soixantaine d’Algériens et d’Algériennes condamnés par la justice libyenne à la peine capitale, à la prison à perpétuité ou à l’amputation de la main pour différents crimes commis sur le sol libyen. « L’étude des dossiers des détenus laisse apparaître des anomalies juridiques et des cas troublants d’injustices flagrantes. La diplomatie algérienne a le devoir de porter secours à des ressortissants algériens vivant le calvaire en terre étrangère », poursuit notre interlocuteur qui rapporte, pour étayer son propos, le cas de Amara Zaïdi, originaire de Annaba, âgé de 51 ans, détenu depuis 18 ans, condamné pour meurtre au même titre que son associé libyen, Ali Tahrouni, avec lequel il gérait un café et qui a été gracié et remis en liberté en 2004, après la suspension de la plainte déposée par la famille de la victime. L’Algérien croupit toujours en prison. Un second cas, celui d’une Algérienne mariée à un Libyen, qui sont condamnés tous deux à la prison à vie. Celui-ci sera remis en liberté après quelques années de prison, tandis que sa compagne demeure incarcérée. Le troisième cas sera celui d’un jeune Algérien de 27 ans, originaire de Maghnia, attendant depuis 4 ans un hypothétique procès. « L’absence d’un accord en matière d’affaires judiciaires entre les Etats libyen et algérien complique les procédures administratives et juridiques mais nous avons la volonté de mener à bien cette mission qui revêt un indéniable caractère humanitaire, requérant la compréhension et la participation de tous », ajoutera l’avocat qui attend vivement la diffusion prochaine d’une émission sur El Jazeera consacrée à cette affaire, à laquelle un haut responsable de l’Etat libyen devrait participer et qui permettra, selon lui, « d’apporter des éclaircissements quant à la situation des détenus algériens en Libye, de préciser la position de la Jamahiria sur ce dossier et, peut-être, obtenir la confirmation ou l’infirmation des rumeurs entourant la décision, encore officieuse, de la promulgation d’une amnistie en faveur d’un grand nombre d’entre eux. » Enfin, il nous apprendra que des justiciables et condamnés, ressortissants de plusieurs pays africains et arabes, également incarcérés en Libye auraient déclenché un mouvement de grève similaire à celui des Algériens pour revendiquer un traitement judiciaire plus équitable et l’amélioration de leurs conditions de détention.
Moussaoui Hafedh
Les prisonniers menacés
Les prisonniers algériens détenus dans les établissements pénitentiaires libyens ont suspendu, mardi dernier, leur grève de la faim entamée vendredi passé, sous la menace de poursuites par la direction générale des prisons, comme nous l’a confirmé un détenu contacté par téléphone.
« Nous étions contraints de suspendre cette grève de la faim de peur d’être poursuivis pour une autre affaire », nous a-t-il déclaré. En effet, plus de 60 prisonniers algériens, dont la majorité sont détenus dans la prison de Jadida à Tripoli, et dans 5 autres maisons d’arrêt de la Jamahiriya, vivent une situation déplorable et réclament toujours la présence du ministre libyen de la Justice, des autorités algériennes, à leur tête l’ambassadeur et le consul général, pour faire la lumière sur la décision de grâce présidentielle de Mouammar Gueddafi, surtout qu’aucune mesure n’a été prise pour les rapatrier. « C’est décevant de voir les autorités algériennes nous tourner le dos, notamment l’ambassadeur algérien qui ne nous a pas rendu visite, malgré notre grève de la faim », dira notre interlocuteur. Rappelons que la majorité de ces prisonniers algériens, âgés entre 23 et 49 ans, sont poursuivis pour trafic de drogue. Alors que 18 parmi eux attendent leur procès, 8 ont été déjà condamnés à mort, 24 à la prison à perpétuité et 5 autres, dont 2 femmes, à l’amputation de la main.
L. S.