Un sommet arabe routinier à Syrte: Un aveu d’impuissance

Un sommet arabe routinier à Syrte: Un aveu d’impuissance

par M. Saâdoune, Le Quotidien d’Oran, 29 mars 2010

Le sommet de la Ligue arabe de Syrte a pris fin, discrètement, par une séance de clôture très courte et sans déclarations.

Est-ce une soudaine pudeur qui a poussé les dirigeants arabes à renoncer aux microphones pour une séance de clôture écourtée ? Amr Moussa a annoncé que les chefs d’Etats et de gouvernements arabes ont renoncé à leur « droit de parole » et ont distribué les discours par écrit. Voilà qui abrégeait de quelques bonnes heures les souffrances des journalistes et des dirigeants présents à un sommet sans surprise, quasiment routinier dans un contexte proche-oriental qui ne l’est pas. Le 22ème sommet s’est terminé par l’annonce de la tenue d’un autre sommet, extraordinaire, au mois de septembre prochain. Les discussions se sont déroulées essentiellement à huis clos. Les dirigeants ont décidé de créer une commission – composée notamment du Qatar, de la Libye, du Yemen et du secrétariat général de la ligue – qui sera chargée du suivi des travaux du sommet et de développer l’action arabe commune. La seule décision «concrète» – les guillemets ne sont pas superflus – concerne Jérusalem où l’entreprise de purification ethnique d’Israël se poursuit à une cadence accélérée. Les responsables arabes ont décidé de porter le soutien financier aux Fonds d’Al-Aqsa et de Jérusalem à 500 millions de dollars. On peut douter que le salut de Jérusalem, capitale présumée du futur Etat palestinien présumé, soit une question d’argent. Mais même sur ce registre, théoriquement facile pour les riches pays arabes, les 500 millions sont une goutte d’eau comparativement aux milliards de dollars de sources multiformes – y compris étatiques – qui se déversent annuellement pour soutenir l’entreprise de judaïsation des territoires palestiniens.

Promesses, promesses !

Au demeurant, les Arabes ont bien promis des centaines de millions de dollars pour la reconstruction de Ghaza qui n’arrivent toujours pas. Ce n’est pas les fonds qui manquent mais la volonté politique. Le souci de ne pas déplaire à Washington – et donc à Israël – annule pratiquement les promesses. Théoriquement, face à une population en danger, on agit. Or s’il y a eu de «l’action», elle a consisté en l’édification d’un mur d’acier souterrain entre Ghaza et l’Egypte pour que même l’alimentation et les médicaments ne passent pas. L’annonce d’une contribution financière d’un demi-milliard de dollars n’est pas de nature à «contrecarrer les plans israéliens» à Jérusalem. La résolution, n’a pas été adoptée en séance plénière pour ne pas donner à voir l’état des divergences. Si la résolution « exige » un arrêt total de la colonisation avant toute reprise des négociations avec les Palestiniens, elle demande aussi à un président Barack Obama, bien impuissant face à la puissance du lobby israélien à Washington, de continuer à œuvrer dans ce sens. « La reprise des négociations requiert l’arrêt total des activités de colonisation israéliennes dans les territoires palestiniens occupés, y compris à Jérusalem-Est » indique la résolution qui souligne l’impératif de fixer « un calendrier précis » pour ces négociations en cas de reprise. Elle appelle le président Obama à rester « attaché à sa position initiale clé appelant à l’arrêt total de la politique de colonisation dans l’ensemble des territoires occupés, y compris à Jérusalem, de même que (la construction liée à) la croissance naturelle» dans les colonies.

Processus de paix ? Quel processus ?

La résolution appelle, le très peu actif Quartette pour le Proche-Orient (Etats-Unis, Union européenne, Russie, ONU) de « faire pression sur Israël pour un arrêt total de la colonisation». Ces appels à Obama et au Quartette confirment que le sommet de Syrte, comme nombre de ceux qui l’ont précédé, est celui de l’inaction. On continue de s’en remettre à la bonne volonté de l’administration américaine, laquelle ne dispose d’aucune marge d’action au vu de la très forte influence du lobby sioniste sur l’establishment politico-médiatique américain. La seule idée, intéressante, d’Amr Moussa, secrétaire général de la Ligue arabe, a consisté en l’appel à la mise en place d’un forum pour la coopération régionale et la résolution des conflits avec l’Iran et la Turquie. Elle a été vite rejetée par les Egyptiens particulièrement « vigilants » à ne pas contrarier l’entreprise israélo-américaine d’isolement de l’Iran. Le même Amr Moussa avait des interrogations quasi-métaphysiques en indiquant que « nous devons étudier la possibilité que le processus de paix soit un échec complet. Il est temps de faire face à Israël. Nous devons préparer des projets alternatifs parce que la situation est arrivée à un tournant ». M.Moussa et les dirigeants arabes savent déjà que le « processus de paix » engagé depuis Oslo est un échec total. Le vrai problème est qu’ils ne conçoivent pas d’autres alternatives que de s’en remettre à une administration américaine velléitaire et sur le fond totalement complice d’Israël.