FIS: Appel au peuple algérien
Appel au peuple algérien
Front Islamique du Salut
Bureau Exécutif National
Appel au peuple algérien (traduction)
15 Safar 1425 H / 5 avril 2004
Allah, le Tout Miséricordieux, dit : «Certes, Dieu vous commande de rendre les dépôts à leurs ayants droit, et quand vous jugez entre des gens, de juger avec équité» (Coran, 4 :58)
Le Prophète, que la paix et le salut soient sur lui, a dit : « Eloignes toi de ce qui te fait douter vers ce dont tu ne doutes pas. »
Peuple algérien,
Que Dieu te salue, te protège et lève les souffrances que tu endures,
Sur le plan des droits de l’homme, tu n’as pas fini, depuis plus de douze années, de compter parmi tes enfants les morts, les disparus, les mutilés, les détenus politiques, les exilés et ceux qui ont perdu les êtres qu’ils chérissent, et du même coup leur source de subsistance.
Sur le plan politique, l’état de siège continue de restreindre tes libertés individuelles et collectives dans les domaines politique, médiatique, social, caritatif et de la prédication.
Sur les plans économique et social, le chômage, la pauvreté, la corruption et le crime s’étendent à des couches de plus en plus larges en ton sein due au monopole exercé par une minorité sur l’activité économique, et à la dilapidation de ressources financières énormes dans la propagande, aux fins électoralistes et pour acheter les consciences des citoyens.
Le pouvoir t’appelle pour participer aux élections présidentielles du 8 avril 2004 dans un climat d’exclusion politique, et sans que soient réunies les conditions nécessaires pour un vote crédible telle que la liberté, la sécurité et l’absence de la fraude, ainsi que la purification de la scène politique des multiples séquelles du coup d’Etat de janvier 1992.
Nous t’avons adressé ainsi qu’aux candidats aux présidentielles une lettre ouverte datée du 30 mars dernier dans l’espoir que tu puisses être informé sur les engagements que ces candidats sont tenus à ne pas dissimuler, concernant la préservation de tes constantes et tes éléments constitutifs existentiels, la restitution de tes libertés, la mise en œuvre de la justice sociale parmi les diverses couches de la société, la résolution des multiples conflits qui se sont accumulés, l’engagement d’une réconciliation nationale véritable entre tous tes enfants, et l’instauration de règles élémentaires pour une pratique politique qui te permet de jouir de la souveraineté qui te revient de droit.
Après avoir remis cette lettre ouverte aux états-majors des tous les candidats, nous avons reçu des réponses de ceux qui ont le plus de chance de gagner les voix des électeurs :
• Soit à travers un contact direct avec le candidat, au cours duquel ce dernier a donné des promesses verbales pour prendre en charge l’ensemble des questions soulevées dans notre lettre ouverte,
• Soit à travers un contact avec responsable de haut rang et homme de confiance du candidat, au cours duquel il a donné des promesses verbales qui n’englobent pas toutes les questions soulevées dans notre lettre ouverte, étant entendu que les intermédiaires ne jouissent pas des prérogatives nécessaires à de telles entrevues,
• Soit à travers une réponse écrite, dans laquelle le candidat nous a référé à son programme électoral et au discours d’annonce de sa candidature, sans pour autant qu’il ne réponde de façon précise et pratique aux préoccupations du peuple soulignées dans notre lettre ouverte, et sans qu’un contact direct ou indirect n’ait eu lieu avec lui.
Il convient aussi de rappeler dans ce contexte que le Front Islamique du Salut, à la lumière de ses expériences passées et des promesses non tenues, ne peut s’en tenir à de simples déclarations verbales, prenant pour exemple en ce domaine ce qu’a conseillé l’Imam Ali, qu’Allah l’agrée, : « la confiance doit être accompagnée par l’engagement écrit ».
L’examen du déroulement de la campagne électorale, des discours prononcés sur le terrain, et les déclarations médiatiques de l’ensemble des candidats, n’encourage pas à la participation, surtout en l’absence de la neutralité de l’administration et de l’impartialité de la justice qui est toujours utilisée pour liquider les adversaires politiques.
Si le boycott n’était pas sans effet sur le droit électoral algérien quant à la validation des résultats, aussi minime soit la participation, comme ce fut le cas dans les wilayas de Béjaia et Tizi-Ouzou lors des législatives de 2002, et s’il ne facilitait pas une « victoire » au premier tour, nous aurions appelé le peuple à ne pas participer, car un tel boycott serait légitime et exprimerait au mieux le refus d’un pouvoir corrompu, et la protestation contre l’exclusion et la fraude, et le non respect des engagements tenus par les candidats.
Vu l’absence, chez les candidats, du courage politique qui leur permettrait d’exprimer en toute clarté leurs positions sur les points que nous avons soulevés, et ceci sans doute en raison des diverses formes de pression intérieures et extérieures qu’ils subissent, nous en avons conclu que, pour respecter nos obligations et pour être sincères et fidèles au peuple, nous ne pouvons appeler au soutien d’un quelconque candidat lors de ce premier tour des présidentielles. Cette position tient aussi compte du fait que tu fais face à une épreuve difficile qui réclame de toi, ? peuple algérien, le sens de la responsabilité envers Allah, l’histoire et les générations futures.
La tenue vraisemblable d’un second tour pourrait être un indice quant à la crédibilité de ces élections, et obligerait les candidats retenus à sortir de leurs ambiguïtés, contradictions et généralités et à proposer des solutions politiques réelles afin de sortir le peuple de la crise principale qui le secoue ainsi que de ses séquelles.
Nous continuerons à observer attentivement les développements sur la scène politique afin de ne laisser passer aucune opportunité au peuple algérien qui lui permette de lever les souffrances et les injustices qu’il endure, et de recouvrer sa libertés, sa souveraineté politique et tout ce qui permettra le retour de la légalité, la stabilité et l’émancipation.
Puisse Dieu choisir pour ce peuple un gouvernant juste qui lui établit sa religion et lui améliore les conditions de sa vie.
Signé par:
Madani Abbassi, président du Front Islamique du Salut
Abdelkader Boukhamkham, Ali Jeddi, Kamal Guemazi, Omar Abdelkader
Mourad Dhina (au nom du Bureau exécutif national du Front Islamique du Salut)
Note : seuls les interdits illégaux et illégitimes imposés à cheikh Ali Benhadj l’ont empêché de signer cette lettre.