Demande d’extradition de Mourad Dhina : Paris perd les pédales face aux pressions d’Alger

Demande d’extradition de Mourad Dhina : Paris perd les pédales face aux pressions d’Alger

Risques Internationaux, 01/03/12 , http://www.risques-internationaux.com/bienvenue/Alger%20breve%20MD.htm

Faute d’avoir pu obtenir, de la Suisse, l’extradition du physicien Mourad Dhina (ancien chercheur de haut niveau au CERN, domicilié à Genève depuis 20 ans et résident en Europe depuis 1983) les autorités algériennes ont reporté leurs pressions sur les autorités françaises. Avec succès, semble-t-il, puisque cet opposant pacifiste au régime algérien fut arrêté à Orly, le 16 janvier ; interpellé, ils fut aussitôt placé en détention sous écrou extraditionnel. Le 15 février 2012, sa demande de libération conditionnelle a été rejetée. Au cours de la même audience, la Cour de Paris a renvoyé, au 21 mars prochain, l’examen de la demande d’extradition formulée par Alger. Or rien, dans cette demande, ne repose sur des faits concrets, celle-ci se bornant à prétendre, sans preuve à l’appui, que Mourad Dhina aurait appartenu à un groupe armé qui aurait opéré en Suisse entre 1997 et 1999.

Première concernée, la Suisse a depuis longtemps mené des enquêtes qui l’ont convaincue qu’il ne s’agissait que d’affabulations.

Si l’extradition en venait à être prononcé, le 21 mars, par la justice française, elle serait en totale contradiction avec la Convention que cette même justice est tenue de respecter dans le cas des extraditions vers l’Algérie : à savoir que toute demande doit être accompagnée « d’un exposé circonstancié des faits pour lesquels l’extradition est demandée, indiquant le plus exactement possible le temps et le lieu où ils ont été commis », ce qui n’est nullement le cas du mandat d’arrêt international lancé par Alger.

Cette affaire soulève une question qui va bien au delà des menaces qui pèsent sur Mourad Dhina lui-même : la France a-t-elle l’intention de réitérer les erreurs qu’elle avait déjà commises sous la pression des régimes de Ben Ali (en Tunisie) et de Moubarak (en Egypte) ? Et quels sont les moyens de pression dont dispose Alger sur Paris ? S’il s’agit d’intérêts économiques, tels ceux que Jean-Pierre Raffarin vient de défendre en Algérie au début du mois de février, la faute est doublement grave : car, en définitive, Paris se sera dédit et déconsidéré – en matière de respect des droits de l’homme – pour rien, ou presque. Il serait temps de comprendre que l’économie algérienne n’a pas le potentiel qu’on lui prête au Nord de la Méditerranée ; il serait temps d’admettre, en particulier, que son PIB pétrolier et gazier est entré en récession en 2006, qu’il n’a cessé de décliner depuis, qu’il a encore reculé de 3,7 %, en volume, en 2011 (cf. un article sera prochainement mis en ligne sur le site de Risques Internationaux) et qu’aucune reprise n’est attendue en 2012.