MNLA: A la recherche d’une légitimité internationale

Mouvement national pour la libération de l’Azawad

A la recherche d’une légitimité internationale

El Watan, 4 novembre 2012

Quel rôle jouera le Mouvement pour la libération national de l’Azawad (MNLA) dans une éventuelle intervention militaire au Mali ?

Déchiré, affaibli, marginalisé et grandement décrédibilisé devant l’opinion publique malienne, le mouvement touareg cherche à se frayer une place dans l’échiquier politique malien. Les populations maliennes auront sans doute du mal à oublier que la tentative – ratée – de créer un Etat indépendant touareg aura plongé le Mali et toute la région du Sahel dans le chaos.
Dans un entretien accordé au journal El Watan, l’expert militaire malien, Modibo Goïta, affirmait que «les Touareg sont loin de constituer la majorité de la population vivant dans ces régions. Pire, le MNLA a énormément perdu de la sympathie dont il jouissait au sein de la population, qui désormais pense qu’il est la cause de tout le malheur».

Mis à mal dans le nord du pays, par les islamistes d’Ançar Eddine et les terroristes du Mujao, les membres du MNLA multiplient les appels aux dirigeants internationaux pour faire entendre leur voix. Le mouvement se taille ainsi un costume d’outsider dans une région où l’étau djihadiste se resserre autour des populations. Aussi, clament-ils à qui veut les entendre, qu’une intervention militaire au Mali, n’associant pas les rebelles touareg, sera vouée à l’échec.

Pas de sous-traitance

Mossa Ag Attaher, coordinateur de l’action diplomatique du MNLA, affirme, dans l’un des communiqués de presse de l’organisation, que le MNLA est prêt «à participer à la résolution du problème du terrorisme au Sahel», mais qu’«il ne servira en aucun cas de sous-main à une quelconque force étrangère qui niera la légitimité du MNLA et du peuple de l’Azawad à prendre son destin en main». Le fait est que les forces internationales et la Cédéao auront certainement besoin d’un allié sur le terrain.

C’est la carte que présentent les rebelles touareg pour se maintenir sur la table de jeu. Dans une lettre adressée au secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, les responsables touareg s’interrogent : «Pourquoi la communauté internationale et la Cédéao continuent d’entretenir la méfiance vis-à-vis du MNLA, qui reste cependant le seul allié objectif, crédible et incontournable dans la lutte contre les forces obscurantistes implantées dans l’Azawad depuis bientôt une quinzaine d’années et dans le règlement définitif du conflit ?»
Les appels des dirigeants du MNLA n’ont peut-être pas été vains. Le sous-secrétaire d’Etat américain pour l’Afrique, Johnnie Carson, a affirmé dans une interview réalisée par le site électronique Slate Afrique que «le gouvernement doit tendre la main aux Touareg et aux autres communautés marginalisées dans le nord et de leurs dirigeants qui ne sont pas, je le souligne, des salafistes ou des terroristes».

Le porte-parole installé à Paris

En contrepartie de sa participation à une intervention militaire au Mali, le MNLA souhaiterait déterrer son projet de création de l’Azawad. Les sécessionnistes touareg ont fait quelques concessions : «Nous aspirons à une indépendance culturelle, politique et économique mais pas à la sécession», a déclaré à Reuters par téléphone Ibrahim Ag Assaleh, l’un des dirigeants du MNLA.
Sur le plan international, il est maintenant établi que fin 2011, soit quelques jours avant le projet de «libération» du Nord-Mali, le Quai d’Orsay a secrètement reçu à Paris des responsables du MNLA. Le fait est, par ailleurs, que le porte-parole du mouvement est installé en France. Pour sûr, les Touareg ont perdu en Nicolas Sarkozy un grand allié. On ne sait, pour l’heure, quelle est la position du nouveau locataire de l’Elysée vis-à-vis de ce mouvement.

La position d’Alger envers les sécessionnistes touareg reste aussi très ambiguë. L’émergence d’un Etat touareg à ses frontières n’est guère rassurante pour les dirigeants algériens. La descente aux abîmes du MNLA mènera peut-être ses responsables à changer leur fusil d’épaule. Eux qui avaient signé un pacte avec Ançar Eddine proposent aujourd’hui de les combattre.
La collaboration avec Bamako donnera lieu à des situations cocasses, d’autant que beaucoup de rebelles sont d’anciens soldats ayant déserté l’armée.
Amel Blidi