Londres veut signer un «mémorandum d’entente» avec Alger
Détenus algériens en Grande-Bretagne
Londres veut signer un «mémorandum d’entente» avec Alger
par Zouaoui Mouloud, Le Jeune Indépendant, 2 février 2005
L es autorités britanniques veulent signer avec l’Algérie un mémorandum d’entente qui garantirait aux Algériens, détenus en Grande-Bretagne dans le cadre des enquêtes sur le terrorisme et que Londres envisage d’expulser, qu’ils ne seraient pas torturés une fois entre les mains des Algériens.
Sept algériens croupissent depuis près de trois ans avec quatre autres ressortissants, des Egyptiens, des Tunisiens et des Jordaniens, dans les prisons de haute sécurité à Belmarsh (Londres), Woodhill, dans le Buckinghamshire (sud-est de l’Angleterre) et Whitemoor, dans le Cambridgeshire (est de l’Angleterre), suite aux vastes opérations d’arrestation dans les milieux des demandeurs d’asile entre novembre 2002 et avril 2003.
Ils ont été arrêtés à Londres, Manchester et Edinburgh, dans le cadre de la loi de 2001 relative à la sécurité et à la lutte contre la criminalité et le terrorisme, promulguée par le gouvernement de Tony Blair, qui autorise la police à placer en détention un ressortissant étranger soupçonné de terrorisme pour une durée indéterminée et sans rendre publiques les charges retenues contre lui.
Leur détention a été jugée illégale, le 16 décembre dernier, par la Chambre des lords (Law lords), la plus haute instance judiciaire du Royaume-Uni, enjoignant au gouvernement de les libérer ou d’apporter les preuves de leur culpabilité dans un délai de deux semaines, infligeant un sévère camouflet à la politique antiterroriste de Tony Blair.
Embarrassé par la décision, le ministre de l’Intérieur britannique a fait état de son intention d’élaborer des «mémorandums d’entente» avec l’Algérie, l’Egypte, la Tunisie et la Jordanie à travers lesquels ces quatre pays s’engageraient à ne pas «torturer ou appliquer la peine capitale» sur lesdits détenus lorsqu’ils seraient renvoyés dans leurs pays respectifs d’origine.
Des négociations ont été engagées entre le Royaume-Uni et ces pays. La ministre déléguée britannique au Foreign Office et vice-présidente de la Chambre des lords, Mme Elisabeth Simons, était venue récemment en Algérie et aurait évoqué cette affaire avec les responsables algériens.
Les quatre pays sont signataires de la convention internationale contre la torture et possèdent également des législations prohibant l’usage de la torture, bien que des exactions ne soient pas à écarter ainsi que des violations de leurs lois.
Ce qui rend caduc le recours à ce mémorandum, estiment les avocats de ces détenus. Le collectif accuse le gouvernement britannique de tenter, à travers ces mémorandums, de trouver une issue pour se débarrasser de cette affaire devenue encombrante et qui a suscité une large désapprobation au sein de la société civile britannique.
Récemment, l’ordre des avocats britanniques avait sévèrement critiqué la loi antiterroriste britannique en jugeant «totalement inacceptable l’emprisonnement de personnes de façon indéfinie, sans aucune inculpation et sans procès». Edward Nally, représentant des 90 000 avocats anglais et gallois, avait affirmé que «le droit doit prévaloir et le gouvernement ne peut ignorer plus longtemps la décision des Law Lords».
Deux des «avocats spéciaux» désignés par les autorités pour défendre les accusés ont récemment démissionné pour protester contre le refus du gouvernement britannique de tenir compte de l’avis des Law Lords. Z. M.