La France et le Maroc désavoués

Sommet UA-UE en Côte d’Ivoire

La France et le Maroc désavoués

Le Soir d’Algérie, 18 octobre 2017

Le Conseil exécutif de l’Union africaine a finalement réussi à mettre en échec une dangereuse manœuvre visant à exclure la RASD (République arabe sahraouie démocratique) du cinquième sommet UE-UA programmé pour les 29 et 30 novembre prochain à Abidjan.

Abla Cherif – Alger (Le Soir) – A l’origine de cette manœuvre, le Maroc, fortement appuyé par son allié français inconditionnel qui a tenté de tout mettre en œuvre pour contraindre le pays hôte à refuser la participation de la délégation sahraouie.
Connue pour son appartenance à la zone d’influence française, la Côte d’Ivoire s’est jointe sans peine à la démarche franco-marocaine. Le procédé s’est déroulé comme suit : chargés d’adresser aux 55 pays membres une invitation cosignée par le président de l’UA et le pays qui accueille l’évènement, les Ivoiriens apposent leur signature uniquement sur 54 invitations et mettent de côté celle destinée à la RASD. Les Sahraouis ne sont pas surpris. De hauts responsables français avaient déjà donné le ton de la tournure qu’allaient prendre les évènements en se livrant à de graves déclarations publiques. En visite au Maroc au cours de la semaine dernière, il fait savoir que toute participation au sommet UA-UE doit être prise par consensus et que la présence de certains pays posait un problème de souveraineté. A comprendre, la RASD, seul pays membre de l’Union africaine à ne pas jouir de souveraineté en raison de la mainmise du Maroc sur son territoire.
Conscients de l’enjeu, les responsables sahraouis saisissent immédiatement l’UA et l’informent que l’invitation au sommet n’avait pas été signée par la Côte d’Ivoire.
L’organisation africaine réagit au quart de tour. En début de semaine, ses représentants permanents se réunissent en session extraordinaire à Addis-Abeba pour débattre de la situation. Les ministres africains leur emboîtent le pas et se rencontrent à leur tour pour trouver une issue au problème. Tous les pays ne sont pas représentés. Certains responsables issus d’Etats acquis aux thèses marocaines et persuadés par les Français de se montrer hostiles à la présence sahraouie sont absents.
La décision finale a finalement été rendue publique lundi. Dans un communiqué, le Conseil exécutif de l’UA s’est exprimé en réaffirmant : «Le droit de tous les Etats membres de l’Union africaine à prendre part au cinquième Sommet Union africaine-Union européenne.» La décision réaffirme «la nécessité du respect scrupuleux des décisions de l’Union africaine, en particulier la décision 942 de la 31e session ordinaire du Conseil exécutif de juillet 2017, qui, en plus de la réaffirmation du droit de tous les Etats membres à participer aux réunions où l’Union africaine est partie prenante, prévoit la sanction de priver les Etats membres qui ne s’y conforment pas, du droit d’abriter des réunions de l’Union».
La même source indique par ailleurs que la décision prise mandate le président de la Commission de l’Union africaine à poursuivre ses consultations de haut niveau pour débloquer cette situation, dans un délai de dix jours. Faute d’aboutissement de ces consultations sur la base du respect du droit de tous les Etats membres à prendre part au Sommet UA-UE, la décision prévoit «la mise en œuvre automatique des sanctions prévues par la décision 942, à savoir le transfert du Sommet vers le siège de l’Union africaine».
En d’autres termes, la Côte d’Ivoire se voit sommée d’adresser l’invitation dûment signée à la République arabe sahraouie démocratique (RASD) avant le 27 octobre, faute de quoi le sommet sera transféré vers un autre pays.
La Côte d’Ivoire se pliera-t-elle à la décision de l’organisation africaine ? La session extraordinaire de l’UA n’a pas été clôturée pour autant. Elle affirme restée ouverte jusqu’à la résolution totale d’un problème dans lequel des poids lourds africains (tel Pretoria) se sont engagés pour l’obtention rapide d’une solution en faveur des Sahraouis.
A. C.