Sommet arabe aujourd’hui au Qatar
Sommet arabe aujourd’hui au Qatar
Le poids des divergences
El Watan, 30 mars 2009
Un sommet arabe ordinaire s’ouvre aujourd’hui dans la capitale du Qatar avec un ordre du jour qui rappelle ceux des années précédentes avec toujours en tête des questions récurrentes, mais aussi pesantes qui empêchent de parler d’unité arabe et d’envisager la moindre perspective.
Ce qui confère à cette rencontre un caractère extraordinaire, mais aussi des allures de défi, puisque pas moins de trois points à l’ordre du jour, finalisé samedi par la réunion ministérielle préparatoire, sont justement consacrés à la situation interne au Monde arabe. Y figurent « notamment les relations interarabes, l’assainissement du climat arabe, la réalisation de la réconciliation arabe, outre la définition de positions arabes communes face aux défis qui se posent à la nation arabe », a indiqué une source officielle. Ce qui n’est pas peu et d’ailleurs tout l’enjeu est là, avec d’aussi évidentes contradictions comme celle qui est à l’origine de l’absence du chef de l’Etat égyptien. Plus que cela, l’Egypte a décidé de se faire représenter par son ministre des Affaires juridiques et des parlementaires. Ce qui à vrai dire laisse très peu de place aux autres thèmes qui eux, parce qu’ils dépendent étroitement de ces fameuses questions internes, ont peu de chance d’être abordés, sinon recevoir l’importance qu’ils méritent. Très officiellement donc, ce sommet examinera aussi plusieurs questions dont la cause palestinienne, l’évaluation des efforts consentis pour l’unification du front palestinien, le conflit arabo-israélien, la relance de l’initiative arabe de paix, outre la question du Golan syrien occupé, la solidarité avec le Liban, le soutien à la Somalie et la situation au Darfour. Le sommet se penchera aussi sur le rétablissement de la sécurité dans la région et faire du Proche-Orient une région exempte d’armement nucléaire. Le sommet examinera le renforcement des relations arabes avec les regroupements régionaux et internationaux, dont la coopération arabo-africaine, la coopération arabo-européenne et la coopération des pays arabes avec ceux de l’Amérique du Sud et la Chine.
Figurent également à l’ordre du jour du sommet de Doha les questions économiques soumises par le Conseil économique et social arabe, notamment celles liées au suivi de l’application des décisions du 1er sommet économique et de développement tenu en janvier dernier au Koweït, conclut le communiqué. Rien que du très classique, même si cela correspond effectivement aux enjeux stratégiques actuels, mais pas tous, il est vrai. Au total, 15 des 22 membres de la Ligue arabe devront être représentés par leurs chefs d’Etat à Doha, la délégation algérienne sera conduite par Mourad Medelci, ministre des Affaires étrangères. Admettant la persistance de divergences, le ministre syrien des Affaires étrangères, Walid Mouallem, a estimé à l’ouverture de la réunion ministérielle préparatoire qu’« il faudrait les gérer dans le cadre d’un mécanisme à convenir », sans plus de détails. Et pour cause, il ne pouvait pas s’avancer sur ce terrain, se contentant de déplorer une situation qui ne fait que durer. « Nous devons être à la hauteur de nos responsabilités et œuvrer pour un resserrement des rangs », a renchéri le Premier ministre et ministre des Affaires étrangères du Qatar, cheikh Hamad ben Jassem Al-Thani. Cheikh Hamad a averti que les peuples arabes « attendent que nos paroles soient suivies d’actes », des propos déjà entendus et même depuis longtemps sans que la question de l’unité arabe en bénéficie. En fait, de simples discours qui évoquent le marasme actuel sans en indiquer la sortie et le remède. L’idée d’amender la charte de la Ligue des Etats arabes afin d’instituer des sommets ordinaires réguliers ne manquait pas de pertinence, sauf qu’il n’est plus possible de vivre de simples discours et occulter la réalité arabe. Celle-ci revient avec la régularité des sommets.
En ce qui concerne la question de l’Egypte, des sources diplomatiques au Caire ont expliqué que ce pays reproche au Qatar ses « positions anti-égyptiennes, tout particulièrement durant l’agression israélienne » à Ghaza (27 décembre-18 janvier). Le Premier ministre qatari a dit qu’il « respectait la décision (du Caire) sur le niveau de sa représentation », ajoutant toutefois, en réponse à une question, que le Qatar « ne sollicite l’autorisation de quiconque pour ses relations avec l’Iran ou d’autres pays ». La tenue en janvier à Doha d’un mini-sommet arabe sur Ghaza, auquel le Qatar a convié le président iranien, Mahmoud Ahmadinejad, et le chef du Hamas en exil, Khaled Mechaal, a été vivement critiquée dans le camp arabe anti-Hamas. « Nous nous sommes repentis. Il n’y aura pas de Hamas ou d’Ahmadinajed » au sommet qui s’ouvre aujourd’hui, a dit cheikh Hamad. Evoquant la question de la réconciliation interarabe, il a estimé que les « divergences des points de vue » ne devraient pas conduire à une interruption du dialogue, en allusion implicite à l’Egypte. Voilà donc où en est le Monde arabe. Un bref état des lieux laisse apparaître des dissensions. Le problème c’est que cela n’est pas nouveau. On en parle depuis des décennies, mais celles-ci n’ont fait que s’amplifier. A ce rythme, il devient difficile de parler d’autre chose. Il y a des questions qu’il faut régler préalablement.
Par T. Hocine