Un attentat kamikaze au Mali a fait une cinquantaine de morts et 60 blessés
Un attentat kamikaze au Mali a fait une cinquantaine de morts et 60 blessés
Un coup dur pour l’Accord d’Alger
Liberté, 19 janvier 2016
Cette sanglante attaque terroriste intervient à un moment crucial de l’application de l’Accord de paix au Mali et dans un contexte marqué par une multiplication de rencontres internationales sur les moyens de lutter contre le terrorisme dans le Sahel.
Un attentat kamikaze a visé hier un site du Mécanisme opérationnel pour la coordination (MOC) dans la ville de Gao, faisant au moins une cinquantaine de morts et une soixantaine de blessés, selon les médias maliens, citant différentes sources. Un premier bilan avait fait état de la mort de
40 personnes, dans les rangs des ex-rebelles de la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA) et de la Plateforme d’Alger (Pro-Bamako). Les deux camps sont signataires de l’Accord d’Alger et devraient mener des patrouilles mixtes, dans le cadre du processus pour la paix et la réconciliation au Mali, sous-supervision de la mission onusienne, la Minusma, et l’appui des soldats français de l’opération Barkhane. Des soldats de l’armée malienne, qui devaient participer à ces patrouilles, ont aussi péri dans cette attaque au camion piégé, ont rapporté les mêmes sources. “Ce 18 janvier 2017, le site du Mécanisme opérationnel de coordination à Gao a fait l’objet d’un attentat lâche et meurtrier commis par les ennemis de la paix”, a indiqué, pour sa part, la Minusma, dans un communiqué rendu public en début d’après-midi. Le bilan risque d’être revu à la hausse dans les jours à venir. Le président malien, Ibrahim Boubacar Keïta, a décrété un deuil national de trois jours. “L’attaque s’est déroulée ce matin aux environs de 8h15”, a rapporté le portail malien d’information Malijet, soulignant qu’il s’agit d’“un coup dur porté au processus de paix dans notre pays”. Le camp visé abritait au moins 600 éléments armés, selon la Minusma. Le kamikaze a utilisé un véhicule “aux couleurs du MOC”, ce qui a facilité son infiltration dans la ville, a expliqué le colonel Diarran Koné, de la direction de l’information et des relations publiques des armées (Dirpa), cité par l’AFP. Le terroriste “est rentré seul dans la ville, avant de s’équiper et d’équiper le véhicule pour commettre l’attentat-suicide”, a expliqué une autre source sécuritaire, sous le couvert de l’anonymat à l’AFP. Dans un communiqué rendu public, la CMA a affirmé que “cette attaque dénote une faille dans le système de sécurité mis en place pour protéger les combattants sur le site”. Et tout en condamnant “énergiquement cette attaque barbare”, la CMA “dénonce (aussi) le manque de dispositif sérieux pour assurer la sécurité des combattants dans le camp”. L’Algérie, qui préside le Comité de suivi de l’accord de paix au Mali, a condamné “de la manière la plus ferme” l’attentat-suicide hier à Gao (nord du Mali), a rapporté l’APS. “Nous condamnons de la manière la plus ferme l’attaque terroriste meurtrière perpétrée ce jour à Gao (Mali)”, a indiqué le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Abdelaziz Benali Cherif, dans une déclaration à l’APS. “En sa qualité de président du Comité de suivi de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, issu du processus d’Alger, l’Algérie ne ménagera aucun effort pour l’application scrupuleuse et rigoureuse de toutes les dispositions de cet accord en coordination avec l’ensemble des acteurs concernés de la communauté internationale et les partenaires maliens”, a-t-il affirmé. “Ce sont les groupes qui préparent la mise en place des patrouilles mixtes qui sont visés. Il y a un sens politique : empêcher que le processus de paix et de réconciliation se poursuive”, a réagi le ministre français des Affaires étrangères Jean-Marc Ayrault, interrogé, hier, mercredi, par LCP, France Info, Le Monde et l’AFP. “La paix est encore fragile, c’est vrai”, a-t-il ajouté. En effet, l’attentat d’hier intervient quatre jours seulement après la tenue à Bamako du sommet Afrique-France, à l’occasion duquel le président français François Hollande s’était rendu à Gao pour une courte visite dans une base abritant un millier de soldats de l’opération Barkhane.
Les forces françaises avaient, d’ailleurs, affirmé qu’un attentat d’ampleur avait été déjoué à la veille de ce sommet, dont une partie avait été consacrée à la lutte contre le terrorisme et à la stabilisation du Sahel, une région qui suscite aujourd’hui beaucoup d’attention mais aussi beaucoup d’inquiétude, face à la montée de l’insécurité et des groupes terroristes islamistes, à leur tête Al-Qaïda au Maghreb islamique et Boko Haram (Nigeria). Il est à noter qu’une autre attaque a visé un poste de contrôle de l’armée malienne à Goundam, près de Tombouctou, faisant au moins 1 mort et 5 blessés, dont 4 sont dans un état critique, a rapporté la presse locale.
Lyès Menacer