Fin de mission

Fin de mission

El Watan, 23 octobre 2016

Trois ans et quelques semaines. Le désormais ex-secrétaire général du FLN, Amar Saadani, coopté à la tête de ce parti le 30 août 2013, n’aura pas tenu longtemps.

Les rumeurs concernant sa mise à l’écart qui ont circulé durant l’été dernier ont fini par se confirmer à l’occasion de la réunion, hier, du comité central du parti. Même s’il a tenté de masquer son limogeage par une des mises en scène qu’il maîtrise le mieux, en faisant croire que le décision de céder les commandes de l’appareil du FLN ne vient que de lui. Mais, malgré ce temps, trop court, qu’il aura passé au-devant de la scène nationale, Amar Saadani a réussi à rendre caricatural l’exercice politique dans le pays.

Tout s’est joué à l’hôtel El Aurassi pour lui. Il y a été imposé contre l’avis des militants du FLN et a été poussé vers la porte de sortie, au grand dam de ses partisans. La fin de mission lui a été signifiée contre toute attente. Car il y a seulement quelques jours, en faisant sa rentrée politique après une longue absence, Amar Saadani s’est montré très confiant. Tout en excellant dans les louanges au chef de l’Etat, qui l’a maintenu à la tête de l’ex-parti unique, il s’est à nouveau attaqué violemment à l’ex-patron du DRS, le général Mohamed Mediene, dit Toufik, qu’il a qualifié de chef des officiers de l’armée française en Algérie (DAF). Dans ses attaques, il n’a pas épargné, cette fois-ci, l’ancien ministre et ex-secrétaire général du FLN, Abdelaziz Belkhadem, en touchant même à l’honneur de sa famille, dont il a remis en cause le passé durant la Guerre de Libération nationale.

Comme à son habitude, il a également répondu au groupe des 14 anciens moudjahidine qui ont exigé son remerciement, avant d’exiger la constitution d’un gouvernement à 100% FLN. Il semblerait que c’est cette dernière sortie qui a scellé définitivement son sort. Ses déclarations, notamment contre Abdelaziz Belkhadem, ont suscité des réactions officielles, notamment du Premier ministre, Abdelmalek Sellal. Amar Saadani a-t-il dépassé les lignes rouges qu’on lui a fixées ? C’est vraisemblablement le cas.

Car ce n’est pas la première fois que l’homme défraye la chronique par un discours sans aucune retenue. Jouant au «Terminator» de la politique nationale, l’homme, bénéficiant des tribunes ouvertes de certains médias, se lance dans l’arène tel un forcené. Il tire sur tout le monde. Sa première cible était le général Toufik, qualifié jusque-là de «Reb Dzaïr» (Dieu de l’Algérie).

Et cela dès son intronisation à la tête de l’ex-parti unique en 2013. Donnant l’impression d’avoir découvert l’emprise du DRS sur la vie publique, il dénonce la présence des éléments de ce corps dans toutes les administrations et au sein des partis. Galvanisé par l’effet médiatique de son discours, Amar Saadani multiplie alors des attaques contre le général Toufik, son sport préféré tout au long des années 2014, 2015 et 2016. Il est allé jusqu’à lui imputer tous les échecs enregistrés en Algérie.

Outre le général à la retraite et Abdelaziz Belkhadem, Amar Saadani n’a pas raté d’autres responsables politiques en Algérie. En plus de l’opposition à laquelle il reproche son refus d’accepter les propositions du chef de l’Etat, il s’attaque aussi à des personnalités faisant partie du cercle restreint du pouvoir. Soupçonnant le secrétaire général du RND, Ahmed Ouyahia, de vouloir succéder au président Bouteflika, il le somme de quitter son poste de directeur de cabinet de la présidence de la République.

Cela a provoqué un froid glacial dans les relations entre le FLN et le RND. Même Abdelmalek Sellal ne lui a pas échappé. Il lui demande d’adhérer au FLN s’il souhaite garder son poste de Premier ministre. Amar Saadani descend encore très bas dans ses attaques contre la secrétaire générale du Parti des travailleurs (PT), Louisa Hanoune. L’homme d’affaires, Issad Rebrab, a été également la cible du patron du FLN déchu.
Madjid Makedhi