Le groupe Nabni pour des subventions ciblées
par M. Aziza, Le Quotidien d’Oran, 25 février 2013
Après avoir été reçu et entendu par le 1er ministre Abdelmalek Sellal, il y a deux jours, le groupe Nabni était l’invité, hier, du Forum des chefs d’entreprises (FCE) pour présenter et débattre le volet économique de son projet Algérie 2020.
Et les intervenants ont eu à débattre de la nécessité d’aller vite ou non vers l’adhésion de l’Algérie à l’OMC, la nécessité de la refonte du système des subventions et des prix et l’épineux problème de la gouvernance. Autrement dit, comment arriver à désamorcer le blocage politique pour l’efficacité des expertises techniques faites soit par le groupe Nabni ou par des experts algériens en général ?
Si le groupe Nabni a proposé d’aligner les échéanciers d’adhésion à l’OMC et de tous les accords commerciaux (UE, Zale, UMA) jusqu’à 2018, pour permette à l’Algérie de mieux se préparer, Mouloud Hedir, consultant auprès du FCE, a préconisé le contraire. C’est d’aller vite vers l’adhésion à l’OMC. Pour le conférencier, l’accord d’association avec l’Union européenne a été déjà fait et certaines clauses ont été violées. Il a précisé dans la foulée que les instances européennes ont le droit d’ester en justice l’Algérie, devant les tribunaux algériens, sur la règle de l’investissement 49/51% sur la base de l’accord en question. Il poursuit, ils ne l’ont pas fait pour des considérations politiques et tout simplement parce que les Européens arrivent aujourd’hui à écouler leurs produits sur le marché algérien.
Pour Hedir, ces accords doivent d’être appliqués avec beaucoup de sérieux. «Si on a un projet avec l’Union européenne, c’est sérieux, on doit réformer notre économie pour pouvoir être en mesure d’appliquer cette adhésion». Il poursuit «on doit réformer notre économie pour pouvoir bénéficier des avantages sinon on se tire une balle dans le pied». Et de préciser : «Il faut savoir ce qu’on veut exactement. Si on veut construire quelque chose avec l’Union européenne, à ce moment-là, il faut mettre de l’ordre dans notre maison pour faire face à la concurrence internationale. Autrement dit pour importer et exporter en même temps».
Sur un autre registre, l’économiste Najy Benhassine, membre de Nabni, a évoqué l’idée de s’imposer par la constitution une date butoir sur l’utilisation de la fiscalité pétrolière. Il avance l’objectif de ne plus financer un salaire de la fonction publique des recettes de la fiscalité financière à partir de 2015. Il poursuit, seuls les investissements dans l’éducation, le savoir et les infrastructures économiques seront financés par la rente pétrolière.
Najy Benhassine a évoqué en outre la nécessité de la refonte des subventions et des prix (électricité, gaz et carburant). Le conférencier a estimé que les prix bas de ces produits énergétiques ne sont pas soutenables d’ici 10 ans. Il a également estimé que la croissance énergétique des ménages dans notre pays est anormale. Il souligne que cette refonte des subventions notamment énergétiques est possible dans une urgence lente, c’est-à-dire d’une façon graduelle de 7 à 10 ans. Il précise « on à ce luxe, d’autres pays l’ont fait sous la pression, d’une manière brutale dans 2 à 3 ans comme le cas de l’Iran, la Jordanie, le Maroc et le Nigeria».
En ce qui concerne la stabilité sociale, le groupe Nabni a affirmé que ce type de réformes doit s’accompagner d’un filet social qui permet au plus pauvre, au moins loti, de ne pas en souffrir. Autrement dit, un filet social qui permette de mieux cibler les populations qui ont besoin de soutien social, «parce que le niveau de dépenses de l’Etat en termes de transferts sociaux est très élevé», dira Benhassine. Il ne s’agit pas d’augmenter ces budgets, mais de bien les cibler. Il reconnaît «que techniquement ce n’est pas facile de mettre un système de ciblage juste, ça ne se fait pas en six mois, ça peut être étalé sur plusieurs années, c’est pour cela qu’on parle d’urgence lente», a-t-il souligné.
Le groupe Nabni est persuadé que tous les virages à prendre dans des domaines de l’économie ou dans d’autres secteurs ne peuvent être possibles qu’avec un réel changement de gouvernance. Les experts du FCE se sont montrés très sceptiques. Le président du Forum, Réda Hamiani, a carrément affirmé que le blocage est «politique» et qu’il s’agit bien «de gouvernance et de rapport de force politique»
L’économiste Nadjy Benhassine dira que le groupe Nabni a été mis sur pied pour développer des idées et des expertises avec une large contribution de la société civile. «On ne veut pas faire un coup d’Etat, mais on veut tout simplement pousser les politiques à s’attaquer aux vrais problèmes de l’économie algérienne et à d’autres secteurs». Ils suggèrent la création d’un Haut conseil au développement économique, présidé par le président de la République, dissoudre toutes les institutions actuelles de soutien aux entreprises en les substituant par une seule agence, animée par des experts capables de concevoir une meilleure stratégie industrielle. Ainsi que la réorganisation des institutions de l’exécution et de l’évaluation des politiques.
Le conférencier a affirmé que son groupe mènera dans les jours à venir une campagne de sensibilisation au niveau local. «On va commencer notre initiative à Mostaganem, là où il y a un mouvement associatif très actif», dira-t-il.