De la violence et du venin

DE LA VIOLENCE ET DU VENIN

par M. Saadoune, Le Quotidien d’Oran, 9 novembre 2010

Les autorités marocaines ont brutalement pris d’assaut le campement de contestataires sahraouis dressé près de Laayoune, faisant, selon un premier bilan, des centaines de blessés. Cette attaque violente, survenant le jour où les discussions avec le Polisario devaient être entamées à Greentree, dans la banlieue de New York, intervient après un discours vindicatif du roi du Maroc.

Le discours royal était en effet le signal d’un comportement très agressif contre des Sahraouis censés baigner dans le bonheur du « rattachement à la mère patrie».

Le combat pacifique mené par les campeurs sahraouis était manifestement trop insupportable pour le monarque marocain. Tous les efforts de marketing politique et diplomatique menés avec l’aide des amis pour convaincre l’opinion internationale que le problème «n’est qu’à Tindouf» étaient en effet ruinés par ce combat pacifique qui rassemblait des milliers de Sahraouis à Laayoune.

Le Polisario n’a pas tort de mettre en cause la Minurso (Mission des Nations unies pour le référendum au Sahara Occidental) qui, à défaut de s’acquitter de sa mission originelle, est devenue un instrument pour «geler» le conflit.

A l’évidence, sa présence ne sert pas à geler la répression. Le Polisario le constate en s’indignant du fait que cette action condamnable se «passe au vu et au su de la Minurso, sans que celle-ci se prononce ou, au moins, informe l’opinion internationale». Le discrédit de l’Organisation des Nations unies n’est plus un simple «risque», il est désormais un fait continu.

Le Maroc, sûr de ses soutiens, a choisi délibérément le jour d’une reprise des discussions laborieusement négociées par Christopher Ross, l’émissaire spécial du secrétaire général de l’Onu pour le Sahara Occidental. Le message est limpide. Au regard du droit international, la population sahraouie, qui n’a pas encore pu exercer son droit reconnu à l’autodétermination, est sous la protection de l’Onu, qui ne peut faire semblant de regarder ou de considérer ce qui s’y passe comme une «affaire intérieure» marocaine.

Les autorités marocaines essayent de mobiliser les médias «amis» pour donner une version fantaisiste de ce qui s’est passé au campement de Gdim Izik, où des «centaines de blessés» ont été enregistrées, selon le Polisario.

Le site de la chaîne saoudienne Al-Arabiya s’est livré, avec une rapidité remarquable, à une grotesque manipulation en présentant l’attaque des forces de sécurité marocaines comme ayant pour but de «libérer» des Marocains censés avoir été retenus en otages par les Sahraouis. La rapidité avec laquelle la chaîne Al-Arabiya s’est faite le relais de cette version n’est pas une surprise. Venant d’une chaîne qui distille depuis quelques années le venin de la division entre sunnites et chiites, on peut s’attendre à tout. Mais ni Al-Arabiya ni la propagande du Makhzen ne pourront cacher que les Sahraouis se refusent à la soumission.