Mali – Les targuis de Kidal créent le MIA et tentent de tourner la page Iyad Ag Ghaly
Oussama Nadjib, Maghreb Emergent, 25 Janvier 2013
Ansar Eddine était divisé entre un « groupe de Tombouctou » en situation d’osmose avec Aqmi et le Mujao et des notables de Kidal, dans le nord du pays, très soucieux de ne pas envenimer les rapports avec les pays voisins. Cette division est désormais une scission. Les notables de Kidal ont créé le Mouvement Islamique de l’Azawad et semblent avoir tourné la page d’Iyad Ag Ghaly, un homme de la région.
L’annonce de la création du Mouvement islamique de l’Azawad (MIA), issu d’une scission d’avec le groupe islamiste armé Ansar Eddine semble consacrer une rupture au sein du mouvement d’Iyad Ag Ghaly entre des éléments en « osmose » avec les djihadiste et ceux qui cherchent, pour ne pas se couper d’une reconnaissance internationale, à prendre leur distance à leur égard. Entre les Ansar Eddine de Kidal, très sensibles aux appels de l’Algérie et du Burkina à une prise de distance franche à l’égard des djihadistes et ceux de Tombouctou, très liés à Aqmi, les divergences se sont déjà exprimées sur cette question. Les dirigeants d’Ansar Eddine avaient fait des déclarations contradictoires sur la question des liens avec les groupes djihadistes et sur l’accord de « partenariat » conclu à Alger avec le MNLA, au point de paraître de jouer, grossièrement, sur l’ensemble des registres. L’attaque lancée par les djihadistes et Ansar Eddine sur les villes du sud a entrainé une intervention militaire française et une disqualification internationale du mouvement d’Iyad Ag Ghaly. Le groupe de Kidal qui vient d’annoncer la création du MIA a clairement tiré cette conclusion en indiquant vouloir aller vers une « solution pacifique » et en affirmant qu’il se « démarque totalement de tout groupe terroriste, condamne et rejette toute forme d’extrémisme et de terrorisme et s’engage à les combattre ». Le communiqué du MIA, rendu public, jeudi, précise qu’il est composé « exclusivement » de maliens et a demande aux autorités maliennes et françaises d’arrêter les hostilités dans les zones qu’il occupe « à savoir les régions de Kidal et Ménaka [nord-est du Mali] et (pour) créer un climat de paix qui va nous permettre d’aller vers l’établissement d’un dialogue politique inclusif ».
Ag Ghaly sous l’emprise du groupe de Tombouctou
C’est Alghabasse Ag Intalla, originaire Kidal et qui avait négocié au Burkina Fasa dans le cadre de la médiation de Blaise Compaoré qui dirige ce nouveau mouvement islamiste targui. Le communiqué du MIA n’évoque pas Iayd Ag Ghaly, chef du mouvement Ansar Eddine, lui également originaire de Kidal qui passait pour son bastion. Les notables de Kidal ont-ils décidé de se séparer d’une figure devenue encombrante en raison de sa trop grande proximité avec Aqmi. Iyad Ag Ghaly, avait décidé le 3 janvier de retirer l’offre de cessation des hostilités » faite en décembre à Alger. Une annonce qui a précédé une «offensive » vers le sud qui a précipité les évènements. Les dirigeants d’Ansar Eddine de Tombouctou, très liés aux dirigeants d’Aqmi et du Mujao, semblaient avoir une emprise sur Iyad Ag Ghaly et sur le mouvement, et ont ruiné les efforts menées par l’Algérie et le Burkina pour dissocier les islamistes targuis des organisations djihadistes. Le premier communiqué du MIA s’inscrit très clairement dans la démarche politique défendue par le Burkina et Alger et qui a été bousculée par la précipitation des évènements. Mais qui pourrait revenir sur le devant de la scène en raison des inquiétudes qui montent au sujet des exactions qui sont commises par les militaires maliens de retour au nord contre les « peaux claires », les targuis et les arabes, devenus de manière générale des « suspects ».