Négociations entre le Maroc et le Polisario: Troisième round

Troisième round

par M. Saadoune, Le Quotidien d’Oran, 19 septembre 2007

Un troisième round des négociations entre le Maroc et le Polisario est annoncé pour avant la fin de l’année. Même si dans des discussions de ce genre, les avancées sont laborieuses et tenues secrètes, il existe suffisamment d’indices pour dire que les choses n’évoluent pas vraiment. Sauf à faire, comme un confrère marocain, et voir dans le fait que la rencontre puisse avoir lieu en « novembre et pas en décembre » une volonté « d’accélération » de l’ONU. Pour une institution qui se démène depuis plus de trente ans sur ce dossier, ce serait en effet « gigantesque » comme accélération !

Qu’il se tienne en novembre ou en décembre, on sait que les données de départ entre les deux parties au conflit ne permettent guère une solution de compromis. Il n’existe pas de marge possible entre un référendum d’autodétermination classique, à questions ouvertes incluant l’option de l’indépendance, et un référendum « spécifique » qui enlève aux Sahraouis la possibilité de se prononcer sur cette option. L’ONU aura beau chercher parmi les plus brillants de ses juristes, à moins de forcer la loi, cela est impossible. Les Sahraouis pourraient éventuellement choisir l’autonomie, mais selon le droit international produit dans le sillage du mouvement de décolonisation, cela n’a de sens que s’ils ont la possibilité effective de se prononcer sur l’indépendance.

Du coup, sauf à voir dans les rencontres entre les deux parties un progrès en soi, on reste sceptique et on a de la peine à imaginer autre chose qu’un dialogue de sourds. On ne peut se leurrer sur la fonction assignée à ces négociations par les puissances occidentales qui soutiennent le projet marocain d’autonomie. Le but, lisible à souhait, est d’essayer de faire sortir la démarche onusienne de l’option du référendum d’autodétermination. Il s’agit de mettre sur le marché des solutions un projet marocain, antinomique avec le libre choix des Sahraouis, décrétant de manière préalable que l’indépendance est interdite. Dans le meilleur des cas, il s’agit de le « vendre » comme étant une mise en oeuvre du droit à l’autodétermination afin de lui assurer une couverture onusienne. Voilà qui est clair. Et, à moins d’un improbable changement brusque de la part du Polisario, cela paraît inacceptable pour les Sahraouis. A quoi servent alors ces « rounds » de négociations où chaque partie exprime ses positions sans être entendue par l’autre ? Donner l’impression que l’on fait quelque chose alors qu’on sait pertinemment qu’on n’avance pas ? En réalité, pour les puissances occidentales favorables au Maroc, les « négociations » qui se déroulent ne sont qu’une partie du jeu de pression diplomatique qu’elles exercent. Avec l’arrière-pensée évidente de faire du projet marocain la « seule » solution possible.

Leur grand problème est qu’au Conseil de sécurité, tous n’ont pas cette légèreté occidentale sur la question de l’autodétermination des peuples. Paris, Washington, voire Madrid croient, à tort, que le troisième pourrait être le dernier… Comme si l’on pouvait, en trois rounds, mettre KO le droit international et, par un tour de passe-passe, changer le sens du mot autodétermination…