Condamnation de Mohamed Smaïn à Relizane

Ligue Algérienne pour la Défense des Droits de l’Homme

Condamnation de Mohamed Smaïn à Relizane 

appel à solidarité

Mr Mohamed Smaïn est membre de la direction de la Ligue Algérienne pour la Défense des Droits de l’Homme et, chargé du dossier des disparitions forcées en Algérie. En 2000, ses recherches l’amènent à découvrir des charniers contenant des ossements qui s’avèrent être ceux de personnes enlevées par le groupe de miliciens commandés par le célèbre fergane qui sévissait dans la région. Cette découverte qui a suscité un grand émoi au sein de l’opinion nationale déclenche la panique dans le camp des milices à travers toute l’Algérie.
Une plainte fut engagée contre Mr Smaïn avec constitution de partie civile par fergane et ses partisans pour diffamation, injures, dénonciation calomnieuse et dénonciation de crimes imaginaires devant le tribunal de Relizane. Après un procès placé sous très haute surveillance, Mr Smaïn fut condamné à deux mois de prison ferme avec 10 000 DA de dommages et intérêts et, 5000 DA d’amende le 29 décembre 2001. Il interjette appel ; la cour de Relizane, au terme d’une audience placée sous forte pression (interdiction d’accès au public, présence dissuasive et menaçante des forces de sécurité) aggrava la condamnation de Mr Smaïn à « 1 an » de prison ferme et 30 000 DA de dommages et intérêts pour chaque plaignant et 5000DA d’amende Il y eut pourvoi en cassation.
L’arrêt de la cour de Relizane fut annulé pour violation de la loi et contradiction de motifs. C’est donc sur arrêt de renvoi que Mr Smaïn a comparu devant la cour de Relizane autrement composée selon la décision de  la cour suprême le 20 octobre 2007. L’audience s’est déroulée sous une atmosphère moins tendue. L’accès à la salle était libre ; il y avait moins de pression des services de sécurité. La défense était assurée par Me Zehouane (président de la LADDH), Me Ahmim membre du comité directeur de la ligue et Me Eric Plouvier du barreau de Paris délégué par la Fédération Internationale des Droits de l’homme (FIDH) et l’Observatoire Mondial Contre la Torture (OMCT).
Les débats ont été libres dans l’ensemble. Le groupe de miliciens plaignants avec à leur tête Fergane ont voulu se présenter en victimes, harcelées et déshonorées par de « fausses accusations » de Mr Smaïn ; mais très vite ils furent confondus par le prévenu et la  défense au point où leur représentant protesta contre le fait à ses yeux que « l’audience fut transformée en tribune des droits de l’homme ». L’implication des plaignants dans les enlèvements et les disparitions fut démontrée, des photos de charnier produites à la barre ; la présentation de témoins fut évitée par la présidence de la cour qui affirma se contenter des témoignages écrits consignés dans le dossier.
En péroraison de ses interventions, la défense mis en garde la cour contre la dérive qui consisterait à accueillir des plaintes d’auteurs de crimes contre l’humanité pour condamner des défenseurs de droits de l’homme afin de  les empêcher de poursuivre leur mission. « Ce serait une tache noire dans l’histoire de la justice algérienne ».
Le verdict devait être rendu dans la journée ; il fut différé d’une semaine. Le 27 octobre 07, alors que tous les autres délibérés furent prononcés à l’ouverture de l’audience, le cas de Me Smaïn  fut repoussé tard dans la nuit !
Pourquoi tant de crainte ou de mauvaise  conscience. Finalement, la cour dans toutes ses hésitations, annula l’arrêt qui aggrava la condamnation de Mr Smaïn à 1 ans de prison ferme et revint à confirmer le premier jugement du tribunal de Relizane du 29 décembre 2001 qui le condamna à  deux mois de prison ferme, 10 000DA de dommage et intérêts au profit de chacun des plaignants  et à 5000 DA d’amende.
En apparence, ce nouvel arrêt constitue un allégement de la sanction prononcée contre Mr Smaïn.
En réalité, il confirme le scandale de l’impunité qui couvre les auteurs de crimes contre l’humanité et pire encore celui de la mise en accusation et de la condamnation des défenseurs des doits de l’homme. La LADDH n’accepte pas ces dénis de justice. Elle ne s’inclinera pas devant les menaces exercées aux fins de dissuasions. Elle réaffirme que cette condamnation est une tache noire pour une justice encore soumise ; un pourvoi en cassation est déjà exercé contre cet arrêt. Le combat continue. Le présent appel à solidarité s’adresse à toutes les consciences que la situation des droits de l’homme en Algérie ne laisse pas indifférentes. Merci d’exprimer votre soutien par tous les moyens.

Fait à Alger le 28 octobre 2007
Me Hocine Zehouane
Président de la LADDH