L’Algérien Ahmed Zaoui croupit dans une prison néo-zélandaise depuis décembre 2002 après une odyssée planétaire

L’Algérien Ahmed Zaoui croupit dans une prison néo-zélandaise depuis décembre 2002 après une odyssée planétaire


Un dossier Quibla. Source : http://quibla.net

L’odyssée d’Ahmed Zaoui, un ancien dirigeant du FIS algérien, dure depuis plus de 10 ans. Après la Belgique, la Suisse et le Burkina Faso, il a échoué en Nouvelle-Zélande, où il est emprisonné depuis décembre 2002. Les défenseurs néo-zélandais des droits humains, notamment Amnesty international, mènent actuellement une campagne acharnée pour que Zaoui soit libéré ou jugé et obtienne l’asile politique en Néo-Zélande. Quibla porte cette affaire à la connaissance du public francophone.

Documents fournis par Amnesty International Nouvelle-Zélande et traduits de l’anglais par BB pour Quibla.
Source : http://www.amnesty.org.nz/zaoui

Photo jointe : Ahmed Zaoui et 2 de ses enfants en Belgique

1 – L’affaire Zaoui

Les droits de l’homme, les libertés fondamentales et l’État de droit sont les instruments essentiels dans l’action pour combattre le terrorisme, et non des privilèges à sacrifier en période de tension.
Kofi Annan, Secrétaire Général de l’ONU au Comité des Nations Unies Contre le Terrorisme, mars 2003

Le réfugié Algérien Ahmed Zaoui, en exil depuis une dizaine d’années, père de quatre enfants et intellectuel musulman, est emprisonné depuis son arrivée à l’aéroport d’Auckland et sa demande d’asile politique en décembre 2002. Il avait été un membre dirigeant du Front Islamique du Salut, le parti politique algérien qui aurait probablement remporté les élections algériennes de 1991-1992 si le gouvernement n’avait pas annulé le deuxième tour de scrutin.
En dépit du rejet en première instance de la demande de M. Zaoui, dans un contexte de rumeurs sur ses liens possibles avec le « terrorisme », l’Autorité néo-zélandaise indépendante de recours pour les demandeurs d’asile (RSAA : Refugee Status Appeals Authority) lui avait accordé le statut de réfugié le 1er août 2003.

Dans un rapport circonstancié, la RSAA avait conclu qu’il pourrait être persécuté et faire face à un risque sérieux d’être torturé en raison de ses opinions politiques s’il était renvoyé en Algérie, et qu’il n’existait aucune preuve crédible de son implication dans le « terrorisme » ou un crime grave, comme il a été prétendu.

Ahmed Zaoui reste néanmoins en prison – et pourrait être expulsé de Nouvelle-Zélande pour se retrouver dans une situation où il pourrait risquer la torture ou la mort – pour des motifs de « sécurité nationale », basés sur des renseignements classés secrets, auxquels ni lui, ni son avocat n’ont accès et qui ne peuvent pas être contestés dans une procédure de justice. Il a été détenu à l’isolement pendant une dizaine de mois dans une prison de haute sécurité et est maintenant incarcéré à la Prison Centrale d’Auckland,en dépit de deux rapports faisant état de stress post-traumatiques et recommandant qu’il soit sorti de tout environnement carcéral.
La RSAA avais mis en doute les bases sur lesquelles M. Zaoui s’était vu refuser en première instance le statut de réfugié politique, notamment les informations avancées par les services de renseignements et de sécurité néo-zélandais, et présenté M. Zaoui comme étant victime d’allégations mensongères en relation avec son opposition au gouvernement algérien, qui l’avait fait juger par contumace et condamner à mort.

Le gouvernement algérien est mis en cause pour des violations massives des droits de l’homme depuis 1992, et on a souvent parlé des opérations des services de renseignements algériens pour discréditer les opposants politiques en exil.

La juge de Haute Cour en retraite Laurie Grieg, Inspecteur général du Renseignement et de la Sécurité effectue un contrôle de l’Attestation de Risque pour la Sécurité qui avait servi, conformément à l’Immigration Act, à justifier l’arrestation de M. Zaoui avant que ce document soit annulé en Haute Cour pour sa « partialité manifeste ». Si l’Inspecteur Général confirme la validité de l’attestation, le Ministre de l’Immigration a trois jours pour décider d’expulser M. Zaoui ou d’ignorer l’attestation et le relâcher. La procédure en cours ne répond pas aux normes de la Cour Européenne des Droits de l’Homme car elle met en balance le droit à la sécurité nationale et les droits de l’homme en matière d’asile politique.
Amnesty International pense que le Gouvernement de Nouvelle-Zélande Government devrait satisfaire à ses obligations internationales en matière de droits de l’homme, et soit libérer Ahmed Zaoui, soit lui accorder « un procès équitable ».

2 – Dernières nouvelles de l’affaire au 21 mai 2004

Dans un rapport rendu public le 21 mai sur l’application de la Convention contre la torture, une commission de l’ONU s’inquiète de « La procédure d’établissement d’une attestation de risque pour la sécurité qui pourrait constituer une infraction à l’article 3 de la Convention » (qui vise à protéger les réfugiés du risque d’être renvoyé là où ils sont menacés de tortures).
Amnesty International a salué la recommandation faite au gouvernement par la Commission contre la torture d’entreprendre des mesures immédiates pour revoir la loi sur l’attestation de risque pour la sécurité.

L’attestation de risque pour la sécurité produite à l’encontre de M. Zaoui par le SIS [Service de sécurité et de renseignement] va faire l’objet d’un réexamen par le juge Neazor, qui remplacera la juge Grieg au poste d’Inspecteur général du Renseignement et de la Sécurité à compter du 8 juin. Justice Greig a démissionné en avril suite au constat fait par la Haute Cour d’une évidente partialité en défaveur de M. Zaoui.

Dans ses conclusions, la Cour considère que les commentaires publics de la juge Greig ont donné la nette impression d’un préjugé contre M. Zaoui.

« Cette procédure requiert l’observation de l’impartialité la plus complète, compte tenu de l’entière dépendance de M. Zaoui vis-à-vis de l’exercice de ses fonctions par l’Inspecteur général et des conséquences pour lui d’une décision défavorable. De même, il est impératif qu’une procédure de cette importance, tant pour M. Zaoui que pour nos intérêts en matière de sécurité en général, ne soit pas entachée par un doute fondé et persistant sur l’indépendance de l’Inspecteur général. Ces considérations nous amènent à conclure que l’Inspecteur général devrait être écarté de la procédure de révision (§ 107)’ ».

3 – Les « allégations » du Service de sécurité et de renseignement néo-zélandais [NZSIS], 27 janvier 2004

Le document suivant émane di directeur du Service de sécurité et de renseignement néo-zélandais et a été rendu public par les avocats de M. Zaoui le 20 février 2004
 » Résumé des allégations » et raisonnement du directeur de la sécurité dans l’établissement d’une « Attestation de risque pour la sécurité… concernant M. Ahmed Zaoui

1. Ahmed Zaoui est arrivé en Nouvelle-Zélande le 4 décembre 2002 et a tenté pendant son voyage de détruire un faux passeport sud-africain. Il a été interrogé à l’aéroport par des agents des douanes et de l’immigration avant d’être arrêté puis interrogé par la police. Il a alors été interrogé conjointement par des agents de police et du NZSIS et, par la suite, en solo par un agent du NZSIS arabophone.

2. Au cours de l’interrogatoire conjoint Police/NZSIS, M. Zaoui a été questionné sur le film vidéo qu’il a réalisé pendant son voyage par la route de Malaisie jusqu’au Vietnam via la Thaïlande et le Laos. Leur contenu, qui porte sur des lieux dépourvus de tout caractère touristique mais qui sont fréquentés par des Occidentaux, tels le siège d’une compagnie pétrolière, des cars de touristes et un cybercafé, a paru suffisamment suspect pour en faire une vidéo « accusatoire ». Ses réponses n’ont pas suffi à dissiper les inquiétudes de type sécuritaire. La bande vidéo montre aussi ce qu’il a indiqué être sa deuxième visite d’une mosquée d’Hanoi, probablement fréquentée par des diplomates Algériens. Il n’a pas répondu de manière convaincante à la question de savoir pourquoi, alors qu’il craignait (selon ses dires) d’être découvert par des agents des services de sécurité algériens, il se s’est rendu deux fois dans un endroit où il pouvait être reconnu par des diplomates algériens.

3. L’entretien avec un agent du NZSIS arabophone a permis de relever un détail inquiétant en matière de sécurité, en relation avec la véracité d’une réponse donnée par M. Zaoui et qui ne peut pas être révélée sans compromettre des informations de nature sécuritaire qui ne peuvent être divulgués.

4. Le Service a lancé des demandes d’informations à ses partenaires à l’étranger qu sujet des activités de M. Zaoui depuis qu’il a quitté l’Algérie . Ces informations ont confirmé que M. Zaoui :
– s’était vu par deux fois, en 1995 et en 1996, refuser le statut de réfugié en Belgique ;
– avait été convaincu en Belgique, en 1996, d’être le chef et l’instigateur d’une organisation criminelle ayant l’intention de s’attaquer à des personnes et des biens,
– ayant été remis en liberté, avait fait l’objet par ordre ministériel d’une assignation à résidence qui restreignait ses mouvements à la rue de Bruxelles où il résidait avec sa famille ;
– avait néanmoins quitté la Belgique était entré illégalement en Suisse en 1997,
– s’était engagé en Suisse dans des activités que le gouvernement de ce pays avait considéré comme mettant en danger la sécurité intérieure et extérieure de la Suisse. Les autorités suisses lui ont donc retiré son fax, sa boîte email et son accès Internet.
– avait saisi la Cour Européenne des Droits de l’Homme contre la décision suisse. La Cour Européenne avait considéré que la requête était manifestement sans fondement et l’avait déclarée complètement irrecevable;
– avait été expulsé de Suisse vers le Burkina Faso en 1998
– avait quitté le Burkina Faso en 200 pour la Malaisie
– avait été jugé en 2001 par contumace en France coupable de participation à une association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste

5. Ces demandes d’information ont aussi permis de réunir des données classifiées qui ont étayé les faits ci-dessus qui sont de notoriété publique. Tant les faits publics que les informations classifiées montrent clairement qu’on n’avait pas affaire à la répétition d’informations en provenance d’une source unique. Mieux, les autorités compétentes de chacun des trois pays ont réalisé leurs propres investigations indépendantes sur les activités de M. Zaoui dans leurs propres pays et ont abouti aux conclusions qui se sont traduites par des condamnations et d’autres décisions.

6. Le NZSIS a discuté avec les services partenaires de la possibilité d’obtenir un résumé déclassifié ou une copie des informations classifiées. Les Belges et les Suisses ont accepté et ces informations ont été transmises aux avocats de M. Zaoui en mai 2003.
– Pour l’essentiel, les informations belges déclassifiées confirmaient que M. Zaoui était le chef et l’instigateur d’une association criminelle ayant l’intention de s’attaquer aux personnes et aux biens, sans que ce mouvement ait été clairement identifié.
– Le Conseil Fédéral Suisse avait considéré que (traduction non officielle) « la reprise de ses activités par M. Zaoui était une menace potentielle pour la sécurité intérieure de la Suisse. Ses activités séditieuses et de provocation pourraient déboucher sur des actes de violence et même des attentats en Suisse. Compte tenu de ses engagements internationaux, la Suisse ne peut tolérer plus longtemps l’apparition sur son sol de groupements qui soutiennent, encouragent ou mènent, directement ou indirectement, des actions violentes ou terroristes. Les agissements du leader du FIS en Suisse sont de nature à affecter aussi les relations de notre pays avec des États étrangers et donc à mettre en péril la sécurité extérieure de la Suisse. »

7. Le 20 mars 2003, le Directeur de la Sécurité a établi une Attestation de Risque pour la Sécurité concernant M. Zaoui, fondé sur la définition [c]de la sécurité par le NZSIS Act de 1969 :
 » La protection de la Nouvelle-Zélande contre des activités à l’intérieur ou en relation avec la Nouvelle-Zélande qui –
(i) Sont influencées par une quelconque organisation ou personne étrangère ; et
(ii) Sont clandestines ou de couverture, ou menacent le sécurité des personnes, et
(iii) Influent négativement sur le statut international de la Nouvelle-Zélande.

8. Son raisonnement est le suivant, sous la forme de commentaires pour chaque partie de la définition. Il est basé à la fois sur les décisions et condamnations européennes connues relatives à la sécurité et sur des informations classifiées qui ne peuvent être divulguées.
 » La protection de la Nouvelle-Zélande contre des activités à l’intérieur ou en relation avec la Nouvelle-Zélande » – Il est raisonnable de suspecter que s’il est autorisé à s’établir en Nouvelle-Zélande, M. Zaoui pourrait à plus ou moins brève échéance entreprendre, faciliter, promouvoir ou encourager des activités telles que celles pour lesquelles il a été condamné en Belgique et en France et/ou que le gouvernement suisse a considérées comme menaçant la sécurité intérieure et extérieure de la Suisse. Sa présence chez nous pourrait attirer directement (des gens qui veulent travailler avec lui) et indirectement (des gens incités à croire que la Nouvelle-Zélande est un lieu sûr pour des personnes ayant le même profil) d’autres personnes susceptibles de s’engager dans des activités posant des problèmes de sécurité.
 » Sont influencées par une quelconque organisation ou personne étrangère « 
M. Zaoui est de nationalité étrangère. Il a de longs antécédents d’implication avec des personnes et des organisations étrangères dans lesquelles il a eu un rôle dirigeant. Il existe de bonnes raisons de croire que toute activité future qu’il entreprendra soit marquée par l’influence d’autres étrangers et/ou par des organisations étrangères.
 » Sont clandestines ou de couverture, ou menacent le sécurité des personnes »
Les activités pour lesquelles il a été condamné en Belgique et en France étaient clandestine ou de couverture, ou menaçaient la sécurité des personnes. Le gouvernement suisse avait pensé que ses activités en Suisse « pouvaient conduire à des actes de violence et même à des attentats en Suisse ». Des activités de ce genre en Nouvelle-Zélande, du fait de M. Zaoui ou d’autres personnes attirées par sa présence ici, pourraient menacer la sécurité des Néo-Zélandais.

 » Influent négativement sur le statut international de la Nouvelle-Zélande. »
En tant que membre de la communauté internationale, il est de la responsabilité de la Nouvelle-Zélande d’assumer son rôle dans le contrôle, la neutralisation et la prévention d’activités qui menacent la sécurité, activités du type de celles qui ont valu à M. Zaoui d’être condamné en Belgique et en France, et d’être expulsé de Suisse. Un des objectifs du gouvernement, en accord avec ce qui précède, est de s’assurer que la Nouvelle-Zélande ne soit ni la victime, ni l’origine d’actes terroristes ou d’autres activités préjudiciables à la sécurité, et d’empêcher que la Nouvelle-Zélande soit ou devienne un lieu sûr pour des personnes qui ont entrepris, ou pourraient envisager d’entreprendre, de telles activités.

Si M. Zaoui, avec ses antécédents connus, était autorisé à s’installer ici, cela voudrait dire que la Nouvelle-Zélande a un moindre souci de la sécurité que d’autres pays du même type. Ce qui aurait un impact négatif sur la réputation de la Nouvelle-Zélande dans ces pays et donc sur le statut international de la Nouvelle-Zélande.

Si M. Zaoui, ou d’autres personnes attirées en Nouvelle-Zélande par sa présence ici, devait entreprendre, faciliter, promouvoir ou encourager des activités préjudiciables à la sécurité, en Nouvelle-Zélande ou ailleurs à partir de la Nouvelle-Zélande, l’impact négatif sur la réputation de la Nouvelle-Zélande et donc sur son statut international serait très sérieux.>
ER Woods, Directeur de la Sécurité, 27 janvier 2004

4 – Questions et réponses sur Ahmed Zaoui

Quels sont les droits d’Ahmed Zaoui en matière de demande d’asile en Nouvelle-Zélande?
Selon le droit international et celui de Nouvelle-Zélande, une personne est en droit de faire une demande d’asile dans un autre pays quand elle a « des raisons fondées de craindre la persécution » dans le pays d’où elle vient.

Ahmed Zaoui est arrivé muni de faux papiers, n’avait-il pas quelque chose à cacher ?
De nombreux demandeurs d’asile doivent quitter leur pays à la hâte et sont donc dans l’incapacité de se procurer les papiers nécessaires. Souvent, les régimes répressifs comme le gouvernement algérien, empêchent activement les sorties du territoire. Ils possèdent des « listes noires » de ceux qui s’élèvent contre le gouvernement au nom de la liberté et les empêchent de quitter librement leur pays. Compte tenu des grandes difficultés dans cette fuite des situations de violations des droits de l’homme, les réfugiés n’ont guère d’autre choix que de venir chercher la sécurité en Nouvelle-Zélande munis de faux papiers.
Dès son arrivée en Nouvelle-Zélande, M. Zaoui a immédiatement demandé l’asile et a été absolument sincère sur sa situation.

Comment se fait-il qu’Ahmed Zaoui est réfugié en Nouvelle-Zélande alors que des pays d’Europe et d’Afrique ne lui aient pas accordé le statut de réfugié lorsqu’il le leur a demandé?
La Nouvelle-Zélande est reconnue pour avoir une des procédures les plus équitables au monde pour déterminer la qualité de réfugié. En dix ans d’exil, un tribunal indépendant et l’Autorité de Recours pour le Statut de Réfugié (RSAA) ont accompli le premier examen complet des allégations contre M. Zaoui et de sa demande d’asile. Cet examen a conclu que les condamnations étaient « non conformes au droit » et ne reposaient sur aucune « preuve fiable ».
– En 1993, il avait demandé l’asile à la Belgique qui lui avait refusé le statut de réfugié pour ses liens prétendus avec le Groupe Islamique Armé ou GIA, bien que ces accusations eussent été estimées sans fondement en première instance et en appel en Belgique. Il avait été condamné pour des charges plus vagues par des tribunaux belges et français.
– En 1997, la Suisse avait mis sa demande d’asile en attente le temps de pouvoir l’expulser avec sa famille vers le Burkina Faso en 1998. Sa demande n’avait même pas été instruite. Amnesty International a condamné cette expulsion comme « arbitraire » et « basée sur des intérêts politiques ».
– le bureau de l’ONU à Ouagadougou, la capitale du Burkina Faso, lui a refusé le droit de formuler une demande d’asile durant sa présence dans ce pays.
– La France l’a jugé par contumace en 2001 sans qu’il en soit informé. La condamnation comportait une interdiction d’entrer sur le territoire de huit ans, lui refusant ainsi la possibilité de demander l’asile en France au cas où il l’aurait souhaité.

Ahmed Zaoui doit être coupable de quelque chose : sinon pourquoi aurait-il été condamné en Belgique, en Suisse et en France ?
Après son arrestation, Ahmed Zaoui avait été interrogé à plusieurs reprises en l’absence d’avocat et d’interprète. Il n’y avait pas d’interprète au cours de son procès. En mai 2003, Gilles Vanderbeck, son avocat, a écrit une lettre dans laquelle il pointe ses inquiétudes sur cette affaire : « Au cours de ce procès, je n’ai pu chasser de mon esprit une forte impression de manipulation de l’enquête. »

Le 3 octobre 1995, le tribunal avait écarté toutes les charges criminelles retenues contre lui. Il avait été maintenu en détention car le Procureur de l’Etat avait fait appel de cette première décision. Appel qui s’est soldé par sa condamnation à neuf ans de prison, dont cinq avec sursis, en tant que « chef d’une association de malfaiteurs » et pour usage de deux faux passeports.

Le 28 novembre 1995, les autorités belges ont délivré un arrêté d’expulsion à l’encontre d’Ahmed Zaoui mais, suite à la consultation de la Commission Consultative des Etrangers, une décision a été rendue selon laquelle « es faits qui ont conduit à la condamnation du requérant ne reposaient pas sur des preuves suffisantes de menace à l’ordre public. »
L’Autorité d’Appel pour le Statut de Réfugié a conclu que « les condamnations belges ne sont pas conformes au droit et n’apportent aucune preuve claire ou fiable de l’implication du requérant dans des actes terroristes ou tous autre crime de droit commun.…

Suisse
Ahmed Zaoui n’a jamais fait l’objet d’accusation d’infraction criminelle en Suisse. Deux jours après son arrivée dans ce pays le 2 novembre 1997, il a été placé en maison d’arrêt. Le 1er décembre, le Conseil Fédéral Suisse a ordonné l’expulsion d’Ahmed Zaoui, sur la base de problèmes de sécurité nationale, dès qu’un pays tiers sans risque pour lui pourra être trouvé.
On pense que la décision d’expulsion avait été influencée par les condamnations, désormais discréditées, d’Ahmed Zaoui en Belgique.
L’Autorité d’Appel pour le Statut de Réfugié a prononcé :
Nos conclusions sont que les preuves concernant l’appartenance du requérant au CCFIS [implantation européenne du parti du Front Islamique du Salut] et ses autres activités en Suisse ne sont pas des motifs suffisants pour considérer qu’il était engagé dans ou encourageait des activités extrémistes ou terroristes susceptibles de lui faire appliquer les dispositions d’exclusion prévues par l’article 1F de la Convention sur les réfugiés [paragraphe 797].

France
En 2001Ahmed Zaoui a été condamné par contumace en France pour un certain nombre d’infractions telles que la falsification et le recel de biens volés (des passeports) et la participation à une association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste.
Il avait été condamné à trois années d’emprisonnement avec sursis et interdit de séjour en France pour une durée de huit ans.
Il n’avait pas eu connaissance de ces accusations et ne s’était pas vu accorder la possibilité de se défendre contre les allégations portées contre lui.
Dans les attendus de sa décision, l’Autorité d’Appel pour le Statut de Réfugié précise que « Au sujet du jugement en France, nous avons été frappés par la ténuité des preuves sur lesquelles s’est fondée la condamnation du requérant » et arrive à la conclusion que :
Les condamnations du requérant en France ne sont pas fondées en droit et ne constituent pas une preuve réelle de l’implication du requérant dans une association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste. [Paragraphe 867]

Pourquoi Ahmed Zaoui a-t-il été expulsé de Suisse ?
Un mois après l’arrivée de la famille Zaoui en Suisse, le Conseil Fédéral Suisse avait ordonné l’expulsion d’Ahmed Zaoui, pour des raisons de sécurité nationale, dès qu’un pays d’accueil tiers aurait été trouvé.
On suppose que l’ordre d’expulsion avait été influencé par les condamnations désormais discréditées d’Ahmed Zaoui en Belgique.
A l’époque de cette expulsion, Amnesty International avait dénoncé l’action du gouvernement comme « arbitraire » et « basée sur des intérêts politiques ».

L’Algérie a condamné Ahmed Zaoui pour terrorisme. Pourquoi la Nouvelle-Zélande accueille-t-elle un terroriste notoire ?

L’Autorité d’Appel pour le Statut de Réfugié a blanchi M. Zaoui de tout lien et de toute activité terroristes.
Ahmed Zaoui a été jugé à plusieurs reprises en Algérie pour des délits « terroristes… et condamné à mort et à la prison à vie. Son premier procès par un tribunal d’exception qui l’avait condamné à mort en août 2003 a provoqué sa fuite d’Algérie. D’autres condamnations par un tribunal militaire sont intervenues en 1996 et 1997.
Amnesty International n’a été qu’une des nombreuses organisations des droits de l’homme à dénoncer la création comme le recours à des tribunaux d’exception et militaires ainsi que des procès qui violaient les règles d’impartialité admises au niveau international.
Les critiques formulées par Amnesty concernaient entre autres l’utilisation habituelle voire exclusive comme preuves d’aveux extorqués sous la torture ; les droits de la défense étaient sévèrement limités, les avocats disposant d’un délai insuffisant pour préparer la défense, n’ayant qu’un accès partiel au dossier de leur client, et souvent empêchés de citer des témoins à décharge. La composition du tribunal d’exception était restée secrète de sorte que son indépendance ne pouvait pas être garantie.
Depuis 1992 Amnesty a régulièrement condamné le gouvernement algérien pour ses violations flagrantes des droits de l’Homme. Amnesty décrit en gros ce gouvernement comme celui qui a été responsable de milliers de cas de torture, de « disparitions » et de meurtres depuis qu’il avait annulé en 1992 les seules élections générales démocratiques qu’ait connu ce pays.

Les autorités algériennes affirment avoir « neutralisé » 20 000 terroristes en Algérie depuis 1992, dans un conflit au cours duquel des milliers d’hommes, de femmes et d’enfants ont été enlevés, torturés, ont « disparu » et 100 000 à 200 000 personnes tuées. Des observateurs indépendants estiment que de nombreux actes terroristes perpétrés contre la population civile engagent la responsabilité des forces algériennes de sécurité.

A l’aéroport d’Auckland, Ahmed Zaoui a avoué être un membre du GIA. Comment pourrait-il ne pas être un terroriste s’il admet être membre du GIA ?
Ahmed Zaoui affirme ne jamais avoir fait un tel aveu. Au contraire, quand il a été interrogé par un jeune officier des douanes, promu de fraîche date, , il a répondu en prononçant en français les initiales de l’organisation qu’il représente – le FIS. L’Autorité d’Appel pour le Statut de Réfugié a reconnu que l’officier des douanes semblait avoir compris la réponse comme étant « yes ».

Ahmed Zaoui n’a rien à voir avec la Nouvelle-Zélande, pourquoi ne pas l’expulser ?
La Nouvelle- Zélande a une longue tradition de promotion et de protection des droits de l’homme, et a des obligations légales au titre de la Convention pour les Réfugiés, de la Convention contre la torture et de la Convention pour les droits civiques et politiques. La Nouvelle-Zélande a l’obligation de ne pas contraindre un réfugié à repartir vers un pays dont le réfugié s’est enfui et/ou vers un pays où on peut craindre qu’il soit sujet à une violation de ses droits humains.
L’Autorité néo-zélandaise d’Appel pour le Statut de Réfugié précise :
 » Nous n’avons aucun doute que le requérant sera persécuté s’il est renvoyé en Algérie. A son arrivée il sera arrêté et presque certainement torturé….
Les bras d’Ahmed Zaoui portent les cicatrices visibles de brûlures au chalumeau infligées dans les séances de torture qu’il a subies en Algérie en 1986.

Pourquoi la Nouvelle-Zélande devrait offrir un refuge à Ahmed Zaoui alors que l’Islam fondamentaliste est en opposition avec les normes relatives aux droits de l’Homme ?
Comme les autres grandes traditions religieuses, l’Islam est multiforme. Ahmed Zaoui a été décrit comme un musulman modéré et un ardent défenseur des droits de l’homme.
En 1994, il avait été approché par la Communauté de Sant’Egidio de Rome pour contribuer à l’établissement d’un dialogue entre les forces politiques algériennes dans le but de trouver une solution de compromis à la crise. La Communauté de Sant’Egidio est une institution religieuse respectée, basée en Europe, qui cherche par le dialogue à apporter paix et coopération entre les religions et aussi à résoudre les conflits. http://www.santegidio.org/en/index.html

Amnesty International milite pour l’universalité et l’indivisibilité des droits de l’Homme selon les dispositions de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme.
La Nouvelle-Zélande s’est engagée à respecter cette déclaration et son article 14 qui donne à chacun le droit de chercher de bénéficier dans d’autres pays d’un refuge contre la persécution. La Nouvelle-Zélande a l’obligation de respecter ce droit, tout comme les réfugiés ont l’obligation de respecter les lois du pays qui leur donne l’asile.
La Nouvelle-Zélande serait bien naïve -d’inviter des terroristes chez elle et de ne pas adopter la manière forte avec Ahmed Zaoui.
La Nouvelle-Zélande n’est pas « bien naïve ». Seulement 3 % des demandeurs d’asile qui font appel d’une décision de refus du statut de réfugié obtiennent gain de cause (selon le Dominion Post du 15 Septembre 2003). S’il existe des preuves qu’Ahmed Zaoui est responsable d’actes « terroristes », la Nouvelle-Zélande devrait le juger de manière équitable en Nouvelle-Zélande, et non songer à l’expulser vers un pays « sûr ».

5 – Ce qu’Ahmed Zaoui dit de son emprisonnement

« Sur l’ensemble des auditions, onze journées ont été consacrées au témoignage du requérant. Nous avons examiné tous les aspects pertinents de son passé et nous sommes efforcés de d’approfondir tous les problèmes soulevés. Nous avons entendu d’autres témoignages et avons été en mesure de confronter les dires du requérant à tout un ensemble d’informations provenant d’autres sources. Son témoignage a été corroboré point par point ».
Décision de l’Autorité d’Appel pour le Statut de Réfugié [para 393]
 » Je souffre de rhumatismes très douloureux et de sciatique, particulièrement par temps froid et humide. Je suis de nature optimiste mais depuis mon arrivée ici, j’ai commencé à broyer du noir je me sens déçu et déprimé. Je ne veux pas donner dans la paranoïa mais je me suis mis dans la tête qu’un coup avait été monté contre moi. Ma foi m’a beaucoup aidé à résister à la dépression. Avec le temps, je suis devenu plus optimiste et aujourd’hui j’y vois plus clair et de manière plus positive. »
 » Le long séjour que j’ai passé en prison ici m’a donné du temps pour me pencher et réfléchir sur ma vie et mon itinéraire politique. On devrait garder à l’esprit que la politique est une philosophie évolutive, et non un axiome mathématique. Il faut compter avec les nombreuses inconnues et le hasard. En considérant mon passé et toutes les difficultés que ma famille et moi-même avons subies, je peux dire sincèrement que si c’était à refaire, je ne voudrais rien changer. J’assume ma propre responsabilité car je suis innocent. Ma conviction a toujours été la même : je lutte pour une cause, la cause de la démocratie et des droits de l’homme dans mon pays. C’est une cause juste, j’y crois et je m’y tiens. J’ai la conscience tranquille. »

6 – Pour écrire à Ahmed Zaoui

Ahmed peut recevoir des lettres, cartes postales et paquets à l’adresse suivante :
Ahmed Zaoui
Auckland Central Remand Prison
PO Box 8180
Symonds Street
Auckland
Nouvelle-Zélande
Le courrier lui est livré 3 jours après réception.

7 – Pétition online pour Ahmed Zaoui

We the undersigned appeal to the New Zealand government to release Ahmed Zaoui from Auckland Central Remand Prison, or give him the fair trial he has been denied.
Nous soussignés en appelons au gouvernement néo-zélandais pour qu’il libère Ahmed Zaoui de la Prison centrale préventive d’Auckland.
Pour signer cette pétition, aller à : http://www.amnesty.org.nz/web/postcards.nsf/03NZAhmedZaoui!OpenForm