Le plus dur reste à faire par l’opposition
par Kharroubi Habib, Le Quotidien d’Oran, 12 juin 2014
Les acteurs politiques et sociaux ayant participé mardi à la conférence nationale sur la transition démocratique ont à juste titre souligné que leur rencontre a fait la démonstration qu’ils ont pu dépasser les clivages qui les ont empêchés jusque-là de se parler et d’envisager d’agir solidairement pour tenter de sortir le pays de la crise multidimensionnelle dans laquelle l’a plongé un régime défaillant et déliquescent et qui malgré cela s’accroche au pouvoir quitte à ce que le chaos en résulte.
La conférence de l’hôtel Mazafran a incontestablement marqué un tournant pour l’opposition politique algérienne. En l’organisant, celle-ci a signifié qu’elle est déterminée à mettre en avant les convergences qui peuvent apparaître entre ses composantes et s’y tenir pour concevoir une stratégie d’action et d’engagement commune face au pouvoir considéré désormais par tous comme le problème dans la crise algérienne.
Si tous les participants à la conférence du Mazafran ont exprimé la satisfaction qu’ils ont d’avoir contribué au pas en avant positif qu’a fait l’opposition en l’occurrence, nul d’entre eux n’a, on veut le croire, la naïveté de penser que les choses vont changer comme il l’espère uniquement parce que l’opposition a fait la démonstration qu’elle peut parler d’une même voix et s’est entendue sur la nécessité de la mise en place d’une transition démocratique comme issue à la crise dans laquelle se débat l’Algérie.
Si l’illusion qu’il pourrait en être ainsi a effleuré les esprits d’aucuns, Abdelmalek Sellal s’est chargé au nom du pouvoir de leur signifier que celui-ci est dans un tout autre état d’esprit et poursuit un plan politique excluant tout ce que l’opposition propose dans le sien. C’est pourquoi la conférence du Mazafran doit impérativement être suivie d’autres initiatives de la part de l’opposition prouvant au pouvoir qu’elle ne se confinera pas à agiter en vase clos sa proposition d’une transition démocratique mais faire en sorte de la jeter au sein du peuple qui seul en la reprenant à son compte sera en mesure de l’imposer au pouvoir.
En d’autres termes, les partis et personnalités nationales ayant souscrit à la plateforme politique pour une transition démocratique ne doivent pas se contenter d’y avoir adhéré mais « mouiller le maillot » pour faire partager leur projet par le peuple algérien. Ce qui implique qu’ils aillent à lui, qu’ils brisent le mur de défiance sur lequel ils ont buté et que leur a valu leur exercice de la politique qui ne faisait pas place à la participation responsable du peuple à la définition de ce qui serait bon pour la nation.
Sans l’adhésion autour d’elle de ce peuple, l’opposition ne peut espérer amener le pouvoir à donner suite à ses propositions. Benflis, l’une de ses locomotives, en est apparu conscient et a cherché à en convaincre les participants à la conférence en leur faisant valoir que « le dialogue avec le pouvoir ne doit pas se limiter à un duel entre le pouvoir et l’opposition mais doit intégrer un troisième élément qui est le peuple ». L’intégration du peuple dans ce duel est le vrai et décisif défi auquel l’opposition doit s’attaquer. En se rassemblant, elle a apparemment opté pour la démarche qui lui permettrait d’entreprendre la reconquête de l’estime populaire qui rendrait plus audible sa voix au sein de l’opinion.