L’AVEN s’alarme des décès causés par cette maladie
Journée mondiale du cancer à Tamanrasset
L’AVEN s’alarme des décès causés par cette maladie
El Watan, 6 février 2016
C’est un cri de détresse que vient de lancer l’Association des victimes des essais nucléaires (AVEN) à In Ekker, dans la wilaya de Tamanrasset, à l’occasion de la Journée mondiale du cancer.
Le bilan des décès causés par les maladies radio-induites ne cesse de s’alourdir dans cette région saharienne. Des dizaines de cancéreux, femmes, hommes et enfants, meurent annuellement dans l’anonymat et en l’absence d’une réelle prise en charge, s’alarme Mahmoud Elouaer, président de l’AVEN, qui a recensé plus de vingt types de cancer à Tamanrasset.
Selon notre interlocuteur, la mise en service d’une unité d’oncologie au niveau de l’établissement public hospitalier (EPH) de la ville est insuffisante pour endiguer ce phénomène qui touche particulièrement les populations des zones irradiées. L’absence de recensement et de registres répertoriant les fichiers et les dossiers médicaux des malades ne fait qu’exacerber le problème dans lequel se morfond cette région, livrée à toutes les formes de métastases. Les statistiques avancées par des spécialistes montrent que 21,28% des femmes de cette wilaya sont atteintes de cancer du sein et 10,13% de cancer de la thyroïde. Sur 500 habitants, 18 sont atteints de cette maladie.
D’une voix empreinte de tristesse, le secrétaire général de l’AVEN, Boubakeur Ibba, relate : «Nous avons assisté à l’enterrement d’enfants amputés des membres inférieurs et de femmes à la fleur de l’âge. Le pire, c’est qu’aucune de ces victimes ne possède un dossier médical, hormis les quelques certificats délivrés par les médecins exerçant dans la région.» Cinquante-quatre ans après cette tragédie que la France ne veut toujours pas réparer, l’Association de Taourirt dresse un réquisitoire contre un crime abject dans l’histoire de l’humanité et en appelle à toutes les institutions et organisations internationales pour rétablir les victimes dans leurs droits à l’indemnisation morale et matérielle.
«La géopolitique de l’époque obligeait nos dirigeants négociateurs à fléchir et faire des concessions en autorisant la réalisation de ce que la France appelait les ‘expériences scientifiques propres’. Malheureusement, après toutes ces années, nous continuons à subir les conséquences d’une tragédie commise par un pays qui prône pourtant le respect de la justice et des droits universels», souligne, pour sa part, Abdelkrim Touhami, vice-président de l’AVEN, qui préconise d’agir dans les faits afin d’en finir avec les promesses sans lendemain.
L’AVEN, indiquent ses membres, œuvre à associer à leur douleur tous les pays touchés par la catastrophe nucléaire française. Des recommandations ont été faites, en collaboration avec des spécialistes au fait du dossier en vue de réclamer ce que de droit et une prise de conscience collective. «On nous a utilisés comme des cobayes, mais on ne veut pas être des oubliés de l’histoire. L’Etat algérien doit nous accompagner dans cette démarche si l’on veut sauver des milliers de personnes de la mort.
Une solidarité entre l’Etat et l’AVEN nous encouragera et nous aidera à prendre en charge les victimes. L’Association n’a pas de moyens, mais croit dur comme fer en sa cause», conclut-on.
A l’hôpital de Tamanrasset, d’importants moyens ont été mis au service des cancéreux. Quelque 75 patients sont pris en charge en matière de chimiothérapie, précise notre source, ajoutant qu’une équipe médicale est chargée de sillonner les zones exposées aux rayonnements ionisants pour un recensement exhaustif des malades.
Ravah Ighil