Sarkozy sonde le terrain

Sarkozy sonde le terrain

par Kharroubi Habib, Le Quotidien d’Oran, 13 novembre 2007

A l’approche de la visite d’Etat qu’il doit effectuer fin novembre dans notre pays, Nicolas Sarkozy a dépêché hier à Alger M. Alain Leroy, son conseiller diplomatique en charge du projet d’union méditerranéenne. L’émissaire de l’Elysée aurait reçu pour mission d’éclairer Alger sur le contenu de ce projet et de jauger les réactions qu’il suscite côté algérien. Le débat contradictoire que son projet d’union méditerranéenne suscite en Algérie, et dont la presse locale s’est fait l’écho, n’est pas sans avoir inquiété le nouveau locataire de l’Elysée, même si officiellement Alger lui a exprimé son soutien de principe par la voix de son ministre des Affaires étrangères. Il apparaît effectivement que l’initiative que Sarkozy compte démarcher auprès de Bouteflika, lors de sa visite d’Etat, est loin de faire l’unanimité en sa faveur dans la classe politique et l’opinion algériennes. Même le soutien de principe que lui ont accordé les autorités officielles s’est accompagné de commentaires et de considérations qui font présager qu’avant de s’engager plus loin avec l’initiative française, l’Algérie entend poser ses conditions.

La première étant que les deux pays règlent d’abord les contentieux qui «parasitent» leurs relations bilatérales. Côté algérien, dans l’opinion du moins, l’on voit mal le pays s’engager dans la construction d’une union méditerranéenne dont la France veut prendre l’initiative (déjà certains parlent de prétention à un leadership régional) tant que Paris persiste dans son soutien inconditionnel à Rabat sur la question sahraouie et refuse de reconnaître les torts infligés au peuple algérien durant l’occupation coloniale.

Bouteflika dissertera sans nul doute avec son homologue français des perspectives que ce projet d’union méditerranéenne est susceptible d’ouvrir pour la région. Il confirmera aisément la disposition algérienne à oeuvrer pour tout ce qui peut rapprocher les peuples des deux rives de la Méditerranée et contribuer à l’instauration d’un cadre de partenariat et de coopération entre eux.

Mais il n’ira certainement pas jusqu’à enrôler d’emblée l’Algérie dans la construction géopolitique qu’ambitionne de réaliser Sarkozy, sans prendre le temps d’en décrypter tous les calculs qui ont incité son initiateur à la proposer. Cela d’autant que le projet est sujet à caution, voire à opposition chez beaucoup d’autres Etats riverains de la Méditerranée du Nord comme du Sud.

Nul doute donc que l’Algérie se restreindra sur cette question à réaffirmer son adhésion de principe à l’initiative en tant que démarche s’inscrivant dans les efforts partagés qui veulent aller au dialogue et à la coopération Nord-Sud dans la région méditerranéenne.

Pour espérer convaincre les autorités algériennes à s’enrôler sans ambiguïté dans l’aventure de son union méditerranéenne, il devra d’abord lever les suspicions qui pèsent dans leur pays sur la sincérité de «l’amitié» et la volonté d’instaurer un partenariat d’égal à égal dont il dit être guidé à l’égard de l’Algérie.