Congrès pour le Changement Démocratique: Pour un Compromis politique historique

Pour un Compromis politique historique

Préambule :

L’impasse politico-institutionnelle que nous vivons, réside dans l’illégitimité originelle qui a entaché l’instauration du régime dès l’Indépendance. Elle se double aujourd’hui d’une crise morale aigüe qui fait peser de graves menaces sur la cohésion nationale, l’intégrité du territoire et le devenir-même de la nation. Fait sans précédent, cette crise s’est exacerbée cette fois-ci, par les luttes au grand jour entre les différents clans mafieux d’une oligarchie militaro-financière mâtinée de politiciens de façade, complices et soumis…

Une oligarchie militaro-financière qui a étouffé les libertés fondamentales, individuelles et publiques en se plaçant au-dessus de la souveraineté du peuple algérien et en refusant obstinément de se soumettre à la légitimité populaire, seule alternative pour l’instauration de la démocratie dans notre pays, préférant pour sa survie, une alternance purement clanique et une fuite en avant suicidaire, après avoir plongé durant une décennie l’Algérie dans les abysses de l’horreur.

C’est pourquoi, nous, citoyens et citoyennes, prenons résolument le parti d’en appeler directement et publiquement, à toutes les consciences du pays, hommes et femmes – de toutes générations, de tous statuts ou conditions sociales, toutes sensibilités politiques confondues, sans exclusion ni exclusive – en vue de se mobiliser, en un vaste mouvement fédérateur de toutes les oppositions réelles et sincères contre le pouvoir en place. Mobilisation qui aura pour but de mettre un terme par tous les moyens légitimes et pacifiques, à un régime arrivé à un stade irréversible de pourrissement politique et de corruption morale et dont le maintien menace gravement l’unité du peuple, l’intégrité territoriale du pays, le devenir de nos enfants et la souveraineté-même de la nation.

Notre initiative s‘inscrit dans le prolongement historique de la fondation de notre Etat. Elle repose pour cela sur ses Textes fondateurs.

I – Principes et Références :

Ces Références essentielles qui guident la démarche et l’action de notre mouvement citoyen, sont les principes généraux, énoncés dans la Déclaration du 1er Novembre 1954 et dans la Plateforme de la Soummam. A ces références nationales, s’ajoute la référence internationale à la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme.

C’est en nous appuyant sur les principes fondamentaux contenus dans ces Textes de référence, que nous entendons lutter par tous les moyens légitimes et pacifiques, contre le régime illégitime, corrompu et totalitaire en place, jusqu’à son abolition. C’est là, une condition sine qua non, pour l’avènement dans notre pays, d’un Etat de Droit où la démocratie, le pluralisme et l’alternance ne seront pas des slogans creux. Un Etat de Droit authentiquement issu de la volonté souveraine du Peuple, source de tout pouvoir et de toute légitimité.

Pour l’essentiel, ces principes fondamentaux sur la base desquels nous appelons au rassemblement des citoyens et citoyennes sont :

– l’intangibilité et l’inviolabilité de la souveraineté du peuple : aucune Institution de l’Etat, quelle qu’elle soit, ne peut se prévaloir d’être au-dessus de cette souveraineté ;

– l’égalité de tous les citoyens et citoyennes, quels que soient leur statut, au sein de l’Etat ou de la Société, devant la Loi ;

– la sacralité de nos Valeurs civilisationnelles forgées par l’Histoire, qui constituent les fondements indissociables de notre algérianité, à savoir : L’Islam, l’Amazighité, et l’Arabité ; Valeurs qui ne peuvent être instrumentalisées, ni par le pouvoir, ni par l’opposition ;

– le respect des droits humains, c’est-à-dire la sacralité de l’intégrité physique et de la dignité de la personne humaine, ainsi que les libertés citoyennes fondamentales, individuelles et collectives, en particulier les libertés de conscience, d’opinion et/ou d’expression, ainsi que le droit d’association ;

– abolition de la police politique sous toutes ses formes, afin d’une part, de libérer le champ politique dans la transparence et, d’autre part, de réorienter les Services de Renseignement et de Sécurité, aussi bien civils que militaires, vers leur mission institutionnelle originelle, d’espionnage et de contre-espionnage, dans le cadre de la surveillance du territoire et de la protection des intérêts nationaux ;

– la séparation effective des pouvoirs, en particulier l’indépendance du pouvoir judiciaire, seule à même de garantir une véritable Justice, colonne vertébrale d’un Etat de Droit authentique;

– l’alternance au pouvoir, par le suffrage universel ;

– l’affirmation du caractère d’Institution républicaine de l’armée, dans sa mission de défense nationale et de garante de l’intégrité du territoire et de l’indépendance nationale, sous l’autorité et le contrôle du pouvoir politique légitime.

Ce sont-là des points de convergence majeurs, dont le caractère prégnant pourrait constituer une plate-forme consensuelle. Ces principes concordent avec les différentes initiatives citoyennes qui se sont développées ici et là, et pourraient constituer un socle commun à l’instauration d’une Période de Transition.

II – Période de Transition :

Deux objectifs essentiels sont assignés à la période transitoire :

1°) – L’organisation sous un délai d’une année, de l’élection d’une Assemblée Constituante, sous les augures de l’ouverture politique et de la transparence et d’une réconciliation vraie et sincère, des algériens avec eux-mêmes ;

2°) – La représentation de l’Etat vis-à-vis de l’étranger et la gestion des affaires courantes du pays.

a) Instances provisoires :

Deux instances provisoires seront mises en place pour assurer la Transition :

— Un Conseil présidentiel exerçant collégialement les charges généralement dévolues aux Chefs d’Etat et composé de personnalités nationales de premier plan, connues pour n’avoir pas de liens de pouvoir ou d’intérêt avec le régime déchu ;

— Un Gouvernement provisoire composé de personnalités reconnues pour leur compétence et leur intégrité et couvrant l’ensemble des secteurs relevant généralement des responsabilités gouvernementales.

Les membres des instances provisoires ne peuvent se porter candidats à la plus prochaine élection présidentielle ;

b) Charte Ethique de la Transition :

Outre les dispositions organiques, la Période de Transition sera encadrée par une Charte Ethique cosignée par tous les partenaires auxquels elle s’adresse, et s’articulant autour de trois points essentiels :

—- L’engagement solennel de toutes les parties signataires à respecter les principes énoncés dans le Compromis politique ;

— L’engagement solennel de l’Institution militaire, d’accompagner et de protéger jusqu’à son terme, le processus de la Transition démocratique vers un Etat de Droit ;

— La proclamation solennelle par toutes les parties signataires du Compromis politique historique, du refus et du rejet, sous quelque forme que ce soit, de toute ingérence étrangère dans les affaires intérieures de notre pays.


APPEL

Nous, citoyens et citoyennes algériens, interpellés par la gravité de la situation de notre pays et inquiets quant à l’avenir, prenons nos responsabilités devant notre Peuple et devant l’Histoire, et décidons de nous unir au sein d’un Congrès pour le Changement Démocratique (CCD) en vue de créer une dynamique populaire du changement et une véritable transition démocratique vers un Etat de Droit et des Libertés démocratiques.

Nous en appelons au cœur et à la raison de tous :

A nos compatriotes :

— Pour cesser de subir, pour devenir les acteurs de notre propre histoire et les maîtres de notre propre destin. L’Algérie appartient à tous les algériens et à toutes les algériennes, sans exclusion ni exclusive ; aucune barrière infranchissable ne sépare les algériens entre eux, malgré les discours haineux de tous bords, servis à profusion durant ces dernières années par les sirènes de la division et de la discorde ;

— pour s’unir et œuvrer ensemble dans la sérénité et sans exclusion aucune, à la mise en place d’un processus de Changement, pour un Etat de Droit et des Libertés démocratiques ; nous demandons à tous de se mobiliser, en puisant dans nos ressources patriotiques pour contribuer, chacun selon ses moyens, à la résolution de la crise qui est en train de saper les fondements de notre pays.

Aux intellectuels :

— Pour prendre conscience de la nécessité impérieuse d’apprendre à se respecter, à se parler et à s’accepter, par-delà leurs différences idéologiques et politiques ;

— pour déjouer les pièges de l’asservissement, de la marginalisation ou des communautarismes de chapelles idéologiques, érigés en stratégie politique par un pouvoir corrompu et corrupteur, passé maître dans l’art de la manipulation et de la division, avec toutes les conséquences désastreuses que l’on sait, opposant islamistes et laïcs, arabophones et francophones, berbéristes et baathistes, nationalistes et pro occidentaux, progressistes et conservateurs…etc,.

— pour se mobiliser aux côtés des autres forces politiques, afin de contribuer à la réussite d’une Transition qui jettera enfin, les bases d’une Algérie fraternelle et réconciliée avec elle-même, dans un Etat de Droit où chacun et chacune auront leur place.

Aux politiques :

— Pour privilégier désormais, la voie du dialogue et de la concertation en tirant les enseignements d’un demi-siècle d’échecs politiques et de dissensions socio-culturelles, le plus souvent orchestrées par les manipulations d’un pouvoir qui n’a eu de cesse de contrer l’émergence de toute opposition crédible ;

— pour concourir loyalement, à l’instauration dans notre pays, d’une démocratie authentique, reflétant les forces socio-politiques réelles, profondément ancrées dans notre société et imprégnées de ses valeurs culturelles ; des forces jusques là systématiquement escamotées, par le déni et le mensonge, au profit d’entités artificiellement créées par les officines du pouvoir illégitime, et qui ont dénaturé et détruit la vie politique et sociale dans notre pays ;

— pour rompre avec les stratégies du pouvoir, tendant à imposer les termes et les limites du débat politique, et à défaut, instrumentaliser la violence comme moyen de régulation de la vie politique, par le jeu des intrigues et des divisions de la société ; des stratégies de nature mafieuse qui ont fini par discréditer la classe politique dans son ensemble, aux yeux de l’opinion nationale, voire internationale ; il devient impérieux pour les composantes de l’opposition réelle – nationalistes, islamistes, sociaux-démocrates et autres franges idéologiques – de s’accepter mutuellement, en instaurant entre elles, les canaux d’un dialogue permanent, respectueux et constructif.

Aux Officiers de l’Armée Nationale :

— Pour relever la dignité blessée de la nation et du peuple algériens, en disant non, à cette politique suicidaire et en participant activement, aux côtés de toutes les volontés patriotiques d’avant-garde, à la résolution de la crise qui menace l’existence-même de notre pays,

— pour rappeler que l’Institution militaire républicaine, n’est au service ni d’une oligarchie ni d’un clan, quels qu’ils fussent, mais au service exclusif de l’Algérie, Etat et Nation; elle doit donc cesser d’être la source du pouvoir et refuser d’être instrumentalisée, en se cantonnant strictement dans le cadre de ses missions et ses prérogatives constitutionnelles ;

— pour prendre conscience de sa responsabilité historique dans l’accompagnement et la protection du processus d’instauration d’un Etat de Droit qui est devenu aujourd’hui, une exigence morale irréductible et incontournable, revendiquée par le peuple algérien.

A tous les enfants de ce pays, toutes générations confondues :

Ce sera la fierté de nous tous, citoyens et citoyennes algériens, de toutes conditions ou statuts sociaux, d’honorer notre devoir patriotique en nous impliquant pleinement dans le processus de construction d’une société d’ouverture et de tolérance, enfin libérée de la malédiction des injustices, des dissensions et de la violence politique et en participant activement à cette démarche alternative qui conduira à un changement véritable et à un Etat de Droit authentique, issu de la volonté souveraine du Peuple.

Alger le 21 juin 2014

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Membres fondateurs (par ordre alphabétique)

Noureddine Ahmine. Avocat. Laghouat.
Saïd Aït Abdallah. Ex-cadre du tourisme. Exilé à Paris.
Rachid Azzouzi. Chauffeur. Exilé à Paris
Mahfoud Bedrouni. Cadre supérieur. Chlef.
Samir Bellatéche. Statisticien. Exilé à Paris.
Noureddine Belmouhoub. Militant des Droits de l’Homme. Alger.
Ahmed Bourahla. Ingénieur Hydraulique. Alger.
Amar Cheballah. Journaliste. Tizi-Ouzou.
Ahmed Chouchane. Ex-officier de l’armée nationale. Exilé à Londres.
Abdelkader Dehbi . Retraité. Alger.
Mahmoud Demmou. Cadre financier. Alger.
HalimFeddal. Ingénieur. Chlef.
Amel Hadj-Hamou M’hari. Architecte. Alger.
Mohamed Hadj Smaïn. Militant des Droits Humains. Relizane.
Fodil Harboula. Technicien. Exilé à Paris.
Adel Herik. Ingénieur en pétrochimie. Exilé au Canada.
Noureddine Khalfi. Architecte. Constantine.
Abderezak Laïbi. Entrepreneur. Bouira.
Djamel Laliléche. Commerçant. Alger.
Saïd Lebeze. Bureau d’Etudes. Exilé à Londres.
Mohamed Maïz. Chirurgien. Alger.
Mohamed Benali Mezghiche. Avocat. Biskra.
Mohamed Midoun. Professeur de mathématiques. Blida.
Chafika Nedjadi. Informaticienne. Bejaïa.
Omar Saada. Ex-officier de la Protection civile. Exilé à Oslo.
Mohamed Sebihi. Juriste. Alger.
Abdelhak Serrab. Médecin Réanimateur. Exilé en France.
Lyes Si Chaïb. Architecte. Alger.
Salah-Eddine Sidhoum. Chirurgien. Alger.
Kamel Toumadj. Cadre. Alger
Aïcha Zitouni. Journaliste. Alger.