Des citoyens réactifs, une classe politique aux abonnés absents

Des citoyens réactifs, une classe politique aux abonnés absents

par Kharroubi Habib, Le Quotidien d’Oran, 3 avril 2013

L’appel lancé il y a quelques jours par Mohamed Mechati, membre du groupe historique des « 22 », Ahmed Benbitour, ex-chef du gouvernement, et Soufiane Djilali, président du parti « Jil Jadid », pour la constitution d’une alliance stratégique pour dire non à un quatrième mandat au chef de l’Etat en exercice a été diversement accueilli par les citoyens lambdas.

Les uns en ont fait la lecture que ses auteurs sont dans la démarche « du tout sauf Bouteflika » qui leur a fait « noircir» au-delà du crédible ses quinze années de pouvoir et que de ce fait leur initiative a peu de chance de rencontrer un grand écho dans le pays. D’autres par contre jugent leur démarche salutaire car reposant sur le constat d’un bilan calamiteux qui disqualifie son auteur et qu’il serait de l’intérêt national de barrer à ce dernier la voie vers un quatrième mandat présidentiel. Tous toutefois ne la voient pas atteindre l’objectif que lui a assigné le triumvirat signataire. Point de vue qu’ils justifient en faisant valoir que la classe politique et la société civile auxquelles se sont adressées les trois personnalités sont loin d’avoir le courage et la détermination de s’attaquer frontalement et irrévocablement au président en exercice s’il en vient à briguer un quatrième mandat dont ils dénoncent pourtant déjà le caractère « frauduleux » du scrutin qui le sanctionnera.

De fait, autant l’appel des trois personnalités est commenté en milieux populaires, autant les représentants de la société civile et les porte-paroles des formations partisanes observent le silence à son endroit. Silence que seuls trois partis n’ont pas observé : le RCD, le FFS et le FLN. Au nom du RCD, son secrétaire national à la communication Atmane Mazouz a affirmé que le « constat établi dans l’appel rejoint en partie les positions tranchées et plusieurs fois réitérées par le RCD ». Mais il n’a pas précisé si son parti approuvera ou non la proposition de création d’une alliance stratégique anti-Bouteflika préconisée par les cosignataires de l’appel.

Pour sa part, le FFS, lui aussi, par la voix de son secrétaire national à la communication Chafâa Bouaiche, a réagi à l’initiative en estimant que « tout un chacun est libre de disserter sur une hypothèse ou une autre concernant la prochaine élection présidentielle ». Il est clair néanmoins que l’initiative du trio n’obtiendra pas le ralliement du plus vieux parti d’opposition, ce qu’il a laissé entendre en affirmant que « ceux qui ont envie de rééditer les erreurs antérieures sont libres de le faire ». Enfin, le chargé de la communication du FLN s’est lui aussi exprimé sur le sujet en se contentant d’émettre « qu’il est tout à fait normal qu’à la veille de chaque élection présidentielle des personnalités lancent des initiatives individuelles ou collectives pour se présenter au scrutin ».

Hormis donc ces trois formations, toutes les autres sont restées muettes. Ce qui n’est pas pour étonner de la part d’une classe politique inconsistante et dont la majorité de la composante est mue par l’opportunisme et la peur de provoquer la colère du puissant du moment. Cette majorité « silencieuse » de la classe politique ne se tait pas d’ailleurs uniquement sur la question du quatrième mandat mais sur toutes celles politiques et sociales qui font débat au sein de la population.