Discussions ardues entre Bamako et les Touaregs

Le médiateur Blaise Compaoré fait dans les généralités

Discussions ardues entre Bamako et les Touaregs

par Salem Ferdi, Le Quotidien d’Oran, 9 juin 2013

Les négociations entre Bamako et les rebelles touaregs devaient avoir lieu vendredi, elles n’ont commencé que le lendemain. Dans ce qui semble être un jeu psychologique destiné à marquer que le gouvernement malien a un ascendant après la «victoire» d’Anefis, l’émissaire de Bamako Tiébilé Dramé est arrivé avec deux heures de retard et porteur d’exigences de dernière minute. Bamako veut intégrer «en tant que groupes armés du Nord» des milices qui lui sont acquises, le Mouvement arabe de l’Azawad (MAA), et la milice d’autodéfense Ganda Koy. Manu0153uvre un peu grossière pour noyer la représentation du Nord. Inacceptable pour le Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA) et le Haut conseil pour l’unité de l’Azawad (HCUA) qui ont fait savoir qu’ils quitteront la table des négociations si ces milices, liées à Bamako, y prenaient part. Inacceptable également pour le président burkinabé, Blaise Compaoré, médiateur pour l’Afrique de l’Ouest, qui voyait ainsi ses efforts mis délibérément en danger. Et il a dû le faire savoir clairement à l’émissaire de Bamako puisque les négociations ont débuté, samedi, sans les deux milices de Bamako. Le président du Burkina a appelé à une cessation des hostilités qui créerait»les conditions de sécurité indispensables à la tenue d’élections libres et transparentes». Les hostilités ont été relancées à l’initiative de Bamako qui a attaqué des positions du MNLA, à Anefis, au sud de Kidal.

TENTATION GUERRIERE

La tentation de l’armée malienne d’avancer sur Kidal a été, pour le moment, freinée par la France même si cette dernière soutient Bamako et a demandé au MNLA de déposer les armes. Le propos du président burkinabé n’entre pas dans les «détails» et semble laisser les choses à la négociation. Les positions sont connues: le MNLA et le HCUA qui ne sont pas amnésiques ne veulent pas de la présence de l’armée malienne à Kidal mais sont prêts à ce qu’une force de l’Onu s’occupe de la sécurisation du scrutin. Bamako de son côté entend «libérer» Kidal et exige que le MNLA désarme. Derrière ces exigences, il y a l’enjeu politique du statut du nord du Mali. Si le MNLA a renoncé à l’indépendance, il entend bien défendre une autonomie dans le cadre de l’Etat malien, chose que Bamako refuse. Les gesticulations guerrières de ces derniers jours deviennent-ou du moins c’est que le gouvernement malien semble croire-un élément important de la négociation. Le MNLA qui sait que le rapport de forces militaires ne lui est pas favorable, en raison de l’appui de Paris à Bamako, a pris date en refusant de déposer les armes.

Ce sont ces questions qui divisent et que le président du Burkina a prudemment élaguées, en appelant à une entente sur «le redéploiement de l’administration générale, des services sociaux de base, des forces de défense et de sécurité au nord du Mali, et en particulier à Kidal, selon des modalités qui seront négociées».

UN AGENDA IMPLICITE

L’agenda implicite qui découle des propos du chef de l’Etat du Burkina est que la question centrale du statut de l’Azawad ne sera examinée qu’après la tenue de l’élection présidentielle, le 28 juillet prochain, en «vue de l’établissement d’une paix définitive et d’un développement durable et inclusif dans le nord du Mali». Trop vague pour répondre à un problème non résolu depuis cinquante ans et qui a suscité des rébellions régulières. A signaler, par ailleurs, la charge du président du Tchad, Idriss Déby contre la Libye présentée comme un foyer de déstabilisation de la région du Sahel. Il a, au passage, critiqué le MNLA qui n’a pas ««été très coopératif avec nous. Il faut le reconnaître. Ils connaissent très bien les membres rescapés de l’Adrar des Iforas». Les Touaregs sont avertis : ils entament les négociations dans un contexte d’hostilité des Etats de la région.