Sommet de la ligue arabe: Sous l’œil scrutateur de Washington
SOMMET DE LA LIGUE ARABE
Sous l’œil scrutateur de Washington
Le Quotidien d’Oran, 17 mars 2005
Alger abrite depuis hier une réunion des délégués permanents et hauts responsables des Etats de la Ligue arabe dont la mission est de baliser définitivement les recommandations devant résulter du sommet des chefs d’Etats prévu pour les 22 et 23 mars prochains.
Arrivés mardi dans l’après-midi à Alger, le secrétaire général de la Ligue arabe, les délégués permanents des Etats membres ainsi que de hauts responsables arabes se sont enfermés depuis hier à l’hôtel Hilton pour examiner les questions auxquelles le Conseil des ministres des Affaires étrangères devra donner une forme définitive, afin de les remettre aux dirigeants arabes dont le sommet est prévu mardi et mercredi prochains au Palais des Nations. Il faut admettre qu’en ce qui concerne l’ordre du jour de cet important rendez-vous ainsi que les résultats qui doivent en découler, tout a été arrêté et défini au préalable et sur plusieurs étapes. C’est ce qu’a confirmé Abdelkader Hadjar, le délégué permanent de l’Algérie auprès de la Ligue arabe, à l’ouverture de la réunion qu’il préside depuis hier à l’hôtel Hilton. «Le travail accompli au niveau des ministres des Affaires étrangères, des délégués permanents et du secrétariat général de la Ligue arabe a permis de lever tous les obstacles et de régler tous les différends» a-t-il dit, en prenant le soin de noter que «nous nous sommes déjà mis d’accord sur toutes les décisions qui seront soumises au sommet durant les réunions préparatoires précédentes». La réunion qu’il préside est en fait consacrée «à la lecture des textes qui seront soumis aux ministres arabes puis aux chefs d’Etat».
L’ordre du jour du sommet d’Alger s’axe précisément sur la création d’un parlement arabe, la mise en place d’un mécanisme de suivi et d’application de décisions et l’amendement du mode de vote.
Il est donc admis que le sommet d’Alger ne créera pas de véritables surprises, du moins en ce qui concerne ces points précis à partir du moment qu’ils ont déjà été approuvés par la majorité des Etats membres de la Ligue arabe. L’on ne parle même pas de résolutions importantes à cet effet, mais juste de recommandations. Restent les questions d’actualité qui feront certainement l’objet de pourparlers entre les participants au sommet d’Alger, même si le secrétaire général de la Ligue arabe a d’ores et déjà mis des balises à certaines d’entre elles. Amr Moussa a en effet affirmé, hier, en ce qui concerne la crise syro-libanaise, que «Damas ou Beyrouth n’ont pas fait l’objet d’une demande officielle d’inscription à l’ordre du jour du sommet arabe d’Alger». Il a précisé que «cette question est posée à travers des consultations qui ont eu lieu entre les ministres des Affaires étrangères syrien, égyptien, saoudien, libanais et algérien». D’autres sources qui se sont confiées à l’AFP admettent le fait que «ce dossier serait, en dépit de son absence, présent dans les travaux du sommet». Il est évident que pour une fois que la grande majorité des chefs d’Etats et souverains arabes se retrouvent ensemble, les questions qui secouent le monde arabe soient posées dans toute leur ampleur. La présence confirmée des présidents syrien et libanais au sommet d’Alger précise davantage cette évidence, notamment celle de mettre sur la table du sommet, le dossier syro-libanais. «La concertation permanente entre les dirigeants arabes offrira une base solide pour préserver et promouvoir la position arabe, notamment après de nombreux évènements qui ont suivi le sommet de Tunis (et) qui exigent une position commune qui préserve nos droits légitimes et renforce notre position face aux défis régionaux et internationaux», a dit le président libanais Emile Lahoud dans un message de remerciements qu’il a adressé au président algérien. Il est reconnu cependant dans les milieux diplomatiques qu’à partir du moment où les deux Etats se sont entendus sur un calendrier d’un redéploiement et plus tard d’un retrait définitif des troupes militaires syriennes des territoires libanais, le dossier appelle d’autres questions qui doivent être impérativement abordées à Alger.
L’on évoque particulièrement l’après-retrait syrien et le développement de la situation au Liban après l’assassinat de l’ex-Premier ministre, Rafik Hariri, et l’intensité et surtout la forme des pressions qu’Américains et Israéliens décideront d’exercer sur Damas. Les dirigeants arabes ont prévu dans ce même ordre d’idées de se pencher sur le conflit israélo-arabe, les questions palestinienne, irakienne, soudanaise et somalienne.
A l’issue de sa rencontre, hier, avec Abdelaziz Belkhadem, Amr Moussa a déclaré que »nous avons examiné lors de cette rencontre toutes les mesures relatives à ces réunions (au niveau des délégués permanents et du sommet) et nous avons échangé les vues sur certaines questions ayant trait au suivi de plusieurs questions politiques». Moussa a fait part ainsi de l’existence d’une coordination entre l’Algérie en tant que pays hôte du sommet et le secrétariat général «pour les étapes à venir, le suivi et les réunions qui succéderont au sommet». Les entretiens, hier, entre le président de la République, Abdelaziz Bouteflika, et le ministre saoudien des Affaires étrangères, Saoud El-Fayçal, constituent un autre acte de concertation entre Etats arabes autour de questions dont les solutions restent à initier. Celle irakienne en constitue inévitablement une à partir du moment où les conséquences de la colonisation de ce pays par les Américains pèsent lourdement sur l’ensemble du monde arabe. Spéculation, rumeur ou simple fait médiatique à vérifier, la présence à l’ouverture du sommet de Condoleezza Rice, chef de la diplomatie américaine, est donnée pour acquise. En tout état de cause et même sans cette présence, le sommet d’Alger se déroulera sous l’oeil scrutateur de Washington.
Ghania Oukazi