Filières tchétchènes: la défense dénonce des aveux « extorqués »

Filières tchétchènes: la défense dénonce des aveux « extorqués »

La défense des 27 prévenus du procès dit des filières tchétchènes a dénoncé vendredi la manière dont cette affaire de terrorisme islamiste présumé a été instruite: un dossier

20Minutes.fr avec AFP | 12.05.06 | 20h37

La défense des 27 prévenus du procès dit des filières tchétchènes a dénoncé vendredi la manière dont cette affaire de terrorisme islamiste présumé a été instruite: un dossier « construit », avec des aveux « extorqués » et où « le droit n’a jamais été respecté ».

Au dernier jour de ce procès commencé le 20 mars, la 14e chambre du tribunal correctionnel de Paris a entendu les défenseurs des principaux prévenus, contre lesquels des peines comprises entre trois et dix ans d’emprisonnement ont été requises.

Poursuivis pour association de malfaiteurs en lien avec une entreprise terroriste, les prévenus sont accusés d’avoir projeté de commettre des attentats sur le sol français en 2001-2002.

Le principal angle d’attaque de la défense est d’affirmer que le dossier instruit par les juges antiterroristes Jean-Louis Bruguière et Jean-François Ricard ne s’appuie sur aucun fait matériel et sur des aveux sujets à caution.

Me Isabelle Coutant-Peyre, avocate de Merouane Benhamed, Algérien de 33 ans promoteur présumé des projets d’attentat, a dénoncé un « montage » et une « usine à gaz ».

« Il y a eu une construction intellectuelle du dossier », a affirmé Me Sébastien Bono, défenseur de Saïd Arif, un Algérien de 40 ans présenté par l’accusation comme un des leaders charismatiques du groupe.

« L’engagement djihadiste très fort » de M. Arif, selon les termes du parquet, a été longuement détaillé à l’audience, avec un itinéraire qui l’a mené des maquis algériens au Caucase en passant par l’Afghanistan, avant qu’il soit interpellé en Syrie et extradé vers la France en juin 2004.

« On s’intéresse aux individus, à leur personnalité mais en matière de justice, l’important ce sont les faits », a plaidé Me Bono, qui en a pointé l’absence en dehors des aveux « extorqués » à Saïd Arif en Syrie. Durant sa détention à Damas, de juillet 2003 à juin 2004, le prévenu aurait reconnu des projets d’attentats mais il affirme aujourd’hui avoir été torturé. « Je ne pense pas que vous puissiez utiliser des pièces qui puent le sang et la sueur », a lancé au tribunal l’avocat de Saïd Arif.

Plusieurs défenseurs ont mis en avant les violences subies par leurs clients en garde à vue en France. Des prévenus avaient aussi mis en cause au cours des audiences les pressions exercées par les juges d’instruction pour obtenir des aveux en échange de leur remise en liberté.

L’épouse de Merouane Benhamed a été traitée « de manière proprement scandaleuse », selon son avocat. « Dix-sept couples ont été mis en garde à vue », notamment des épouses enceintes de plusieurs mois ou gravement diabétiques, a fait valoir Me Bono. « Pourquoi tant de haine, de mépris contre ces femmes et ces hommes ? » a demandé Me Coutant-Peyre. Pour Me Bono, « il y a un grave problème dans ce dossier: le droit n’a jamais été respecté ».

Le jugement sera rendu dans plusieurs semaines.