Vers un commandement de l’armée américaine pour l’Afrique
Le pentagone n’attend que le feu vert de Bush
Vers un commandement de l’armée américaine pour l’Afrique
Mustapha Benfodil, Liberté, 3 septembre 2006
Le Pentagone serait sur le point d’installer un commandement spécial de l’armée américaine pour le continent africain. C’est ce qu’a indiqué l’agence Reuters dans une dépêche datée du 31 août citant des sources proches du département américain de la Défense. “L’idée de créer un commandement africain est en train d’être examinée par le secrétaire” (d’État à la Défense Donald Rumsfeld, ndlr), a déclaré, en effet, le responsable du service de presse du Pentagone, Eric Ruff, à Reuters. Ce dernier précise toutefois qu’aucune décision concrète n’a encore été prise. Les responsables militaires américains attendent le feu vert du président George Bush.
Rappelons que dans l’architecture de l’armée américaine et son arborescence figurent des commandements régionaux répartis sur des zones géostratégiques et placés sous la direction de “généraux quatre étoiles”. Ainsi, le Commandement central, qui supervise actuellement les opérations militaires en Irak et en Afghanistan, est chargé du Proche-Orient, de l’Asie centrale et de la Corne de l’Afrique. Mais la zone Afrique proprement dite est partagée pour le moment entre les commandements Europe, Centre et Pacifique.
Dans une interview publiée sur le site du ministère américain de la Défense, le général du corps des marines, James Jones, responsable des opérations militaires sur le continent africain, devait prévenir : “Si les États-Unis se désintéressaient de l’Afrique, ce serait à leurs risques et périls.” (voir : usinfo.state.gov). James Jones a précisé que le commandement des forces américaines en Europe consacrait près de 70% de son temps à des questions africaines, une manière de suggérer qu’un commandement africain serait indispensable. Pour lui, les États-Unis et leurs alliés doivent apporter une aide concrète pour un changement économique en Afrique, faute de quoi “ces gens pourraient devenir la proie des recruteurs islamistes adeptes du djihad”.
Il faudrait souligner que depuis les attentats du 11 septembre, le souci stratégique n°1 des États-Unis demeure la sécurité. Bush rappelait encore récemment que “la guerre contre la terreur est la lutte idéologique la plus décisive du XXIe siècle”. La doctrine américaine sur ce chapitre étant la guerre préventive contre les réseaux terroristes où qu’ils soient dans le monde, le continent africain est devenu un centre de préoccupation pour les “think tank” de l’armée américaine en ce qu’il représente un terreau idéal pour les extrémistes de tout poil, notamment au Sahel. C’est ce que confirme le lieutenant des marines, Joe Carpenter, porte-parole du Pentagone lorsqu’il déclare : “Dans le monde post-11-septembre, nous disposons d’une meilleure connaissance des (menaces provenant de) territoires en proie à une vacance de pouvoir.” La Corne de l’Afrique inquiète tout particulièrement les responsables américains de la lutte antiterroriste. Selon le département d’État, la Somalie et la région du Sahel, notamment le Mali et la Mauritanie, sont des havres potentiels pour les activistes. L’organisation Al-Qaïda est soupçonnée d’être présente dans l’est et le nord de l’Afrique. Le département d’État estime qu’un certain nombre de responsables d’Al-Qaïda en Afrique orientale, et spécialement en Somalie, continuent à représenter la plus grave menace pour les intérêts américains dans la région.
À signaler que les États-Unis disposent déjà d’une unité dans la Corne de l’Afrique, basée à Djibouti, précisément à Camp-Lemonier, et forte d’environ 1 800 hommes. Elle a une mission essentiellement préventive consistant à détecter des groupes terroristes en liaison avec ceux du Moyen-Orient.
Radio France Internationale, d’après un article publié sur son site Internet, croit savoir que “la création du commandement militaire américain en Afrique peut aussi se justifier par l’augmentation des importations pétrolières. L’Afrique occidentale fournit actuellement près de 16% du volume des hydrocarbures consommés aux États-Unis. Ces importations devront atteindre les 25% en 2015. Washington a aussi besoin de garantir la sécurité de ses ressources pétrolières, à un moment où la Chine s’intéresse de plus en plus aux matières premières africaines”.
M. B.