Les deux diplomates ont été froidement exécutés

Le film du kidnapping

El Watan, 28 juillet 2005

Jeudi 21 juillet 2005. Une source du ministère de l’Intérieur irakien annonçait l’enlèvement de deux diplomates algériens : le chargé d’affaires Ali Belaroussi et Azzedine Belkadi, à Baghdad, par des inconnus.

Les deux diplomates se trouvaient à bord d’une Land Cruiser quand ils ont été enlevés vers 14h10 (11h10, heure d’Alger) par des hommes armés à bord de deux voitures, à 100 m de l’ambassade, a indiqué cette source. Les ravisseurs ont enfermé les deux diplomates dans le coffre de leurs voitures immatriculées dans la province d’Al Anbar, dans l’ouest du pays, a ajouté cette source. A Alger, première réaction des autorités. Abdelaziz Belkhadem, ministre d’Etat, représentant personnel du président Abdelaziz Bouteflika, a sévèrement condamné cet enlèvement, tout en faisant part de son étonnement. « On ne trouve aucune explication. Rien n’explique cet enlèvement d’autant plus que nous avons des liens de fraternité avec le peuple irakien (….). Nous avons soutenu l’intégrité de l’Irak avec laquelle nous avons toujours entretenu des relations exemplaires », a-t-il déclaré après la mise en place d’une cellule de crise au ministère des Affaires étrangères. Le lendemain, vendredi, le ministère des Affaires étrangères irakien déclarait à l’AFP ne disposer d’aucune nouvelle des deux diplomates. 24 heures plus tard, samedi 23 juillet, le groupe du chef d’Al Qaîda en Irak, Abou Moussab Al Zarqaoui, diffusait un message sur un site internet dans lequel il revendiquait leur enlèvement. Ce qu’avait félicité, quelques heures après, le Groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC) dans un communiqué publié sur un site internet. « Les moudjahidine en Algérie ont accueilli avec une grande joie l’information relative à l’enlèvement des diplomates algériens (Ali Belaroussi et Azzedine Belkadi) par leurs frères dans l’organisation Al Qaîda en Mésopotamie », affirmait le texte du GSPC. Lundi 25 juillet. Un responsable du ministère de l’Intérieur irakien annonçait l’arrestation de deux suspects liés au rapt des deux diplomates. « Nous avons arrêté deux suspects liés à l’enlèvement de deux diplomates algériens et nous avons mis en place un comité d’enquête pour les interroger », a affirmé le général Hussein Ali Kamal, adjoint du ministre de l’Intérieur chargé du renseignement. Le même jour, Bachir Belhadj, dernier diplomate qui se trouvait encore à l’ambassade d’Algérie à Baghdad, et Mme Belaroussi, épouse de l’un des deux diplomates enlevés, ont été rapatriés vers Alger et Amman. De Londres où il se trouvait le même jour, Mohamed Bedjaoui, ministre des Affaires étrangères, déclarait faire « tout ce qu’il peut » pour obtenir la libération des deux diplomates. « Le gouvernement ne se croise pas les bras. Je ne peux pas évidemment vous dire à l’heure actuelle ce qu’il est en train de faire, mais il fait tout ce qu’il peut faire pour que les deux ressortissants puissent être libérés », a indiqué le ministre. Mais 24 heures après cette détermination affichée par le gouvernement – mardi 26 juillet -, Abou Moussab Al Zarqaoui annonçait sur internet qu’il tuerait les deux diplomates, montrés par la même occasion sur vidéo mise on line les yeux bandés. « Le tribunal islamique de l’organisation Al Qaîda en Mésopotamie a décidé d’appliquer le verdict divin aux deux émissaires diplomatiques du gouvernement algérien apostat, le chargé d’affaires Ali Belaroussi et l’attaché diplomatique Azzedine Belkadi, et de les tuer », lisait-on, avant-hier, dans un communiqué d’Al Qaîda. Peu après, dans un texte diffusé sur internet, le GSPC demandait alors aux ravisseurs des deux diplomates de les interroger « en images ». Le GSPC précisait dans son texte, « une lettre urgente aux combattants de la terre de Mésopotamie », que les deux diplomates pourraient faire des révélations sur le Pouvoir algérien et « montrer la laideur de son image à ceux qui l’ignorent ». M. Belkhadem, qui intervenait sur les ondes de la Chaîne III, avait réitéré que « le gouvernement algérien tente toutes les possibilités et utilise toutes les pistes pour faire toute la lumière sur cette affaire et les libérer sains et saufs ». Alors que la famille de M. Belaroussi demandait aux ravisseurs de libérer les deux otages, hier vers 14h46, Abou Moussab Al Zarqaoui annonçait sur internet avoir exécuté les deux diplomates.

Rabah Beldjenna

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Les deux diplomates ont été froidement exécutés

Al Qaîda s’attaque à l’Algérie

L’organisation d’Al Qaîda en Irak a annoncé hier, sur internet, avoir tué Ali Belaroussi, 62 ans, chargé d’affaires à l’ambassade d’Algérie à Baghdad, et Azzedine Belkadi, 47 ans, attaché diplomatique.

« Vos frères dans la branche militaire de l’organisation Al Qaîda en Mésopotamie (Irak) ont procédé mercredi 27 juillet à l’application du verdict du tribunal islamique (…). Le président de la mission diplomatique algérienne Ali Belaroussi et l’attaché diplomatique Azzedine Belkadi ont été ainsi tués », indique un communiqué, dont l’authenticité n’est pas vérifiée, mis en ligne sur un site fréquemment utilisé par Al Qaîda. Le groupe d’Al Zarqaoui, chef d’Al Qaîda en Irak, a justifié cet assassinat par la non-application par l’Algérie de la charia, « le soutien aux juifs et aux chrétiens » en Irak et « l’effusion du sang des musulmans » en Algérie. « Ce sont deux émissaires de l’Etat algérien, qui n’applique pas la charia et qui s’est allié aux juifs et aux chrétiens. Il les a envoyés pour soutenir les bases des juifs et des chrétiens en Mésopotamie (…). Nous n’oublierons jamais l’effusion du sang des musulmans, les meurtres et les destructions » en Algérie. Ali Belaroussi et Azzedine Belkadi ont été enlevés jeudi 21 juillet au quartier Al Mansour, dans la capitale irakienne, à 200 m du siège de l’ambassade d’Algérie en Irak. Samedi 23 juillet, le groupe Al Zarqaoui a revendiqué le rapt sur internet avant d’être « félicité » par le GSPC le lendemain. Les auteurs du communiqué d’hier avancent que Azzedine Belkadi, qui venait de prendre ses fonctions à Baghdad, était membre des services de renseignement algérien, promu « du titre de lieutenant à celui de capitaine ». Le diplomate natif de Béjaïa est accusé d’« avoir participé aux massacres de Raïs et Bentalha (en 1997), qui ont fait des centaines de victimes parmi les enfants du peuple musulman algérien et qui ont été alors attribués aux moudjahidine ». Une reprise du communiqué publié mardi 26 juillet sur un site du GSPC appelant les ravisseurs à interroger les deux diplomates. Ali Belaroussi, qui devait prendre sa retraite en septembre 2005 après vingt ans de carrière, a été qualifié par le message du GSPC de « nationaliste hostile à l’édification d’un Etat islamique ». La branche irakienne d’Al Qaîda avait annoncé, mardi 26 juillet sur internet, dans un communiqué daté de la veille, que son « tribunal islamique » avait condamné à mort les deux Algériens. Condamnation suivie le même jour par la diffusion sur internet d’une courte vidéo montrant les deux otages, yeux bandés, décliner leur identité, fonction et adresse en Algérie. Le ministre d’Etat Abdelaziz Belkhadem avait déclaré, mardi 26 juillet sur les ondes de la Radio nationale, que les autorités algériennes ont déployé « tous les moyens pour récupérer sains et saufs » Ali Belaroussi et Azzedine Belkadi. « L’Algérie escompte un éveil des consciences et un sursaut d’humanité sur la terre tourmentée de l’Irak pour que le sang noble de deux ressortissants algériens ne soit pas arbitrairement et illégitimement versé », avait indiqué le commentaire de l’APS le soir du mardi 26 juillet. L’Algérie a rapatrié lundi vers Amman puis Alger son dernier diplomate à Baghdad, Bachir Belhadj. L’épouse de Ali Belaroussi est restée pour sa part dans la capitale jordanienne. Lundi 25 juillet, un haut responsable du ministère de l’Intérieur irakien a indiqué que deux suspects liés au rapt des deux diplomates ont été arrêtés. Sans autre précision depuis. « Ce qui vous touche nous touche », a témoigné hier au téléphone Mazen Ismaïl Aramadhani, professeur de sciences politiques à l’université Annahrayn de Baghdad. « Mes collègues à l’université, mes amis et connaissances sommes profondément attristés et chagrinés par cette affaire de rapt. Ces diplomates sont nos frères ! », a-t-il dit. « Nous traversons une étape de transition. Scientifiquement, les étapes de transition sont comme des labyrinthes. Les rues de Baghdad sont devenues des labyrinthes », a ajouté Mazen.

Adlène Meddi

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Traduction du communiqué d’Al Qaida

Vos frères de l’aile armée de l’organisation Al Qaîda en Mésopotamie ont, en ce mercredi 27 juillet 2005, exécuté la décision du tribunal islamique en se référant aux ordres d’Allah appelant à tuer tous les idolâtres et au hadith du Prophète (que le Salut et la Bénédiction d’Allah soient sur lui) : ‘‘Tuez celui qui change sa religion.’’ Et ont été tués le chef de la mission algérienne Ali Belaroussi et l’attaché diplomatique Azzedine Belkadi. Ce sont deux envoyés de l’Etat algérien qui gouverne en dehors des lois d’Allah et s’allie avec les juifs et les chrétiens. Il a envoyé ces deux apostats pour renforcer les bases des juifs et des chrétiens en Mésopotamie (…). Après tout ce que fait l’Amérique aux musulmans en versant leur sang et en intentant à leur dignité, des Etats s’empressent de se mettre derrière elle (l’Amérique) et aux côtés des ennemis d’Allah. Nous nous demandons n’est-ce pas que les tawaghit (tyranniques) Etats arabes ont boycotté Israël quand ils ont prétendu que celui-ci occupe un pays arabe frère ? Alors pourquoi cet empressement à aider les juifs et les chrétiens dans leurs attaques contre les musulmans en Mésopotamie ? Ce n’est pas étonnant, car l’Etat algérien, les tyrans arabes, les Etats occidentaux et l’Amérique sont de la même trempe. Nous sommes sollicités pour faire sortir les apostats (…). Nous n’oublierons pas ce qu’a fait l’Algérie aux musulmans comme assassinats et destructions. Nous n’oublierons pas ce qu’a fait Azzedine Belkadi, l’un de ceux qui ont participé aux massacres de Raïs et Bentalha qui ont fait des centaines des victimes parmi les enfants du peuple musulman algérien et qui ont été attribués à l’époque aux moudjahidine. A la suite de l’accomplissement de cette mission avec honnêteté et dévouement, il a été promu, avec certains de ses collègues, du rang de lieutenant à celui de capitaine dans l’appareil de renseignements. Nous n’oublierons pas ce que fait l’Etat taghout algérien actuellement contre les musulmans, notamment nos frères du GSPC, qu’Allah les protège et ajuste leur tir. N’avons-nous pas averti les ennemis d’Allah qu’il ne faut pas s’allier aux juifs et aux chrétiens et ne pas se mettre aux côtés des plans des Américains ? Nous disons encore une fois que la terre de Mésopotamie est devenue incertaine pour les ennemis d’Allah et qu’elle est une terre de feu pour chaque infidèle. Louange à Allah, les auteurs de l’opération de l’enlèvement ont pris les Algériens des mains de la police en plein centre de Baghdad. Ils ont réussi sans que l’un d’entre eux soit pris.

Signé

Abou Maissar El Iraqi, département d’information de l’organisation Al Qaîda en Mésopotamie.