Mahmoud Grida et Mohamed Boughedda, disparus depuis les années noires, leurs familles sans nouvelles à ce jour
Alkarama, 19 août 2015
Le 5 août 2015, Alkarama a saisi le Groupe de travail des Nations Unies sur les disparitions forcées ou involontaires (GTDFI) et le Rapporteur spécial sur le droit à la vérité et à la justice transitionnelle (SRTruth) des cas de Mahmoud Grida et Mohamed Boughedda, tous deux disparus depuis leurs arrestations respectives dans la commune de Jijel dans le nord-est algérien le 21 août 1994 et le 13 avril 1997.
Mohamed Boughedda a été arrêté par des agents des services de renseignements le 21 août 1994 à 11h sur le lieu de son travail, à la préfecture de Jijel, située à 100m seulement du siège du secteur militaire opérationnel de Jijel. Les recherches incessantes de sa famille – notamment auprès des autorités judiciaires, des services de renseignement et auprès du secteur militaire de Jijel – n’ont abouti à rien.
Quant à Mahmoud Grida, accusé d’être membre de l’Armée Islamique du Salut (AIS), il a été arrêté le 13 avril 1997 à 9h du matin par des membres d’une milice pro-gouvernementale – le Groupe de Légitime Défense (GLD)- sous le commandement de Bousbia Salah – dans la région montagneuse de Mechta Larebaa à Oudjana. Il a ensuite été emmené au siège du secteur militaire opérationnel de Jijel où il a été détenu au secret pendant deux ans subissant de graves tortures, d’après des témoins, avant de disparaître en mars 1999.
Selon la gendarmerie nationale, qui a délivré à ses proches, le 10 décembre 2006, un constat de décès sans leur remettre son corps, Mahmoud serait mort « dans les rangs des groupes terroristes ».
Au vu des faits, Alkarama a exhorté le Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires (GTDFI) à demander aux autorités algériennes de prendre toutes mesures nécessaires pour faire la lumière sur les sorts respectifs de Mohamed Boughedda et Mahmoud Grida et de procéder à leur libération immédiate, s’ils se trouvaient encore en vie, ou d’indemniser leurs ayants-droits et de remettre leurs corps à leurs proches dans le cas contraire.
Il est important de rappeler que ces deux cas font suite à plusieurs centaines de cas de disparitions forcées, recensés dans la région de Jijel entre 1993 et 1997 et soumis par Alkarama au Groupe de Travail onusien au cours des cinq dernières années. Durant cette période, de nombreux enlèvements de civils ont été perpétrés par les forces armées algériennes, en particulier des partisans du Front islamique du Salut (FIS), par la suite exécutés sommairement.
« Soumettre aujourd’hui au Groupe de travail onusien les cas de MM. Bougheda et Grida, enlevés par les forces de sécurité algériennes respectivement en 1994 et 1997, représente pour nous un message très fort de notre attachement sacré à notre droit à la vérité et à la justice », explique Moussa Bourefis, Président de l’Association Mish’al des enfants de disparus forcés en Algérie. « C’est une occasion pour rappeler que les violations massives des droits de l’homme par les forces de sécurité algériennes après le coup d’État du 11 Janvier 1992 ne sont en aucun cas des « débordements isolés ». Il s’agit bien de pratiques systématisées avec des ordres émanant de hauts postes de l’État, ce qui leur donne le caractère de crimes contre l’humanité, crimes reconnus comme étant imprescriptibles ».
Alkarama a également demandé au GTDFI de rappeler aux autorités algériennes leurs obligations en vertu des instruments internationaux des droits de l’homme – en particulier le Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques (PIDCP), ratifié par l’Algérie en septembre 1989 – en mettant fin à l’impunité des auteurs des crimes commis durant les années 1990 et faisant la lumière sur le sort de toutes les victimes de disparition.
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