L’Onu peu désireuse de se porter garante d’une intervention militaire « risquée » au Mali

L’Onu peu désireuse de se porter garante d’une intervention militaire « risquée » au Mali

Salim Rabia, Maghreb Emergent, 30 Novembre 2012

Le rapport du secrétaire général de l’Onu transmis mercredi au Conseil de sécurité a beau parler d’une intervention militaire «sans doute nécessaire » au nord du Mali, il n’en exprime pas moins de très fortes réserves l’égard d’une action qui pourrait aggraver les choses au lieu de les résoudre. Ban Ki-Moon est réticent à apporter la «garantie » onusienne à une intervention souhaitée par Paris et des pays de l’Afrique de l’Ouest. Cela pourrait peser sur la décision du Conseil de sécurité.

Le secrétaire général de l’Onu Ban Ki-Moon a « déçu » le président de l’Union Africaine en affichant, mercredi, de très fortes réserves à une intervention militaire « sans doute nécessaire » mais qui, si elle est «mal conçue et exécutée… pourrait aggraver une situation humanitaire déjà extrêmement fragile et entraîner aussi de graves violations des droits de l’homme ». Traduisant une forte hésitation à donner un aval franc à une intervention militaire, Ban-Ki-Moon souligne dans un rapport transmis au Conseil de sécurité qu’une telle intervention comporte le risque «de ruiner toute chance d’une solution politique négociée à cette crise, qui reste le meilleur espoir d’assurer la stabilité à long terme au Mali ». En tout état de cause, le secrétaire général de l’Onu fixe des conditions à une intervention, la plus importante étant que les plans pour mettre en place une force d’intervention « doivent être précisés » davantage.

Un appel à la prudence

La tonalité générale du rapport du Secrétaire Général est un fort appel à la prudence et à la vigilance au 15 membres du Conseil de sécurité qui devraient trancher sur le sujet le 10 décembre prochain. Outre une insistance sur le fait que « l’accent doit être mise sur le dialogue politique » avec les Touareg notamment, Ban Ki-Moon insiste fortement sur le fait que les forces africaines qui interviendraient éventuellement au Nord du Mali ne peuvent bénéficier d’aucune impunité. L’aval éventuel du Conseil de sécurité à une intervention militaire ne dispensera pas les forces africaines engagées d’être «tenues pour responsables de leurs actes » et du devoir de respecter les lois humanitaires internationales. Pour rappel, l’envoyé spécial de l’Onu au Sahel, Romano Prodi a estimé, en se basant sur des estimations d’experts, qu’une intervention militaire éventuelle ne pourrait pas avoir lieu avant septembre 2013. Les pays africains qui, à la suite de la France, souhaitaient une intervention rapide rencontrent ainsi une forte réticence pour ne pas dire résistance. Le président de l’Union Africaine, Thomas Boni Yayi a exprimé sa déception à l’égard du rapport de Ban Ki-moon qui est, dit-il, « relativement en deçà des attentes de l’ensemble du continent africain, ». « Tout recul devant la nécessité d’envoyer en urgence la Force Internationale pour combattre le terrorisme au Nord Mali sera interprété comme l’expression d’une faiblesse » face aux terroristes, a-t-il insisté.

Plus proche d’Alger que de Paris

Le rapport du Ban Ki-moon va dans le sens de la priorité à la solution politique entre Bamako et les rebelles Touaregs défendu par l’Algérie comme préalable nécessaire à tout traitement sécuritaire des groupes djihadiste. Une position très largement soutenue par les pays du Maghreb. A New York, une « source proche du dossier », citée par le journal Le Monde, souligne que « l’Onu ne peut se porter garante d’une opération militaire dont on ignore toujours les tenants et les aboutissants. En cas d’échec, elle serait la première à être pointée du doigt ». En outre, de nombreuses questions évoquées dans le rapport de Ban Ki-Moon ne sont pas encore clarifiées. Il s’agit notamment de la « manière dont la force sera dirigée, entretenue, entraînée, équipée et financée. »