Reprise des négociations directes palestino-israéliennes: L’échec annoncé ?
Reprise des négociations directes palestino-israéliennes
L’échec annoncé ?
El Watan, 2 septembre 2010
On peut déjà dire du président américain qu’il a réussi une première manche dans sa volonté annoncée, alors qu’il était encore président élu, d’aider au règlement de la question palestinienne, mais elle peut être l’unique et la dernière, si jamais Israël persistait dans sa politique de blocage de tout processus de paix.
Tout d’ailleurs laisse croire que cela pourrait être le cas, pourtant, constate-t-on, il y a une unanimité internationale autour de la démarche américaine, portée quant à elle par un discours nouveau. C’est en effet la première fois depuis la création d’Israël en 1948 qu’un président américain considère que la poursuite du conflit du Proche-Orient constitue une menace pour les intérêts des Etats-Unis. Et c’est pourquoi que les Palestiniens en premier, et c’est ce qui explique très certainement leur accord pour ce nouveau round malgré le lourd pessimisme, attendent beaucoup de la position américaine dans ce processus qui s’ouvre solennellement aujourd’hui à Washington. On ne semble pas faire attention aux déclarations du premier ministre israélien, et les Etats-Unis paraissent plutôt prudents. «Nous avons tout à fait à l’esprit la position palestinienne», a déclaré un haut fonctionnaire. Ce qui pose la question du plan.
Les Américains en ont-ils un ? Que sera ce processus plus précisément ? Comme ceux de Wye Plantation en 1998, de Camp David en 2000 et d’Annapolis en 2007, qui n’ont fait que creuser le fossé entre Palestiniens et Israéliens et, plus généralement, entre ceux qui croient à la négociation, comme le revendique encore le président palestinien Mahmoud Abbas, et ceux des Palestiniens qui n’y ont jamais cru ? Pressés eux aussi par leur propre opinion, et appréhendant très certainement une plus grande déroute lors des prochaines élections générales, les Etats-Unis ont emprunté une autre voie, celle du oui ou non.
«Intérêt vital» des Etats-Unis
En ce sens qu’ils ont fait savoir qu’ils étaient prêts à se retirer de ce processus si rien n’en sortait. Ils ont même rappelé aux Israéliens une logique toute simple, même si les mots sont bien choisis. Ainsi, ont-ils déclaré, Israël doit choisir entre la paix et la colonisation, étant entendu que ce dernier processus, pourtant dénoncé par la communauté internationale, constitue un acte de guerre. Toute la question est là. Qu’est-ce qui sera négocié ? Et même si le principe est admis, quel espace pour l’Etat palestinien ? Celui que les Israéliens accepteront de céder aux Palestiniens, et là, il y a manifestement maldonne ? Avec quelles attributions ? On n’en est pas encore là, car il faut encore affronter le chantage israélien.
En effet et alors que les participants se préparaient à rallier la capitale américaine, Benjamin Netanyahu faisait savoir qu’il n’a pas promis aux Etats-Unis la poursuite du gel partiel de la colonisation en Cisjordanie. Il faisait allusion à l’expiration, le 26 septembre, du moratoire de dix mois sur la construction de logements dans les colonies de Cisjordanie et ce, dans le même intervalle que «plusieurs milliers» de logements, ayant obtenu toutes les autorisations légales nécessaires, pourraient commencer à être construits dès le 27 septembre dans 57 colonies pour le secrétaire général de la paix, maintenant, un mouvement opposé à la colonisation, le «gouvernement israélien n’avait aucune intention réelle de parvenir à une solution de deux Etats pour deux peuples». Une conclusion et même une conviction largement partagée à travers le monde. Serait-ce alors la chronique d’un échec annoncé ? Quelles en seront les conséquences et qui les assumera ? Les Palestiniens excédés par ces tapes sur l’épaule, qui n’ont rien d’amicales et autres mondanités, ont déjà fixé les limites de ces négociations. A aucun moment, ils n’ont parlé des guerre, mais ils refusent de servir d’alibi.
Mohammed Larbi
Les grands dossiers
Dix-sept ans après le lancement du processus de paix israélo-palestinien à Oslo, les positions de départ des deux parties demeurent très éloignées, bien que les contours d’un accord de paix soient largement connus.
1) Création d’un Etat palestinien et ses pouvoirs :
Les Palestiniens veulent proclamer un Etat souverain sur l’ensemble des territoires palestiniens occupés par Israël en juin 1967: El Qods-Est, toute la Cisjordanie et la bande de Ghaza, conformément aux resolutions de l’ONU, retenues d’ailleurs comme base de négociations lors de la conférence internationale de Madrid initiée par les Etats-Unis en 1991.
2) Tace des frontières de l’Etat palestinien :
Les Palestiniens exigent un retrait israélien de tous les territoires occupés depuis 1967, mais sont disposés à accepter des modifications frontalières mineures sur la base d’échanges de territoires équivalents avec Israël. Israël exclut catégoriquement un retour aux frontières d’avant 1967, mais est prêt à des retraits en Cisjordanie. Un retrait à sa convenance.
3) Statut d’El Qods :
L’Autorité palestinienne veut faire d’El Qods-Est, dont l’annexion n’a jamais été reconnue par la communauté internationale et où vivent 260 000 Palestiniens et plus de 200 000 Israéliens, la capitale de son Etat.
4) Sort des réfugiés :
Il y a plus de quatre millions de réfugiés palestiniens, en grande majorité des descendants des quelque 700 000 Palestiniens ayant fui ou été chassés de leur terre à la création de l’Etat d’Israël en 1948. Les Palestiniens exigent qu’Israël reconnaisse un droit au retour des réfugiés dans ses frontières, conformément à la résolution 194 de l’Assemblée générale de l’ONU. Le Premier ministre Benjamin Netanyahu veut que les Palestiniens reconnaissent Israël «comme l’Etat du peuple juif» afin, selon lui, de garantir que la question des réfugiés sera résolue dans le cadre du futur Etat palestinien.
5) Controle des ressources en eau :
Israël se réserve une grande partie des nappes phréatiques dans le sous-sol de la Cisjordanie. Les Palestiniens réclament un partage équitable.
Un délai raisonnable
Les Etats-Unis ont jugé «réaliste» mardi de voir aboutir d’ici un an le processus de paix entre Israéliens et Palestiniens, et estimé qu’une «fenêtre de tir» existait pour une solution à deux Etats, avant la reprise des négociations directes à Washington.
«Nous pensons que c’est réaliste», a déclaré l’envoyé spécial américain au Proche-Orient, George Mitchell. «Nous pensons que cela peut être fait.» M. Mitchell a concédé que cet optimisme était loin d’être partagé par tous. «Nous reconnaissons qu’il y a beaucoup de gens, certains très savants, qui sont d’un avis contraire, et il y a aussi des gens qui disent très clairement que ce n’est pas possible et que ça ne devrait même pas être tenté, des deux côtés», a-t-il dit. «Mais à mon sens, ce qui est important en fin de compte, c’est ce qui est le mieux pour les Israéliens et les Palestiniens», a affirmé M. Mitchell, qui a effectué des navettes incessantes depuis sa nomination, il y a 18 mois, pour tenter de renouer les fils du dialogue entre les deux parties. «Et je pense que l’on peut défendre l’idée claire et solide (…) qu’une solution pacifique mettant fin à ce conflit, à toutes les revendications, et qui crée un Etat palestinien viable (…) vivant pacifiquement à côté d’Israël est dans leur meilleur intérêt», a argumenté M. Mitchell. «L’alternative à cela, la possibilité d’un conflit qui continuerait à l’avenir sans perspective de fin, est bien plus problématique», a-t-il dit.
«Présence active» des Etats-Unis
Washington aura une «présence active et soutenue» lors des négociations directes entre Israéliens et Palestiniens, a affirmé mardi l’envoyé spécial au Proche-Orient, George Mitchell, assurant que ce dossier constituait une «grande priorité» du président Barack Obama.
S’exprimant avant la reprise formelle des négociations directes entre le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu et le président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas, M. Mitchell a affirmé que les Etats-Unis définissaient leur rôle comme «une présence active et soutenue». «Cela ne veut pas dire que les Etats-Unis doivent être représentés dans chaque rencontre en particulier. Nous reconnaissons l’importance des discussions bilatérales entre les parties, et nous les encourageons», a déclaré M. Mitchell face à des journalistes à la Maison-Blanche. «Cependant, cela ne veut pas dire non plus que les Etats-Unis resteront en marge et ne participeront pas activement. Nous opérerons de façon raisonnable et sensée, selon les circonstances», a-t-il assuré.
Interrogé sur la question d’une implication directe du président Obama dans ces pourparlers, M. Mitchell a remarqué que «le président a été engagé personnellement (dans ce processus) depuis le tout début». «Je suis certain que le président effectuera une évaluation sur la base des circonstances à ce moment-là (pour savoir) s’il est raisonnable et nécessaire qu’il y participe», a ajouté l’envoyé spécial. Le président Obama «a beaucoup, beaucoup d’obligations importantes, mais une paix complète au Proche-Orient constitue une grande priorité pour lui», a assuré M. Mitchell.
Une vision globale
Les Etats-Unis essaient toujours de lancer des négociations de paix entre Israël, d’une part, et la Syrie et le Liban, d’autre part, a affirmé mardi l’envoyé spécial américain pour le Proche-Orient, George Mitchell.
«En ce qui concerne la Syrie, nos efforts continuent pour essayer de faire en sorte qu’Israël et la Syrie s’engagent dans des discussions et des négociations qui conduiraient à une paix» entre ces deux pays, «ainsi qu’entre Israël et le Liban», a déclaré M. Mitchell. La Syrie et le Liban sont les deux seuls pays arabes voisins d’Israël à ne pas avoir signé de traité de paix avec l’Etat hébreu. Mais M. Mitchell a réitéré mardi la volonté du président américain Barack Obama de parvenir à une paix dans toute la région, et pas seulement entre Israéliens et Palestiniens. «Lorsque le président a annoncé ma nomination, deux jours après son arrivée au pouvoir, il a parlé d’une paix totale, et l’a définie comme une paix entre Israël et Palestiniens, Israël et la Syrie, Israël et le Liban, et Israël en paix avec tous ses voisins arabes, et cela reste notre objectif», a souligné l’envoyé spécial.