Vague d’arrestations en Grande-Bretagne

Vague d’arrestations en Grande-Bretagne

Les Algériens paient les frais

De Notre Correspondant A Londres: Reda Hassaïne, Le Quotidien d’Oran, 17 septembre 2005

Jeudi 6 h du matin. La police britannique fracasse les portes du domicile de sept individus à Londres et à Manchester et procède à leur arrestation sans qu’ils résistent. Ils sont tous Algériens.

C’est le ministre de l’Intérieur en personne qui a ordonné cette opération qui rentre dans le cadre de la lutte antiterroriste, qui préconise l’arrestation et la déportation de toute personne qui risque de poser un problème de sécurité nationale. Ces Algériens étaient connus des services de sécurité depuis plus de trente mois. Ils ont été déjà arrêtés et même présentés devant la justice pour tentative de commettre des attentats à la ricine, avant d’être acquittés.

En effet, toute cette histoire a commencé à partir d’Alger. Les services du renseignement du DRS ont arrêté un certain Mohamed Meguerba, qui est entré en Algérie le 16 décembre 2002 illégalement, sans passeport, par la frontière marocaine, pour rejoindre un groupe terroriste de la Daâwa Salafia. Durant son interrogatoire par les agents secrets, Meguerba a confessé qu’il venait de Londres et qu’il était membre d’un groupe qui allait commettre des attentats à l’arme chimique dans la capitale britannique. Il a même avoué qu’il a appris le maniement des armes et qu’il a rencontré Oussama Ben Laden lors de son séjour dans les camps d’entraînement d’Al-Qaïda en Afghanistan. Il a divulgué à ses interrogateurs le nom de ses complices à Londres ainsi que l’adresse qui leur sert de base. Un dossier de 27 pages a été alors rédigé par les agents du DRS qui l’ont transmis à leurs homologues britanniques pour les prévenir d’une possible attaque terroriste à l’arme chimique. Kamel Bourghass, qui était le complice de Meguerba, a pu échapper au raid de la police et est allé se réfugier au domicile d’un autre membre du groupe basé à Manchester, en l’occurrence Khaled Alouerfeli. Lorsque la police a obtenu l’adresse du domicile de ce dernier, elle a investi les lieux pour trouver Bourghass qui en avait fait sa cache. Paniquant, il prend un couteau et assassine le détective Stephen Oake avant d’être maîtrisé et arrêté par les autres détectives. Cette histoire a été utilisée par Tony Blair devant le parlement anglais et Colin Powell devant les Nations unies comme une des raisons du pourquoi ils doivent attaquer l’Irak.

Cela dit, lors de la perquisition opérée dans l’appartement où vivait Bourghass à Wood Green, dans le nord de Londres, les policiers ont trouvé, également, dans une enveloppe l’adresse de la mosquée du Londonistan où prêchait l’ex-leader spirituel du GIA, Abu Hamza Al Masri. Quelques jours après, ladite mosquée a fait l’objet d’un raid où des dizaines de faux passeports, des cartes de crédit ainsi que des tenues et masques anti-gaz ont été trouvés. Mais point de ricine. Ni au flat de Wood Green, ni à Manchester, ni à la mosquée de Finsbury Park. Les échantillons prélevés par la police scientifique qui les a remis au Laboratoire de la technologie de la défense nationale (DSTL), dépendant du ministère de la Défense, pour analyse, ont révélé qu’il n’y a aucune trace de ricine. Lors de la comparution des suspects de la ricine devant un jury, ils ont été tous acquittés, sauf Bourghass, bien sûr, qui a été condamné à la prison à vie pour meurtre. Ceci dit, les services de sécurité britannique pensent toujours qu’il y avait bien eu une préparation d’une attaque terroriste à la ricine de la part de ce groupe, même si aucune trace de cette substance n’a été trouvée. Les suspects ont fait l’objet d’une surveillance très rapprochée depuis leur libération de prison. Charles Clarke, le ministre de l’Intérieur, qui voulait commencer la guerre contre les terroristes au Royaume-Uni, au lendemain des attaques de Londres du 7/7, par l’expulsion des imams radicaux, entres autres Abu Qatada dont le traité d’extradition avec la Jordanie a été signé, a été convaincu par les services de sécurité que ce groupe des sept Algériens, qui n’ont pas été cités nommément, constitue une priorité pour la sécurité nationale du pays. Quant à Gareth Pierce, l’avocate de ce groupe d’Algériens, elle continue d’accuser l’Etat algérien d’utiliser la torture à grande échelle et par conséquent, elle compte utiliser ce subterfuge pour éviter à ses clients leur expulsion, et non pas leur extradition, vers l’Algérie. Ce sera, comme toujours, le contribuable anglais qui paiera la facture.