Lutte contre l’immigration clandestine: Un millier d’hommes bientôt sur le terrain

Lutte contre l’immigration clandestine

Un millier d’hommes bientôt sur le terrain

Samia Lokmane, Liberté, 18 juin 2006

Des brigades verront le jour dans 11 wilayas frontalières à risque. Leur rôle est de démanteler les réseaux des “sans-papiers”. La révision de l’arsenal législatif visant le durcissement des sanctions à l’encontre des ressortissants étrangers en situation irrégulière est également envisagée.

Un projet de décret portant création d’un office national de lutte contre l’immigration clandestine est actuellement au niveau du ministère de l’intérieur. Ce texte élaboré il y a quelques mois par la direction de la police des frontières (PAF) a pour objectif crucial le démantèlement des réseaux d’immigrants. À ce jour, les missions des différents intervenants, dont la sûreté et la gendarmerie nationales, se limitent à l’interpellation des clandestins. En l’absence de stratégie nationale de lutte, les refoulements aux frontières étaient perçus comme l’unique voie de recours. Cependant, face au flux de plus en plus important des ressortissants étrangers, notamment d’Afrique subsaharienne, la mise en place d’un plan de prévention dans le cadre d’une politique centralisée est devenue impérative. L’office, qui devra voir le jour, à la suite de la mise en œuvre du décret, chapeautera 11 brigades régionales qui seront implantées dans chacune des wilayas frontalières à risque, à l’instar de Tlemcen (Maghnia), Tamanrasset, Ouargla… où l’arrivée et la concentration des clandestins sont accrues. Chacune des brigades aura à sa disposition 80 hommes. De son côté, l’office sera administré par une cinquantaine de fonctionnaires de la police des frontières. Les effectifs réquisitionnés pour traquer les filières d’immigrants clandestins avoisineront ainsi un millier. Le risque que l’Algérie se transforme d’escale ou de pays de transit en une destination définitive inquiète les pouvoirs publics. La situation économique étant propice, des candidats à l’immigration vers l’Europe n’hésitent pas à déposer leur baluchon chez nous où ils n’ont aucun mal à trouver du travail au noir sur des chantiers. Néanmoins, beaucoup préfèrent poursuivre l’aventure et font tout pour traverser la Méditerranée. Le prix du passage étant onéreux, des clandestins versent volontiers dans le trafic de stupéfiants, notamment les drogues dures comme la cocaïne ou même l’héroïne. “Quelqu’un qui est dans le besoin fait tout pour avoir de l’argent, du trafic d’argent, de la fraude documentaire…”, constate un responsable de la PAF. Mais d’ordinaire, le prix du voyage est négocié dans le pays natal où des réseaux de passeurs dirigent une véritable industrie. Le rôle de la police des frontières algérienne vise essentiellement à détruire leurs relais intra muros. “Arrivés chez nous, les clandestins sont pris en charge”, assure notre source. Les relais sont formés par les transporteurs, les logeurs, les employeurs… Au plan régional et international, l’office aura à coopérer avec les polices étrangères. Toutefois, l’aide consistera uniquement à l’échange d’informations. Contrairement à d’autres pays de la rive sud comme le Maroc, qui ont accepté de se faire aider dans l’endiguement du flux des clandestins par exemple à travers l’organisation de patrouilles maritimes mixtes, l’Algérie entend se débrouiller seule. À cet effet, outre la création d’un office, la lutte contre l’immigration clandestine passe par une plus grande vigilance au niveau législatif. D’où la révision des textes relatifs aux conditions d’entrée et de séjour des ressortissants étrangers. La plupart des lois n’ont pas été mises à jour depuis les années 60. Aujourd’hui, il est prévu d’en faire un seul texte, dont les sanctions, en cas de séjour irrégulier, seront sans indulgence. Compte tenu de sa nature, l’immigration clandestine, chez nous, est difficile à cerner. Le nombre d’interpellations est l’unique indice d’une tendance à la hausse, incommensurable.

Samia Lokmane