Sahara Occidental: La posture difficile de Paris

Dossier du Sahara Occidental

La posture difficile de Paris

 Le Quotidien d’Oran, 20 octobre 2004

Le dernier vote, avant-hier, de la quatrième commission de l’Assemblée générale de l’ONU sur le plan de règlement de James Baker, qui prévoit une période d’autonomie de cinq ans suivie d’un référendum d’autodétermination sur le statut définitif du Sahara Occidental, a suscité une réaction mitigée des Sahraouis. Rabat a, bien entendu, salué une victoire diplomatique tandis que l’ambassadeur d’Algérie aux Nations unies, Abdallah Baâli, dénonce les «pressions» exercées selon lui sur les Etats membres avant le vote.

Au décompte, seuls 52 pays ont voté pour, zéro contre mais 89, dont 25 Etats membres de l’Union européenne, se sont abstenus. La consultation en question n’a aucune valeur contraignante. Mais il semble bien qu’elle soit typique d’un retour de situation. Curieusement, celle-ci semble être typique de ce qu’avançait Bruno Etienne, au début des années quatre-vingt-dix, sur le Sahara Occidental.

Du conflit, le politologue et historien français pensait notamment qu’il avait pour valeur de rythmer les relations algéro-marocaines comme un mouvement de pendule incessant. Un coup, c’est l’Algérie qui gagne; un autre, c’est le Maroc.

Chacun marquait des points, soit en fonction de sa réalité interne, soit en fonction des circonstances internationales, dans ce qu’il convenait bien à l’époque d’appeler une confrontation de type hégémonique. Vingt ans après, cette théorie qu’on croyait dépassée, rejaillit de nouveau. Elle réapparaît dans un contexte extrêmement complexe et avec un jeu d’alliance à donner le tournis. C’est ce changement qui a sans doute permis au Polisario d’obtenir, via le soutien algérien, le précieux soutien de Pretoria, le plus grand Etat africain. C’est lui également qui peut être à l’origine de bouleversements, bons ou mauvais, qui peuvent se produire au sujet de la cause sahraouie.

Le processus n’est qu’à ses débuts, mais il devrait concerner en premier lieu des pays comme l’Espagne, dont le point de vue reste très vague, et surtout la France et les Etats-Unis: deux puissances dont le rayonnement et l’influence dans la région sont difficilement discutables.

Le point de vue de Washington est encore suspendu aux élections du 2 novembre. Il est donc risqué d’en parler même si certaines sources à Alger admettent, non sans aventure, qu’une victoire de George W. Bush ferait l’affaire, car le président sortant a de bonnes dispositions à l’égard de son homologue Abdelaziz Bouteflika et que son entourage «préfère» le pétrole. Reste, alors, la France. De l’avis même des Sahraouis, ce pays compte parmi les meilleurs soutiens du Maroc, sinon le plus redoutable. Mais sa position risque d’être de moins en moins aisée à l’avenir. Paris regarde intensément vers l’Algérie et sa politique maghrébine évolue évite.

Mais jusqu’où ? Si un choix pour l’Elysée ne semble pas à l’ordre du jour, tout dépend de l’attitude des dirigeants algériens et du contenu qu’ils entendent accorder au rapprochement avec la France, disent certains. Il n’est pas exclu, ajoutent-ils, que l’Algérie, qui savoure son come-back sur la scène internationale, ne lui vienne l’idée de faire subir quelques nuances à cette association qui doit être couronnée par un traité d’amitié historique et fondateur.

Kader Hannachi