Mohamed Smain: Condamnation à une peine de prison et risque d’arrestation imminente

APPEL URGENT – L’OBSERVATOIRE

Nouvelles informations
DZA 002 / 1211 / OBS 142.1

Condamnation à une peine de prison /
Risque d’arrestation imminente

Algérie
29 février 2012

L’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme, programme conjoint de la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH) et de l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT), a reçu de nouvelles informations et vous prie d’intervenir de toute urgence sur la situation suivante en Algérie.

Nouvelles informations :

L’Observatoire a été informé de sources fiables de l’ordre émis par le ministère public algérien de mettre à exécution une décision de justice rendue le 27 octobre 2011 par la Cour suprême à l’encontre de M. Mohamed Smain, défenseur des droits de l’Homme et ancien res ponsable de la Ligue algérienne pour la défense des droits de l’Homme (LADDH) à Relizane, une ville située à l’ouest de l’Algérie, près d’Oran.

Selon les informations reçues, après que le procureur de la Cour d’appel de Relizane a ordonné aux forces de police de procéder à son arrestation, la police s’est rendue à deux reprises au domicile de M. Mohammed Smain, les 22 et 26 février 2012, pour lui demander de se présenter au commissariat pour « une affaire le concernant ».

Ces faits interviennent alors qu’une demande de surseoir à exécuter la peine de prison, faisant suite à une demande de grâce introduite par M. Smaïn le 15 décembre 2011, est en cours d’examen par le procureur général de la wilaya de Relizane. C’est pourquoi M. Smain n’a pas donné suite aux convocations de la police, dans l’attente de la décision du procureur général.

Le 23 février 2012, l’avocat de M. Smain a reçu le tampon du ministère public confirmant la réception du dossier de demande de grâce. Le 27 février, le procureur général a refusé de recevoir l’avocat de M. Smain qui avait déposé cette demande de surseoir à exécuter la peine de prison. Une décision doit être rendue par le procureur dans les plus brefs délais en raison du caractère exécutoire de la condamnation. L’absence de réponse dans les 48 heures du dépôt de la demande de surseoir vaut rejet.

L’Observatoire dénonce vivement le harcèlement judiciaire à l’encontre de M. Mohamed Smain, en ce qu’il ne semble viser qu’à sanctionner ses activités de défense des droits de l’Homme, et demande aux autorités algériennes de mettre un terme à toute forme de harcèlement à son encontre.

Rappel des faits :

Le 3 février 2001, M. Mohammed Smain, alors responsable de la LADDH à Relizane, avait alerté la presse algérienne de la découverte et l’exhumation de charniers par les services de gendarmerie et la milice de M. Hadj Fergane, ancien maire de Relizane. Suite à ces révélations, M. Fergane avait porté plainte contre M. Smain, conjointement avec neuf ex-membres de sa milice dite “de légitime défense ”.

Le 5 janvier 2002, M. Smain avait été condamné par le Tribunal de Relizane à deux mois de prison ferme, 5 000 dinars d’amende et 10 000 dinars de dommages et intérêts à verser à chacun des dix plaignants pour “diffamation” , “outrage” et “ dénonciation de crimes imaginaires ”. M. Smain avait fait appel de cette condamnation et la Cour de Relizane l’avait condamné le 24 février 2002 à une année de prison ferme, soit une peine six fois plus longue que celle prononcée en première instance, et à 210 000 dinars d’amende. M. Smain s’était pourvu en cassation contre cette décision et la Cour suprême avait renvoyé l’affaire devant la Cour de Relizane au motif que les règles du procès équitable n’avaient pas été respectées.

Le 26 octobre 2007, la Cour d’appel de Relizane avait relaxé M. Smain des faits de diffamation et d’outrage mais l’avait condamné à deux mois de prison ferme, 50 000 dinars d’amende et 10 000 dinars de dommages et intérêts à verser à chacun des dix plaignants pour “dénonciation de crimes imaginaires ” et « dénonciation calomnieuse », à la suite d’une audience à laquelle l’Observatoire avait mandaté un avocat français qui a plaidé aux côtés des avocats algériens de M. Smain.

Le 29 octobre 2007, M. Smain a fait appel de cette décision auprès de la Cour suprême.

Le 14 décembre 2011, M. Mohamed Smain a été notifié par les services de police d’un jugement rendu le 27 octobre 2011 par la Cour suprême d’Alger, confirmant le jugement de la Cour d’appel de Relizane qui avait été rendu à son encontre le 26 octobre 2007, le condamnant pour “dénonciation calomnieuse » et « dénonciation de crimes imaginaires” à deux mois de prison ferme, 50 000 dinars algériens d’amende (environ 510 €) et 10 000 dinars algériens (environ 101 €) de dédommagement en faveur de chacun des dix plaignants.

Actions requises:

L’ Observatoire vous prie de bien vouloir écrire aux autorités algériennes en leur demandant de :

i. Garantir en toutes circonstances l’intégrité physique et psychologique de M. Mohamed Smain, ainsi que de l’ensemble des défenseurs des droits de l’Homme algériens;

ii. Mettre un terme à toute forme de harcèlement, y compris judiciaire, à l’encontre de M. Mohamed Smain, notamment en ce que sa condamnation ne semble viser qu’à sanctionner ses activités de défense des droits de l’Homme, ainsi que de tous les défenseurs des droits de l’Homme algériens, afin qu’ils puissent mener leurs activités de défense des droits de l’Homme librement et sans entrave;

iii. Se conformer aux dispositions de la Déclaration sur les défenseurs des droits de l’Homme, adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies le 9 décembre 1998, et plus particulièrement à:
– son article 1 qui dispose que «chacun a le droit, individuellement ou en association avec d’autres, de promouvoir la protection et la réalisation des droits de l’Homme et des libertés fondamentales aux niveaux national et international»,

– et son article 12.2, qui dispose que «l’État prend toutes les mesures nécessaires pour assurer que les autorités compétentes protègent toute personne, individuellement ou en association avec d’autres, de toute violence, menace, représailles, discrimination de facto ou de jure, pression ou autre action arbitraire dans le cadre de l’exercice légitime des droits visés dans la présente Déclaration»;

iv. Plus généralement, se conformer aux dispositions de la Déclaration universelle des droits de l’Homme et instruments régionaux et internationaux relatifs aux droits de l’Homme ratifiés par l’Algérie.

Adresses:

· M. Abdelaziz Bouteflika, Président de la République, Présidence, El-Mouradia, Alger, Algérie, Tél : 00 213 21 69 15 15; Fax : +213 21 69 15 95. E-mail : [email protected]
· M. Farouk Ksentini, Président de la Commission nationale consultative des droits de l’Homme, Avenue Franklin Roosevelt, Allée du Peuple, 16000 Alger, Tél : +00 213 (0) 21230311 / 230214
· M. Abdelaziz Ziari, Président de l’Assemblée populaire nationale, 18 boulevard Zirouf Youcef, 16000 Alger, Tél : 00 213 021 73 86 00 / 10
· M. Daho Ould Kablia, Ministre de l’Intérieur, Ministère de l’Intérieur et des Collectivités Locales, de l’Environnement et de la Réforme Administrative, Rue du Docteur Saâdane, Alger ; Tél : 00 213 (0) 21 73 23 40 / 00 213 (0) 21 73 23 48 / 00 213 (0) 21 73 12 00 00 213 ; Fax : (00 213 0) 21 92 12 43
· M. Tayeb Belaiz, Ministre de la Justice, Ministère de la Justice, 8 Place de Bir-Hakem. El-Biar, Alger, Algérie. Tél : 00 213 (0) 21 92 16 08 ; Fax : 00 213 (0) 21 74 76 64 / + 213 21 92 17 01 / 29 56
· Procureur général de la Wilaya de Relizane, Fax : + 213 469 149 993
· S.E. Idriss Jazaïry, Ambassadeur, Représentant permanent de l’Algérie auprès de l’ONU à Genève, Route de Lausanne 308, CH-1293, Bellevue, Suisse, E-mail : [email protected], Fax : +4122 / 774.30.49
· Ambassadeur de l’Algérie auprès du Royaume de Belgique, Avenue Molière 207, 1050 Bruxelles, Fax : 0032 343 51 68, E-mail : [email protected]

Prière d’écrire également aux représentations diplomatiques d’Algérie dans vos pays respectifs.

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Paris-Genève, le 29 février 2012

Merci de bien vouloir informer l’Observatoire de toutes actions entreprises en indiquant le code de cet appel.

L’ Observatoire, programme de la FIDH et de l’OMCT, a vocation à protéger les défenseurs des droits de l’Homme victimes de violations et à leur apporter une aide aussi concrète que possible.

Pour contacter l’Observatoire, appeler La Ligne d’Urgence :
· E-mail : [email protected]
· Tel et fax FIDH : 33 1 43 55 25 18 / 33 1 43 55 18 80
· Tel et fax OMCT : + 41 22 809 49 39 / 41 22 809 49 29