Vers le report de la présidentielle malienne ?
Bamako soutient que les conditions pour son organisation ne sont pas réunies
Vers le report de la présidentielle malienne ?
El Watan, 29 juin 2013
Le calendrier des élections devant permettre au Mali un retour à légitimité institutionnelle pourrait connaître un réaménagement.
La raison ? Les autorités de transition ne seraient pas suffisamment prêtes techniquement pour organiser un scrutin présidentiel à la fin du mois de juillet prochain ainsi que l’exige la communauté internationale. Le président de la Commission électorale nationale indépendante (CENI) du Mali, Mamadou Diamountani, a indiqué, à ce propos, qu’il serait difficile de tenir le premier tour de l’élection présidentielle le 28 juillet. «Il est extrêmement difficile d’organiser le premier tour de l’élection présidentielle le 28 juillet», a-t-il déclaré jeudi soir à la presse.
Le président de la CENI a expliqué que «d’ici le 28 juillet, la CENI a encore beaucoup de défis à relever». «D’abord, il faut reconnaître que la production de la carte d’électeurs a pris beaucoup de retard. Or, c’est le seul document qui permet à l’électeur de voter, c’est non seulement la carte d’identification, mais aussi la carte d’électeur. Il va être extrêmement difficile de remettre les cartes aux électeurs maliens en moins d’un mois, surtout quand on sait qu’il y a plus de 6,8 millions de cartes, qu’il y a beaucoup de populations déplacées», a relevé Mamadou Diamountani.
Le président de la CENI a, par ailleurs, mis en avant la situation à Kidal, ville du nord-est du Mali occupée par la rébellion touareg du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA) où l’armée malienne n’est toujours pas présente, en dépit d’un accord entre le gouvernement de transition à Bamako et le couple MNLA/HCUA conclu le 18 juin à Ouagadougou. Une «autre raison qui rend extrêmement difficile, voire impossible», la tenue du premier tour de la présidentielle à la date prévue, selon le président de la CENI. Or, le principe est d’organiser la présidentielle partout au Mali.
Le refus catégorique de Paris
A ce propos, une source proche d’un mouvement targui a en effet révélé, hier El Watan, que «les responsables militaires touareg ont refusé la semaine dernière, pour un certain nombre de raisons, l’installation de la police et de la gendarmerie maliennes à Kidal». «Les officiers maliens avec d’autres officiers des forces étrangères sont effectivement venus à Kidal pour discuter des modalités de retour de la police et de la gendarmerie. Ces derniers sont repartis sans s’entendre avec leurs interlocuteurs touareg. Pour le moment, aucun élément des forces maliennes n’est accepté dans la ville de Kidal», a indiqué, en outre, la même source.
L’avis du président de la CENI est visiblement partagé aussi par beaucoup de membres du gouvernement malien de transition. Un ministre malien a ainsi affirmé hier à l’AFP, sous le couvert de l’anonymat, que «tout le monde est d’accord pour le report» car «nous ne voulons pas des élections bâclées». La décision de tenir le premier tour de la présidentielle le 28 juillet, éventuellement suivi d’un second tour le 11 août, a, a-t-il mentionné, été prise par le gouvernement malien de transition sous la pression de la communauté internationale. Or, a soutenu la même source, personne n’est prêt.
Les arguments avancés par Bamako pour reporter le scrutin présidentiel ne semblent toutefois pas avoir convaincu Paris qui a décidé le 11 janvier dernier d’intervenir militairement dans le nord du Mali pour chasser les éléments d’AMI qui en avaient pris le contrôle. C’est bien simple, la France ne veut absolument pas entendre parler de report. L’élection présidentielle au Mali «se tiendra dans les délais prévus. Tout est organisé», a martelé hier, lors d’un point de presse, Philippe Lalliot, porte-parole du Quai d’Orsay.
Des bérets rouges aux bérets bleus
Philippe Lalliot a encore précisé que 110 experts de l’Union européenne allaient observer le déroulement de ces élections. «Nous fournirons tout appui nécessaire aux autorités maliennes si elles l’estiment nécessaire», a ajouté M. Lalliot, précisant que jusqu’ici, la France n’avait pas été sollicitée. «Les choses avancent, les choses progressent selon les schémas, les stratégies, les calendriers qui ont été annoncés. La date du 28 juillet est très importante, car elle permettra de doter le Mali d’autorités politiques légitimes», a ajouté le porte-parole dont le pays semble vouloir clore au plus vite le dossier malien.
Au plan opérationnel, la cérémonie de transfert d’autorité entre les forces de la mission internationale de soutien au Mali sous conduite africaine (MISMA) et la mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation au Mali (Minusma) se déroulera, rappelle-t-on, le 1er juillet à Bamako. Au cours de la cérémonie, les unités militaires et de police de la Misma échangeront leur béret actuel pour porter le béret bleu des Nations unies, a mentionné un communiqué conjoint des deux missions rendu public jeudi soir.
Le haut représentant du gouvernement malien de transition, le commissaire de l’Union africaine (UA) à la paix et la sécurité Ramtane Lamamra, le représentant spécial de l’UA au Mali et chef de la Misma, Pierre Buyoya, participeront notamment à l’événement qui se déroulera au Centre international de conférences de Bamako. Figureront également le représentant spécial du secrétaire général de l’ONU et chef de la Minusma, Bert Koenders, et le président de la Commission de la communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cédéao), Kadré Désiré Ouédraogo, ajoute le communiqué. Le conseil de sécurité de l’ONU a, rappelle-t-on, donné mardi dernier son feu vert pour le déploiement des Casques bleus à partir du 1er juillet prochain au Mali. Une décision applaudie par l’ensemble des pays de la région.
Zine Cherfaoui