20.000 étrangers en situation irrégulière seront reconduits à la frontière en 2005

Polémique autour du système de quotas par nationalités

20.000 étrangers en situation irrégulière seront reconduits à la frontière en 2005

Le Quotidien d’Oran, 16 janvier 2005

La controverse sur la politique des quotas anime actuellement en France le débat sur la gestion du phénomène d’immigration.

Selon le ministère français de l’Intérieur, quelque 150.000 étrangers s’installent chaque année légalement en France contre un flux clandestin jugé difficile à quantifier. Ce ministère prévoit en 2005 de réaliser 20.000 reconduites aux frontières d’étrangers en situation irrégulière. Le président du parti UMP, M. Nicolas Sarkozy, estime opportun de «repenser (à) sans tabou et sans exclusive» la politique française de l’immigration. Il propose un système de quotas pour privilégier une immigration sélective plutôt qu’une «immigration subie». A cet égard, il plaide pour la création d’un ministère qui «soit véritablement en charge de la problématique de l’immigration et de l’intégration».

Le ministre français de l’Intérieur, M. Dominique de Villepin, note que «les politiques d’immigration ont montré leurs limites en raison de la dispersion des responsabilités» et souligne, sur ce dossier, la nécessité d’un «pilotage unique». Il récuse toutefois l’approche d’un «système de quotas par nationalités». Il propose une gestion à 3 axes du phénomène, à commencer par le développement «à l’échelle européenne d’une coopération avec les pays d’origine et les pays de transit». Il s’agira également de définir avec ces pays «les métiers ou les formations qui correspondent aux besoins de la France et aux leurs», selon les besoins cycliques de l’économie française, ajoute-t-il. Il précise que cela passe «des accords bilatéraux qui (lui) semblent plus conformes à la tradition républicaine que les quotas par nationalités». La troisième proposition du ministre de l’Intérieur consiste à «adapter la durée des titres de séjour aux besoins» de la France.

Le ministre français de l’Emploi, du Travail et de la Cohésion sociale, M. Jean-Louis Borloo, estime que le débat sur des «quotas d’immigration» est d’ordre «littéraire». Il préfère une gestion axée sur «l’opérationnel» et «l’égalité des chances». «Pour moi, il y a dans ce pays 4 millions de personnes de 44 nationalités différentes à faire travailler, qui doivent contribuer à la richesse du pays. J’ai du mal à m’inscrire autrement dans le débat», juge-t-il. M. Borloo, en charge notamment de l’intégration des immigrés, estime que «les talents pluriculturels sont disponibles. Mais des milliers de jeunes sont passés de la case «république» à la case «ghetto». La question est de les faire revenir à la case «république» sans passer par le communautarisme». Nombre de députés français, de droite comme de gauche, considèrent que l’idée de quotas doit «s’insérer» dans une réflexion «plus large» sur l’intégration ou la lutte contre l’immigration clandestine.

Sur ce point, en décembre dernier à Paris, la seconde réunion des présidents d’Assemblée populaire des pays membres du dialogue «5+5» s’est prononcée pour une approche plus globale, notamment politique, du phénomène d’immigration illégale. Les responsables parlementaires du dialogue «5+5» (Algérie, Tunisie, Maroc, Libye, Mauritanie, France, Espagne, Italie, Portugal et Malte) ont convenu qu’«il serait illusoire de vouloir arrêter le phénomène d’immigration par seulement des moyens techniques, notamment juridiques et policiers». Les parlementaires, dont le président du Conseil de la Nation, M. Abdelkader Bensalah, ont opté pour une approche qui permettrait de développer des foyers d’attractivité économique et sociale au profit des migrants potentiels, pour des raisons notamment sociales, et ainsi «assurer leur fixation dans leurs localités d’origine». Cela permettrait également d’altérer le phénomène de fuite des cerveaux de la rive sud vers le nord de la Méditerranée.

Au cours de cette réunion tenue dans l’hémicycle de l’Assemblée nationale française, le président de l’APN, M. Amar Saâdani, a rappelé que «le moteur des mouvements migratoires des populations c’est le fossé économique, scientifique et technologique qui se creuse entre les nations nanties et les pays en voie de développement». «Tant que ce fossé demeurera ou continuera de s’élargir, il est illusoire de vouloir tarir les flux migratoires, que ceux-ci soient légaux ou irréguliers», a-t-il souligné. De ce fait, il a estimé que «les réponses juridiques sont indissociables et indivisibles des réponses sociales et humaines».