Le contrat militaire Madrid-Rabat évoqué ?
Tournée de Peter Van Walsum dans la région :
Le contrat militaire Madrid-Rabat évoqué ?
par Mohamed Zaâf, Le Jeune Indépendant, 11 février 2008
Peter Van Walsum, le représentant personnel du secrétaire général des Nations unies pour le Sahara reprenait, samedi dernier, mot à mot le constat de M. Ban Ki-moon dans son rapport au Conseil de sécurité daté du 25 janvier : les positions du Maroc et du Polisario sont «très éloignées».
M. Walsum exprimait cette conclusion à l’issue de sa rencontre avec le président sahraoui, M. Mohamed Abdelaziz, après son entretien à Rabat avec le Premier ministre marocain, M. Abbas El Fassi. Le facilitateur onusien qui trouve inutile de faire des propositions qui seront fatalement rejetées avait entamé le 6 février une tournée dans la région qui prévoit deux autres étapes : Alger et Nouakchott.
Dans sa résolution 1754, le Conseil de sécurité de l’ONU, rappelle-t-on, demande aux deux belligérants, le Maroc et le Polisario, de «poursuivre les négociations sous les auspices du secrétaire général, sans conditions préalables et de bonne foi, en tenant compte des efforts réalisés depuis 2006 et des développements des derniers mois, en vue de parvenir à une solution politique juste, durable et mutuellement acceptable qui permette l’autodétermination du peuple du Sahara occidental dans le contexte d’arrangements conformes avec les buts et principes énoncés dans la Charte des Nations unies…».
La résolution faisait suite à la proposition marocaine sur l’octroi d’une autonomie au Sahara occidental sous souveraineté marocaine. Rejetant cette forme de tutorat, le Polisario faisait une contre-proposition qui s’avérait nettement plus démocratique : un référendum qui permettrait au peuple sahraoui de choisir l’autonomie, le rattachement intégral au Maroc ou bien l’indépendance.
Le Maroc ne voulut rien savoir et s’en tint à sa proposition. «Je ne vous montre que ce que je vois», disait le pharaon, nous rapporte le saint Coran. Pourtant, comme le soulignait M’hamed Kheddad, membre de la délégation des négociateurs du Polisario à Manhasset, la proposition sahraouie «prend en considération le réalisme politique tout comme elle est en harmonie avec le droit internationale et le droit des peuples à disposer des leur devenir».
Pour le responsable sahraoui, «l’acceptation de l’autodétermination et du référendum est en lui-même une concession de taille et une solution médiane entre l’indépendance et la consécration de la République sahraouie, membre actuel de l’Union africaine et l’intégration prônée par le Maroc».
M.Kheddad, qui s’exprimait après les entretiens entre son président et le représentant onusien, a tenu à préciser la limite où s’arrêteront les siens. Le Polisario n’acceptera jamais de négocier sur la seule base de la proposition d’autonomie puisque, relève-t-il, elle «tranche dans la question fondamentale de souveraineté sur le territoire qui ne lui appartient nullement».
En effet, depuis voilà plus de trente ans que le conflit dure, aucun pays n’a reconnu la souveraineté du Maroc sur le Sahara occidental, comme le prévoyait si justement James Baker, l’ancien secrétaire d’Etat américain, victime du choix de la «ténacité de la diplomatie marocaine».
Mais si personne ne reconnaît la souveraineté alaouite sur l’ancienne colonie espagnole, en revanche, près de 80 Etats ont reconnu la RASD. Ce qui n’a pas empêché Rabat de prévoir une chorale pour reprendre son fatigant refrain sur l’intégrité et la souveraineté à l’occasion de la visite de Walsum.
Des partis politiques avaient alors pour mission de se faire l’interprète du Maroc officiel et de permettre à la MAP un titre de rêve : «la souveraineté du Maroc sur ses provinces du Sud n’est pas négociable». Une intransigeance que vient conforter l’accord militaire passé avec Madrid, une capitale dont la responsabilité dans le drame sahraoui n’est plus à démontrer.
Les Marocains sont en train de préparer la guerre avec les armes espagnoles, affirment certains. L’Espagne feinte une nouvelle fois la légalité internationale et la paix en cédant des armes à un pays en conflit, sachant que les lanceurs de bombes à fragmentations, que Madrid refile à titre gracieux aux FAR, ne vont certainement pas être utilisés contre les copains sionistes.
N’importe comment les Sahraouis ne seront certainement pas pris au dépourvu, eux qui disent en avoir ras le bol de la situation de «ni paix ni guerre» qui dure depuis le cessez-le-feu, intervenu en 1991. Le dernier Conseil des ministres de la RASD, tenu vendredi dernier, avait décidé de renforcer les capacités de lutte de l’ALPS, du Polisario et de l’Intifadha.
La désignation de M. Ibrahim Ghali, ancien ministre de la Défense, comme ambassadeur à Alger, procèderait-il de cette logique ? Les Sahraouis, rappelle-t-on, disent qu’ils ne sauraient supporter le statu quo au Sahara occidental au-delà de 2009.
Les Algériens dans tout ça ? Le 16 février, Alger abritera une réunion sur la décolonisation du Sahara occidental qui constituera le coup d’envoi de l’année internationale de solidarité avec le peuple sahraoui dans sa lutte pour l’autodétermination.
La réunion sera le fait du CNASPS (Comité national algérien de solidarité avec le peuple sahraoui), c’est-à-dire d’une ONG et non pas de l’Algérie officielle. Quant aux assises nationales et internationales du tourisme, elles commencent chez nous aujourd’hui pour s’achever demain, si cela pouvait consoler M. Walsum.
M. Z.