Quand les Syriens deviennent des sans-papiers

Quand les Syriens deviennent des sans-papiers

El Watan, 15 septembre 2016

On se souvient des centaines de rescapés fuyant l’enfer d’Alep et autres provinces accablées par la violence, venus trouver refuge sous nos cieux à la faveur d’un pont aérien improvisé entre Alger et Damas.

On se rappelle de ce terrible été 2012 quand des familles syriennes désemparées se voyaient réduites à vivre dans la rue, avec femmes et enfants, comme des SDF, et durent passer tout le Ramadhan dans les allées du square Port Saïd et autres places publiques. Leur sort avait suscité une vive émotion, donnant lieu à de belles expressions de solidarité. La présence syrienne en Algérie s’est faite relativement discrète depuis, particulièrement après l’instauration du visa pour les ressortissants syriens en janvier 2015, manifestement pour des considérations sécuritaires. A la barrière géographique couplée au coût du voyage vient ainsi s’ajouter une barrière administrative qui filtre scrupuleusement les flux migratoires en provenance du Cham.

Selon le dernier rapport du département d’Etat américain sur la situation des droits humains en Algérie, la communauté syrienne dans notre pays était évaluée à 24 000 âmes à l’automne 2015, chiffre attribué au ministère de la Solidarité. Le rapport du département d’Etat américain ajoute que «d’autres organisations estiment que leur nombre est proche de 43 000». La même source assure que l’antenne du HCR en Algérie a enregistré 5500 demandes d’asile émanant de ressortissants syriens depuis 2012.

Bureaucratie sécuritaire

La communauté syrienne établie en Algérie, faut-il le préciser, est loin de se limiter à ces hères en haillons dressés au beau milieu de la route ou errant au bord des quais et brandissant une pancarte avec la mention : «Famille syrienne, aidez-nous s’il vous plaît». En réalité, la majorité des Syriens installés en Algérie vivent discrètement, ne tendent pas la sébile, travaillent, louent des maisons, et les plus nantis d’entre eux n’hésitent pas à investir dans de petites affaires. On les retrouve notamment dans la restauration, la pâtisserie «orientale», le bâtiment, l’habillement… «Ils ont réussi à s’intégrer au sein de la société algérienne», observe Saïda Benhabilès, présidente du Croissant-Rouge algérien.

Il importe de souligner qu’officiellement les Syriens n’ont pas le statut de réfugiés. Ils doivent, dès lors, se conformer aux dispositions de la loi relative aux conditions d’entrée, de séjour et de circulation des étrangers en Algérie (voir encadré). Celle-ci oblige tout ressortissant étranger qui prévoit de s’établir en Algérie d’avoir une carte de résident, un sésame que la grande majorité des Syriens ont du mal à décrocher. En cause : une bureaucratie sécuritaire qui, sous couvert de la prévention contre toute infiltration d’éléments pro-Daech, a évolué très rapidement dans le sens d’un durcissement des conditions de délivrance des titres de séjour pour l’ensemble des exilés syriens.

Loin du lyrisme du discours officiel qui ne cesse de clamer urbi et orbi le soutien indéfectible de l’Algérie «houkoumatan wa chaâban» à «Souria echaqiqa» et de souligner la profondeur des liens historiques entre les deux peuples en rappelant l’épisode de l’accueil de l’Emir Abdelkader lors de son exil damascène, dans les faits, les Syriens ne bénéficient d’aucun régime particulier qui leur permettrait d’accéder plus aisément à la fameuse «iqama» (résidence). On est donc dans un étrange entre-deux où, d’un côté, ils jouissent d’une grande sympathie populaire, et, de l’autre, se trouvent confrontés à une galère administrative telle, qu’une bonne partie d’entre eux sont devenus des «sans-papiers».

Des procédures qui s’apparentent à un contrôle judiciaire

Fayad est ingénieur dans une société pétrolière basée à Hassi Messaoud. Originaire de Dir Ezzour, il est arrivé en Algérie en août 2012. «J’étais venu pour un mois ; après, la situation ayant empiré en Syrie, j’ai dû rester», raconte-t-il. En août 2014, sa famille l’a rejoint sans encombre.

«Mes enfants suivent leur scolarité en Algérie sans problème et cela se passe très bien pour eux», reconnaît-il. En dépit d’un statut en béton, Fayad peine cependant à renouveler sa carte de résident. Etant sous contrat avec une société ayant pignon sur rue dans le secteur pétrolier et «qui travaille avec l’Etat algérien», tient-il à souligner, cela n’aurait dû poser aucun problème. «Habituellement, c’est la société qui s’occupe de tout», explique-t-il. «Les premières années, tout se passait très bien.

Mais ces derniers temps, nous avons perçu des changements dans le régime de délivrance de la résidence qui s’apparente à une forme de pression sur les Syriens», s’agace Fayad. Evoquant son cas personnel, il témoigne : «J’ai été surpris de me voir retirer ma résidence temporaire au niveau de Hassi Messaoud et on a signifié à la société que comme j’étais Syrien, il fallait voir avec la wilaya de Ouargla. La société a présenté mon dossier à la wilaya de Ouargla il y a maintenant plus d’un mois, et jusqu’à présent je n’ai reçu aucune réponse.» Cette lenteur administrative serait-elle inhérente à l’enquête sécuritaire préalable à toute attribution de résidence ? Fayad n’a eu aucune explication.

L’ingénieur pétrolier ne manque pas, en tout cas, d’exprimer son étonnement face à ce traitement auquel il n’est guère habitué en faisant valoir le fait qu’il présente toutes les garanties. «La compagnie où je travaille se porte garante pour moi, de même que mon bailleur qui m’exprime tout son soutien. Il ne faut pas mettre tout le monde dans le même sac. Ce n’est pas juste !» peste-t-il.

Fayad rapporte cet autre fait qui en dit long sur les restrictions imposées à la mobilité des Syriens. Non seulement la grande majorité d’entre eux se retrouvent dans l’incapacité d’aller rendre visite à leurs familles, en Syrie, et revenir à leur guise, mais même sur les lignes intérieures, leurs déplacements sont devenus compliqués. «Figurez-vous que même pour prendre l’avion pour aller de Hassi Messaoud à Alger, il faut montrer son visa ou sa carte de séjour. Un policier m’en a fait la remarque récemment, et j’ai dû lui expliquer ma situation par le menu en arguant du fait que cela revient exactement au même que si je prenais un bus puisqu’on est dans les frontières nationales.» Et de faire remarquer : «L’Algérie est devenue notre pays de substitution.

Nous n’avons surtout pas intérêt à créer des problèmes puisque nous en serions les premières victimes.» Fayad croit savoir que «dans le nouveau système, nous serons désormais obligés de pointer tous les deux mois pour mettre à jour nos papiers avec obligation de reconstituer tout le dossier à chaque fois. On ne peut pas appeler cela une carte de résidence. Si au moins le délai était de six mois… Maintenant, on ne va faire que ça.» Eprouvé par les tracasseries administratives, Fayad songe carrément à lâcher prise et faire comme beaucoup de ses compatriotes : mettre une croix sur la résidence jusqu’à nouvel ordre.

«La plupart des employeurs nous font travailler sans contrat»

Devant les difficultés à obtenir certains documents, notamment le contrat de travail et le bail de location, beaucoup de Syriens ont fini par renoncer à entreprendre les démarches nécessaires pour régulariser leur situation. «Aujourd’hui, je peux vous dire que 80% des Syriens en Algérie n’ont pas de papiers», affirme Mahmoud, un jeune Syrien qui vit près de Tipasa. «Je suis entré en Algérie en 2014, avant l’instauration du visa», raconte Mahmoud. «Je suis originaire de Damas même. Ma mère et mon père ainsi que ma petite sœur sont toujours là-bas. J’ai aussi un frère qui a dû s’exiler en Autriche. Je leur parle tous les jours pour prendre de leurs nouvelles», confie-t-il.

Ayant à son actif une expérience d’une quinzaine d’années en menuiserie aluminium, Mahmoud arrive tant bien que mal à se faire embaucher. Il précise que c’est grâce à un ami algérien qui lui a offert de l’héberger qu’il a réussi à obtenir un titre de séjour. Mais sa situation administrative demeure précaire. «J’ai dû m’y prendre à trois reprises pour déposer mon dossier, à chaque fois il manquait un papier. J’ai dû abandonner la procédure et je me suis retrouvé dans la clandestinité pendant une certaine période. Après, j’ai été hébergé par un frère algérien qui m’a aidé à faire mes papiers. Tous les 45 jours, je dois pointer à la sûreté de ma commune de résidence pour prolonger mon titre de séjour.

Mais combien de Syriens peuvent bénéficier de la caution d’un citoyen algérien ?» s’interroge-t-il. Mahmoud évoque dans la foulée un autre problème récurrent auquel sont confrontés les Syriens : le travail au noir. Une pratique particulièrement répandue dans le secteur du BTP qui emploie de plus en plus de Syriens. «Les contrats de travail sont quasi inexistants, la plupart des employeurs nous font travailler au noir. S’ils te font un contrat, cela suppose qu’ils vont t’assurer la couverture sociale, l’assurance et tous les droits qui vont avec.

Or, ils ne veulent pas s’acquitter des charges sociales. Certains n’hésitent pas à exploiter les travailleurs syriens. Ils sont souvent sous-payés et tu ne peux pas te plaindre puisque tu es illégal», rapporte Mahmoud, avant de nous livrer ce témoignage : «J’ai travaillé à un moment donné dans une entreprise privée et j’ai senti que j’étais devenu un fardeau pour mon employeur du fait que j’étais syrien. Honnêtement, il a été très correct avec moi, mais j’ai fini par démissionner de moi-même pour ne pas le mettre dans la gêne.»

Mahmoud vit son exil forcé comme un «assir», un «détenu», comme il dit, faute d’un statut clair : «Sans papiers, tu te retrouves interdit de travailler dignement, interdit de circuler, interdit de tout. On demande juste une résidence légale», plaide-t-il. «Aujourd’hui, on vit comme des prisonniers. Sans papiers, tu te sens dans la peau d’un détenu. L’exil est devenu une prison pour nous.»

«On n’est pas des mendiants»

Le cas de Fadi est un tantinet différent. Agé aujourd’hui de 26 ans, cet Alépin de naissance s’est installé en Algérie il y a sept ans. Il travaille comme plâtrier et décorateur, un métier très demandé. Bien que la durée de sa présence en Algérie le rend éligible à la carte de résidence de 10 ans, Fadi a tout le mal du monde à faire ses papiers. «A l’approche de mon rendez-vous pour le dépôt de mon dossier, mon passeport avait expiré et, le temps de le refaire, j’ai perdu mon rendez-vous. Après, il y a eu beaucoup de Syriens qui sont arrivés, on m’a mélangé avec les autres, et je dois maintenant tout recommencer de zéro», déplore-t-il. Notre artisan plâtrier écume les pages facebook dédiées aux Syriens établis en Algérie.

Certaines de ces pages fonctionnent comme de véritables espaces de petites annonces. On y trouve, pêle-mêle, des offres et des demandes d’emploi, des messages de chefs de famille à la recherche d’une location pas trop chère, des demandes de renseignements sur certaines procédures administratives. On peut y dénicher également des prestataires syriens proposant leurs services. «Il ne faut pas vous attarder sur les images de ceux qui ont recours à la mendicité. Ceux qui font cela ne nous représentent pas. Un vrai Syrien ne tend jamais la main. On n’est pas des mendiants. Nous sommes des gens travailleurs et dignes», insiste Fadi.

Et d’adresser ce message à son pays d’adoption : «Nous avons été très bien reçus par nos frères algériens et nous sommes très reconnaissants à l’Algérie de nous avoir accueillis. Qu’elle aille au bout de son geste de solidarité et nous délivre la résidence. On continue à vivoter avec des documents de séjour éphémères de 90 jours, 45 jours… Tu te sens continuellement traqué. La résidence est notre plus grand souci. Après tout, c’est la guerre qui a ramené les Syriens ici. Vous avez connu ce genre d’épreuves vous aussi pendant la décennie noire, vous savez ce que c’est.

On est combien, 25 000 ? 30 000 ? C’est quand même relativement peu, on peut nous régulariser. Depuis l’instauration du visa en 2015, je peux vous assurer qu’aucun Syrien n’est entré en Algérie. Et parmi ceux qui étaient là, beaucoup sont retournés au pays, d’autres ont gagné l’Europe, l’Allemagne plus spécialement. Il me semble qu’il y a de la place pour ceux qui sont restés. Ils ne demandent qu’à se rendre utiles. Nous ne sommes pas des parasites, nous voulons que notre présence soit une plus-value pour l’Algérie.»

«One, two, three, viva l’Algérie !»

Amine, 22-23 ans, est originaire de Damas. Il est en Algérie depuis 2013. Il travaille comme coiffeur dans un salon tenu par des Syriens pas loin de Douéra. Le salon de coiffure est décoré avec beaucoup de goût. Amine n’a pas de carte de résident lui non plus alors que sa grand-mère est algérienne. «J’ai un papier du HCR, c’est juste pour pouvoir circuler», dit-il. «La résidence, c’est trop compliqué. La plupart des Syriens n’ont pas fait les démarches pour l’obtenir. Tu n’as quasiment aucune chance de l’avoir, surtout en ce moment», tranche Amine. A un moment donné, deux jeunes clients débarquent.

Look branché et barbichette à l’orientale. Ils sont également syriens. L’un d’eux se lance d’emblée dans un panégyrique à la gloire du peuple algérien et sa prodigalité proverbiale : «Tous les pays arabes sont en train de refouler les Syriens : la Jordanie, l’Arabie Saoudite et même la Turquie. Au Liban, on est abreuvés d’insultes alors que ce sont nos cousins à la base. L’Algérie est incontestablement le meilleur pays pour nous. C’est le pays qui nous a réservé le meilleur accueil», dit-il. Quid des papiers ? «Le visa est difficile. La résidence ?

Oublie ! Et sans les papiers, tu ne peux pas bouger, tu ne peux pas aller rendre visite à ta famille. Si tu sors, tu es sûr d’être refoulé à ton retour. Du coup, je me sens comme en prison. Depuis quatre ans, je n’ai pas vu ma famille», relate notre ami. Le gérant du salon de coiffure abonde dans le même sens : «On rencontre de la sympathie partout, que ce soit du côté du peuple ou même de la police. Personnellement, je circule sans passeport, en toute quiétude. Il ne me manque que les papiers. Des familles entières sont déchirées à cause de toutes ces restrictions.

Une femme d’ici n’a pas revu son mari depuis un bail. Il a dû partir voir sa famille en urgence et il n’a pas pu revenir faute de visa. Et elle ne peut pas le rejoindre, du coup, les deux sont restés bloqués.» Malgré le fait qu’il dispose d’une activité commerciale, le jeune patron attend désespérément sa résidence. «Moi, je suis arrivé en septembre 2014. Au début, j’étais réglo. J’avais un papier de trois mois que je renouvelais.

Après, ils ont durci les procédures et j’ai laissé tomber», avoue-t-il. «J’ai des amis syriens qui avaient leurs papiers en bonne et due forme, et dernièrement, quand ils sont allés renouveler leur carte de résidence, on la leur a retirée sous prétexte qu’ils avaient des problèmes avec le fisc.» Et de proclamer d’une voix émue : «Je vous dis la vérité : à présent, je me sens harrag. Je ne vois aucune issue à la crise syrienne. La Syrie s’est enlisée définitivement dans sa ‘‘ouchriya sawda’’ (décennie noire). Mon avenir est désormais ici. Je me sens complètement Algérien. One, Two, Three, Viva l’Algérie !»
«On est à la merci des loyers abusifs»

L’une des contraintes auxquelles sont confrontés les Syriens établis en Algérie est la cherté des loyers, notamment à Alger. «Je paie un loyer de 50 000 DA. C’est vraiment excessif.

Tu peux à peine te loger et te nourrir», se plaint un travailleur syrien, peintre en bâtiment de son état. Qui plus est, les locataires syriens doivent s’acquitter d’un an de loyer ferme comme il est de règle chez nous.

A cela s’ajoute la cupidité de certains bailleurs. «On est à la merci des loyers abusifs», dénonce Fadi, un artisan plâtrier. «On a parfois affaire à des profiteurs. Un bien qui est habituellement loué à 20 000 DA grimpe à 40 000 DA pour un réfugié syrien.

C’est injuste. La location à Alger est infernale. On ne demande pas l’aumône, mais au moins qu’on arrête de nous infliger des loyers rédhibitoires. Qu’on tienne compte de notre situation à titre humanitaire.»

Heureusement, il y a encore des bailleurs pas trop gourmands comme en témoigne ce gérant syrien d’un salon de coiffure à Baba Hassan qui a tenu à saluer la solidarité algérienne à travers cette anecdote : «Vous voyez la boutique en face ? Ce local est loué à 40 000 DA.

Moi, la surface de mon salon fait le double de cette boutique et le proprio me loue ce local à 35 000 DA eu égard à ma situation. C’est vous dire la gentillesse des gens ici. On se sent vraiment chez nous en Algérie !» M. B.

Mustapha Benfodil


Saïda Benhabilès. Présidente du Croissant-Rouge algérien

«Nous leur apportons toute l’assistance nécessaire»

Si l’écrasante majorité des ressortissants syriens vivant en Algérie comptent sur leurs propres ressources pour subvenir à leurs besoins, une partie de ceux qui ont fui les affres de la guerre qui dévaste le Levant, et qui sont dans la précarité la plus totale, peuvent compter sur l’aide précieuse du Croissant-Rouge algérien (CRA).

«Nous leur apportons toute l’assistance humanitaire nécessaire», nous a déclaré Saïda Benhabilès, présidente du CRA, jointe par téléphone. «Nous avons mis deux centres d’accueil à leur disposition. Il y a celui de Sidi Fredj qui compte 70 familles, et il y a un autre centre, situé à Heuraoua (daïra de Rouiba, ndlr) réservé aux jeunes célibataires. Dans les autres wilayas, nous essayons dans la mesure du possible de les aider en leur louant un logement ou une chambre d’hôtel», ajoute la présidente du CRA. «Nous attendons de réceptionner de nouveaux chalets financés par nos sponsors.» «Nous œuvrons pour améliorer leurs conditions d’accueil», insiste l’ancienne ministre de la Solidarité.

L’assistance du Croissant-Rouge algérien ne se limite pas uniquement à l’hébergement mais s’étend aussi à la restauration et à la scolarisation. «Nous leur prodiguons une prise en charge alimentaire totale. Nous leur assurons également les fournitures scolaires. Sur instruction des plus hautes autorités du pays, et afin de préserver l’avenir des jeunes réfugiés, leur scolarité est garantie par l’Etat.

Pour l’inscription scolaire, il suffit juste d’une déclaration sur l’honneur du chef de famille attestant du niveau scolaire de l’élève.» Mme Benhabilès nous a fait part également de son attachement à tisser des liens entre les personnes hébergées dans les centres du Croissant-Rouge : «Nous essayons de créer une ambiance familiale, nous participons à leurs fêtes religieuses, qu’elles soient musulmanes ou chrétiennes», témoigne-t-elle.

Saïda Benhabilès souligne que l’assistance prodiguée par ses services ne tient pas compte du statut de la personne qui vient frapper à la porte du Croissant-Rouge algérien même si, précise-t-elle, «nous respectons les lois du pays». «Moi, j’interviens sur le plan humanitaire, je ne regarde pas le statut de ces personnes», martèle l’ancienne ministre. «Nous le faisons sans distinction de religion, de couleur, de race ni de sexe.»

Evoquant le profil des bénéficiaires de l’assistance du CRA en provenance de Syrie, Mme Benhabilès affirme que parmi eux, «il y a des Syriens d’origine palestinienne. Parfois, l’ambassade de Palestine nous envoie des familles palestiniennes qui vivaient en Syrie. Il y a aussi des familles algériennes revenues de Syrie et qui sont en difficulté.» Pour accéder aux centres d’hébergement du CRA, Saïda Benhabilès explique : «Il suffit juste d’apporter une pièce d’identité avec le cachet d’entrée sur le territoire national.

On fait une photocopie du passeport et on examine la situation de l’intéressé. La priorité est accordée aux personnes en difficulté. On vérifie d’où elles viennent et on leur donne un chalet.» La présidente du CRA assure que les personnes hébergées au niveau de ces centres «peuvent rester autant de temps qu’elles veulent. Certains sont là depuis cinq ans, personne ne les a mis dehors. Il est de notre devoir de les aider.»

Malgré cette sollicitude, force est de constater que les Syriens venus trouver refuge en Algérie sont loin de se ruer vers les centres d’accueil mis à leur disposition. Saïda Benhabilès fera remarquer à ce propos : «Il faut dire que la plupart d’entre eux sont issus des classes moyennes.» «Ils ont réussi à s’intégrer au sein de la société algérienne», appuie-t-elle, en soulignant l’importance des liens historiques et culturels qui ont certainement favorisé, selon elle, cette intégration.

Mustapha Benfodil