Que cache la création par le président Bouteflika du Conseil des droits de l’Homme ?

Que cache la création par le président Bouteflika du Conseil des droits de l’Homme ?

Achira Mammeri, TSA, 1 juin 2016

Le Conseil des ministres a approuvé mardi 31 mai un avant-projet de loi fixant la composition et les modalités de désignation des membres du Conseil national des droits de l’Homme (CDH). Dans cet entretien, Maître Farouk Ksentini évoque l’avenir de la Commission des droits de l’Homme qu’il dirige.

Quel est l’avenir de la Commission nationale consultative de protection et promotion des droits de l’Homme (CNCPPDH) que vous présidez ?

La Commission va disparaître. Elle sera dissoute et remplacée par le Conseil des droits de l’Homme.

Quels sont les points communs et les différences entre ces deux instances ?

Le législateur a pris notre commission la (CNCPPDH) telle qu’elle existe et il l’a constitutionnalisée pour en faire donc une institution consultative inscrite dans la constitution, alors qu’avant elle relevait du décret présidentiel. C’est devenu une institution pérenne. Finalement elle devient une des institutions officielles de ce pays. Le reste, tels que la désignation des membres, les prérogatives de ce Conseil, reste les mêmes. C’est l’appellation qui diffère.

Pourquoi alors créer une nouvelle commission ?

Tout a été fait à notre demande. C’est nous qui avons demandé à être constitutionnalisés, depuis des années d’ailleurs. À la création de la CNCPPDH, des voix se sont élevées pour dire qu’elle est au service du président. Bien que cela nous honore d’être au service du président, on a demandé de lever cette restriction pour que tout le monde sache que nous sommes au service de la Nation. Et non pas au service d’une autre institution qui est le président que nous respectons que nous avions servi avec honneur et beaucoup de volonté. Mais pour qu’elle ne soit pas accusée de quelque partialité que ce soit, pour qu’on ne dise pas que c’est une institution gouvernementale et afin d’assurer notre indépendance, il fallait absolument que cette institution soit constitutionnalisée. Nous avions demandé cela et nous avions été suivis. Le Conseil des droits de l’Homme appartient à l’Algérie bien que, appartenir ou relever de la présidence de la République fût quelque chose qui nous honorait beaucoup. Le CDH va remplacer la CNPPDH avantageusement parce que son poids sera plus important que la commission. C’est là un progrès en matière des droits de l’Homme. L’institution qui défend les droits de l’Homme est désormais constitutionnalisée. On ne peut pas aller plus haut que la Constitution.

Il s’agit donc pour vous d’une avancée en matière des droits de l’Homme ?

Indéniablement. Il faut rendre à César ce qui appartient à César. C’est un coup de pouce extrêmement important qui vient de nous être donné. Mais les droits de l’Homme restent une affaire de 40 millions d’Algériens.

Êtes-vous pressenti pour présider le Conseil national des droits de l’Homme ?

Cela relève de la volonté et du choix du président de la République. Je n’ai aucune information et croyez-moi je ne cherche pas à en avoir. Le président sait ce qu’il fait. La nouvelle institution me tient à cœur bien sûr, mais elle ne m’appartient pas. Je suis un démocrate. Le jour où on m’a installé à la tête de la CNCPPDH, j’ai pensé au jour où je dois la quitter.