Désarmement: 56 Etats à la conférence de Téhéran

Désarmement: 56 Etats à la conférence de Téhéran

par Notre Envoyée Spéciale A Téhéran: Ghania Oukazi, Le Quotidien d’Oran, 19 avril 2010

Plus de 56 Etats sont représentés à la conférence internationale sur le désarmement qu’abrite Téhéran dont certains le sont par leur ministre des Affaires étrangères. C’est le cas de la Syrie, du Liban, de l’Irak et du sultanat d’Oman.

Les observateurs reconnaissent que l’Iran a réuni à cette conférence «tous les pays qui ont un rôle, des positions claires et des principes en matière de désarmement, notamment ceux de l’Asie, d’Afrique et d’Amérique Latine». Il est surtout admis que «le choix des politiques iraniens est sélectif». L’Iran tente de ramener à lui les pays qui lui serviront d’appui pour s’imposer en tant que nouvelle force dans la région. Ses velléités de paraître, en outre, comme acteur incontournable dans le règlement des conflits dans la région, entre autres l’Afghanistan et l’Irak, ne sont plus à démontrer. Si ses invitations à la conférence ont été sélectives, elles l’ont été tout autant que celles des Etats-Unis pour le sommet de Washington. L’Iran en a bien été exclu. L’on susurre dans les coulisses que la présence des Occidentaux n’était pas du tout désirable. Mais dans son allocution d’ouverture, le ministre iranien des Affaires étrangères, Mouchaher Moutaki, a fait savoir à l’assistance que son pays a transmis des invitations à plusieurs pays européens mais qu’ils n’ont pu faire le déplacement après l’éruption du volcan en Islande. Moutaki s’attend à ce que certains d’entre eux puissent venir aujourd’hui. L’on remarquera cependant, la présence du représentant du royaume d’Autriche. Mais l’on s’empresse vite de souligner que l’Autriche reste ce pays européen qui est foncièrement contre les armes nucléaires. La présence des vice-ministres russe et chinois a été fortement remarquée et commentée. Elle consacre une signification politique importante à l’événement. Elle rappelle surtout que les discussions et les négociations internationales sur le désarmement nucléaire se font selon les intérêts politiques, économiques et géostratégiques des puissants de ce monde.

«Israël pollue le Moyen-Orient»

L’entrée des délégations au centre international des conférences situé au nord de Téhéran a été faite sous très haute surveillance. Il faut dire que la présence du président iranien à l’ouverture de la conférence a obligé à la mise en place d’un dispositif sécuritaire impressionnant.

Après l’hymne national et les versets coraniques, les travaux ont été ouverts par le MAE iranien, Moutaki. C’est Ali Akbar Wilayati, haut conseiller du guide suprême de la révolution, qui prendra la parole avant Ahmadinejad. Il énumérera «les bienfaits de l’utilisation pacifique du nucléaire pour répondre aux vastes besoins de l’humanité dans le domaine médical, industriel et économique.» C’est dire, souligne-t-il, que «l’enjeu est bien grand pour permettre aux peuples de bénéficier de ce droit et de l’exploiter pour le bien des générations futures.» Il estime qu’Israël pollue la région du Moyen-Orient et sa détention de plus de 200 têtes nucléaires avec ce que détiennent des Etats-Unis et ce que stockent beaucoup d’autres pays comme armes nucléaires fait peser une menace permanente sur le monde. En tant qu’autorité religieuse, il se fera un devoir de souligner que l’islam interdit la fabrication de l’arme nucléaire. Le président Ahmadinejad lui succédera à la tribune pour recommander à ce qu’Israël soumette ses installations nucléaires à l’inspection de l’AIEA. Pour lui, aucun signe d’amélioration en matière de désarmement ou de sécurité dans le monde n’est perceptible. «Le Conseil de sécurité n’a pas réussi dans sa tâche de sécuriser l’humanité», a-t-il soutenu. «L’AIEA n’a pas elle aussi réussi dans sa tâche d’empêcher les Etats de moderniser leur arsenal nucléaire.» Pour lui, l’AIEA, «au lieu de désarmer, s’est transformée en levier d’oppression contre les Etats en les privant de leur droit légitime d’utiliser pacifiquement le nucléaire.» Un droit qui permettra aux nations de détenir la technologie et de se développer. «Les Etats-Unis le savent mais refusent de l’admettre pour empêcher les peuples de se développer», a-t-il affirmé. Si, a-t-il ajouté, les Américains ont gagné la guerre mondiale, ils ont aussi facilité les moyens de multiplication des armes nucléaires qui ont atteint aujourd’hui plus de 20.000 têtes dont près de 2.500 sont dirigées sur des objectifs vitaux pour le monde entier.

«Nous avons enrichi l’uranium devant les caméras de l’AIEA»

Ahmadinejad rappelle que les Etats-Unis non seulement ont utilisé l’arme nucléaire mais menacent de l’utiliser encore, allusion faite aux dernières déclarations d’Obama à ce propos. Son message aux Américains, «ils doivent savoir que l’époque de l’arme nucléaire est révolue, le recours à cette arme et leurs menaces montrent leur fausseté.» Se plaçant dans une perspective géostratégique nouvelle, Ahmadinejad déclare que «l’avenir appartient aux peuples bien vaillants et purs.» Il rappelle que le slogan de la conférence de Téhéran le montre bien. «La technologie nucléaire pour tous, l’arme nucléaire pour personne,», scandent les Iraniens. Entre autres propositions formulées par le président iranien, la révision du TNP doit être réalisée par des pays indépendants ne détenant pas l’arme nucléaire «parce que les autres empêcheront la conclusion d’un accord juste et équitable.» Il propose de modifier la structure du Conseil de sécurité «qui est injuste et illégale au profit des pays atomiques.» Il veut que le droit de veto soit aussi détenu par des pays d’Asie, d’Afrique «pour créer une confiance.» Aux journalistes, le représentant iranien à l’AIEA précisera que «cette réunion est un message à Washington pour dire que l’Iran œuvre pour changer les choses.» A une question d’un confrère du Jeune Indépendant sur l’enrichissement de l’uranium, Soltani répond «nous avons enrichi de l’uranium à 20%, on l’a fait et on le fera encore, nous l’avons fait devant les caméras de l’AIEA.» Le chef de la sécurité iranienne, Jalali, a remis en cause la lutte des Américains contre le terrorisme en les qualifiant d’incapables pour le faire. «Comment l’humanité peut-elle leur faire confiance», s’est-il interrogé. Il fera savoir que l’Iran organisera dans trois mois une réunion ministérielle sur le terrorisme «pour situer le véritable terrorisme dans le monde.» Les Iraniens sont convaincus que la plus grande menace terroriste et nucléaire dans le monde est le régime sioniste.