Sous le coup d’une expulsion du Canada

Sous le coup d’une expulsion du Canada

L’Algérien Mohamed Harkat perd son procès en appel

par Mouloud Zouaoui, Le Jeune Indépendant, 3 janvier 2006

L’Algérien Mohamed Harkat, emprisonné depuis trois ans au Canada pour ses liens supposés avec des réseaux terroristes, a perdu son procès en appel contre la décision prise par les autorités canadiennes de l’expulser du pays. Arrêté à Ottawa, la capitale canadienne, en décembre 2003, par la police qui le soupçonnait d’être un agent d’une cellule terroriste dormante, Harkat, 34 ans, a été depuis placé en détention, sans avoir été jugé sous le motif qu’il représentait une menace pour la sécurité, rapporte la presse canadienne.

Un certificat de sécurité avait été alors signé par le ministre canadien de la Citoyenneté et de l’Immigration et le solliciteur général (procureur général) qui permet aux autorités de le maintenir en détention sans fournir les preuves de sa culpabilité et d’envisager aussi son expulsion du pays.

Vendredi dernier, la Cour fédérale avait rejeté l’appel présenté par ses avocats pour s’opposer à son renvoi du pays. La cour devait déterminer si le certificat de sécurité était admissible. Son avocat Matthew Webber a affirmé que sa détention ainsi que l’ordre de son expulsion ne reposent sur aucune base légale et rien n’a été apporté par l’accusation pour étayer son verdict.

En mars dernier, la justice avait estimé que le certificat de sécurité était justifié, ouvrant la voie à son expulsion vers l’Algérie. La juge Eleanor Dawson avait alors déclaré dans son jugement pris sur la base d’une «preuve secrète» reçue à l’insu de Harkat et de son avocat que le certificat de sécurité est raisonnable.

Les éléments qui justifient le recours à ce certificat n’ont jamais été fournis à Harkat ou à ses avocats. Sous le certificat de «sécurité» le détenu comme ses avocats ne sont pas informés des accusations et de toutes les preuves retenues contre le détenu.

La preuve peut être présentée à tout moment au juge en l’absence du détenu et de ses avocats. Les normes habituelles de procédure sont carrément abandonnées. Il n’existe aucun processus ouvert pour décider si une personne est coupable ou innocente et la décision du juge de la Cour fédérale porte uniquement sur la validité du certificat.

Clamant son innocence, Harkat aurait passé les trois années dans des conditions insoutenables dont une année dans une cellule d’isolation, ont affirmé ses avocats. Un psychiatre désigné par ses avocats avait certifié en octobre dernier que la détention pendant tout ce temps sans preuves connues a sévèrement affecté l’équilibre mental de Harkat, souffrant aujourd’hui de dépression.

Marié à une Canadienne, il avait obtenu le statut de réfugié en 1997 par un autre juge de la Cour fédérale. Son incarcération avait suscité une vague d’indignation dans les milieux des droits civiques canadiens. Son comité de soutien qui regroupe plusieurs défenseurs des droits civiques a qualifié le rejet de l’appel de la Cour fédéral d’«étape de plus d’un processus injuste».

Ses avocats envisagent de saisir la Cour suprême canadienne dans une ultime tentative de sauver leur client de l’expulsion. M. Z.