Otages algériens à GAO: Les oubliés de la guerre au Mali
Otages algériens à GAO
Les oubliés de la guerre au Mali
El Watan, 3 mars 2013
Dès le début de l’offensive militaire française au nord du Mali, les contacts avec les ravisseurs des quatre diplomates algériens ont été rompus.
Détenus par le Mujao, dans la région de Gao, leur sort reste inconnu l Les autorités algériennes se murent dans un silence pesant.
Depuis le lancement de l’opération militaire française Serval, au nord du Mali, le sort des quatre diplomates algériens détenus par les terroristes dans la région reste incertain. Entrepris quelques mois après leur enlèvement du siège du consulat d’Algérie à Gao, il y a près d’un an, les contacts avec les ravisseurs ont été rompus dès les premiers pilonnages de la ville de Gao, par l’aviation française. «Nous n’avons aucune nouvelle sur le sort des otages algériens, depuis le début des bombardements sur la ville de Gao, où ils étaient détenus, séparément. Les négociations avec les responsables du Mujao, par l’intermédiaire de certains notables proches de Ançar Eddine, avaient permis la mise à disposition des otages un lot de médicaments. Ces derniers, notamment le consul de Gao, souffraient de plusieurs maladies qui risquaient de mettre en péril leur vie.
Raison pour laquelle le Mujao a accepté de recevoir un négociateur, un membre d’Ançar Eddine, qui leur a remis le lot de médicaments. Les terroristes ont réitéré leur exigence, à savoir une rançon et la libération d’une quarantaine de terroristes», explique notre interlocuteur. Selon lui, les tractations ont connu des «hauts et des bas. Les terroristes ont accepté de libérer deux otages. Mais ils ont aussi exécuté un troisième et gardé les quatre autres. Et pour faire pression sur l’Algérie, ils ont fait circuler un enregistrement vidéo montrant trois, parmi ces derniers, prier les autorités algériennes de répondre aux exigences des terroristes». Une source sécuritaire algérienne reconnaît que le «contact n’a en réalité jamais été rompu même après l’exécution de l’un des otages.
De la méfiance s’est installée, mais les négociateurs arrivaient toujours à avoir des nouvelles». Il est vrai, ajoute la source, que la vie des diplomates était en danger. Néanmoins, il y avait un petit espoir de les faire libérer. «Un plan B était également pris en compte. Il consiste à libérer les otages militairement par l’intermédiaire d’un commando de Touareg de la région. Ce plan avait été minutieusement préparé. Il avait de fortes chances de réussir parce que les otages étaient regroupés dans un endroit à Gao, non loin de la frontière avec le Niger. Mais à la dernière minute, les responsables du Mujao avaient décidé de séparer le groupe et de le déplacer ailleurs. Il fallait reprendre les négociations. Ce qui a été fait. Les terroristes semblaient très en colère. Cependant, ils n’ont pas coupé le contact», révèle notre interlocuteur.
Lui aussi confirme que les nouvelles sur le sort des otages ont été interrompues depuis le début du pilonnage par l’armée française de la région de Gao. «Nous n’avons pour l’instant aucune nouvelle sur le sort des diplomates. Le groupe n’a plus donné de signes et les négociateurs ne veulent plus servir d’intermédiaires. Même si cela n’augure rien de bon, nous continuons à croire que l’espoir est toujours permis. Lorsque les opérations militaires françaises prendront fin, les terroristes pourraient utiliser les captifs comme monnaie d’échange contre leur arrestation», indique notre source.
Officiellement, l’Algérie reste muette sur le sujet. Toutes nos tentatives de joindre hier le porte-parole du ministère des Affaires étrangères ont été vaines. Pourtant, de l’autre côté de la Méditerranée, c’est le président François Hollande qui a reçu les familles des otages français détenus au nord de Kidal par AQMI. Il les a rassurées. Les violents combats, qui ont eu lieu près des montagnes de Tigherghar, au nord-est de Kidal, ont fait, selon un bilan officiel, 25 morts dans les rangs de l’armée tchadienne.
Le président français sait que la bataille contre le groupe d’Abou Zeïd, qui détient les otages français, n’est pas terminée. Le risque que les otages soient utilisés comme bouclier ou qu’ils soient exécutés n’est pas du tout à écarter. Raison pour laquelle, François Hollande a préféré préparer les familles à un tel scénario. Du côté algérien, c’est le black-out total, y compris pour les promesses de révéler si effectivement un des otages a été exécuté ou non, puisqu’à ce jour, sa famille vit dans l’incertitude totale. En tout état de cause, hier, aucun responsable des Affaires étrangères n’était en mesure de s’exprimer sur le sort de nos otages au nord du Mali.
Depuis le début de l’opération militaire française Serval, à quelques kilomètres seulement de nos frontières, les autorités se sont murées dans un silence inquiétant.
Salima Tlemçani