Nacer Mehal: «Le rapporteur de l’ONU est victime de l’intox»
El Mouhtarem “Algérie Politique” , 20 avril, 2011
Le ministre de la Communication, Nacer Mehal, a rejeté aujourd’hui mercredi les critiques du rapporteur spécial des Nations unies sur la promotion et la protection du droit à la liberté d’opinion et d’expression, Frank La Rue, à l’encontre des institutions de l’Etat qui ne respectent par la liberté d’expression et d’opinion en Algérie.
«Nous n’avons pas encore reçu les recommandations du Rapporteur de l’ONU; notre réponse sera connue une fois le rapport rendu public», a déclaré Nacer Mehal sur les ondes de la chaine 1 de la radio nationale. «Je ne suis pas d’accord avec le Rapporteur de l’ONU quand il évoque la question des visas et des accréditations pour les journalistes étrangers. Toutes les demandes de visa et d’accréditation ont été satisfaites», a affirmé le ministre. Selon lui, le Rapporteur de l’ONU “est victime de l’intox”.
L’invité de la radio a indiqué, par ailleurs, qu’aucune censure n’est pratiquée en Algérie, en réponse à un article de TSA sur l’interdiction de la revue «Arabies» en Algérie. «Je demande à TSA de présenter des preuves sur l’interdiction de la revue «Arabies», a ajouté le ministre.
Des journalistes touchent 6000 DA, d’autres font du commerce avec les chambres sécuritaires !
Interrogé sur les conditions sociales des journalistes, le ministre de la Communication s’est dit «choqué» en apprenant que des journalistes perçoivent un salaire ne dépassant pas 6000 DA. «C’est honteux que beaucoup de journalistes de la presse privée ne perçoivent même pas le SNMG. Lorsque j’ai demandé à ces journalistes pourquoi ils ne protestent pas; ils me disent qu’ils ont peur de perdre leur emploi», a déclaré le ministre. A cet effet, il a annoncé avoir demandé une grille de salaires pour la corporation.
Concernant le problème du logement, Nacer Mehal a indiqué qu’il allait rencontrer bientôt le ministre de l’Habitat afin de trouver des formules pour aider les journalistes à accéder au logement. Et de préciser: «Je ne fais aucune promesse aux journalistes, même si je ferai de mon mieux pour règler la crise du logement». Le ministre a par ailleurs appelé à régler la crise morale qui touche la corporation. ”Il est immoral que des journalistes font du commerce avec les chambres sécuritaires que l’Etat a mis à leur disposition, alors que d’autres dorment dans des hammams”, a dénoncé Nacer Mehal.
Liberté d’expression et d’opinion en Algérie
Les critiques du rapporteur spécial de l’ONU irritent les autorités
El Watan, 21 avril 2011
Les ministres de l’Intérieur et de la Communication se sont entendus visiblement pour ouvrir le feu, hier sur les ondes de la radio d’Etat, sur les premières recommandations du rapporteur spécial de l’ONU sur la promotion et la protection du droit à la liberté d’expression et d’opinion, Frank La Rue, présentées dimanche 17 avril, lors d’une conférence de presse à Alger.
«Des déclarations inopportunes», a dit Daho Ould Kablia. «Le rapporteur de l’ONU a été victime de l’intox», a enchaîné Nacer Mehal. Le ministre de la Communication n’a pas précisé «l’origine» ou «la nature» de ce qu’il a appelé «l’intox». «Nous n’avons pas encore reçu les recommandations du rapporteur», a-t-il ajouté. Pourtant, Frank La Rue a rendu publiques ses premières conclusions devant les journalistes et des représentants du ministère des Affaires étrangères.
La communication est-elle à ce point en panne au sein du gouvernement ? Nacer Mehal, qui «n’a pas reçu les recommandations», a, tout de même, pris soin de répondre à Frank La Rue sur les demandes de visas et les accréditations pour les journalistes étrangers. «Toutes les demandes de visas et d’accréditations ont été satisfaites», a dit Nacer Mehal.
Des responsables de chaînes étrangères telles que BBC Arabic ou ABC peuvent dire au ministre de vérifier avec ses services si ce qu’il affirme est de la pure vérité. Frank La Rue a annoncé que le rapport final sera rendu public en 2012 à Genève. Il a, dans son premier rapport, critiqué les conditions restrictives imposées par les autorités aux manifestations publiques, à l’agrément des partis, des syndicats et des associations ainsi qu’à l’accès aux médias dit publics. Des médias qui ont passé sous silence ces critiques. N’empêche, Daho Ould Kablia ne résiste pas à la tentation de faire dans l’humour. «La Constitution algérienne accorde le maximum de libertés qui peuvent ne pas exister dans d’autres pays.
Des pays qui nous donnent la leçon aujourd’hui. Il s’agit de la liberté de conscience, la liberté syndicale, la liberté d’expression, la liberté de réunion, la liberté d’association. Il y avait eu peut-être une petite restriction avec l’application de l’état d’urgence. Maintenant que cet état d’urgence a été levé, toutes ces libertés vont être restaurées et l’accès aux médias également autorisé et encouragé», a-t-il dit sur les ondes de la Chaîne III. Les syndicats, partis, associations attendent que ces «libertés» soient «restaurées», après avoir été mises entre parenthèses (l’aveu de Daho Ould Kablia est de taille), pour marcher librement et pacifiquement dans les rues des villes algériennes, s’exprimer à la radio et à la télévision que financent le contribuable…
Fayçal Métaoui