FLN: le temps du retournement de vestes

FLN: le temps du retournement de vestes

par Kharroubi Habib,Le Quotidien d’Oran, 20 mai 2012

« Grand vainqueur» des élections législatives, le FLN n’en a pas pour autant fini avec la guerre des chefs qui mine sa cohésion. Après une trêve qu’ils ont observée pour cause de campagne électorale, les contestataires du secrétaire général du parti repartent à l’offensive contre lui. Sauf que l’arme de la procédure du «retrait de confiance» qu’ils essaient d’utiliser contre lui s’est singulièrement émoussée après le score électoral fait par le FLN sous la houlette de Belkhadem.

La majorité de membres du comité central indispensable pour finaliser cette procédure et qu’ils se targuaient d’avoir réunie est en train de fondre comme beurre au soleil, car les retournements de veste dans leurs rangs ont déjà eu lieu et vont se multiplier. Fort de la «victoire» remportée par le FLN, Belkhadem est en effet en situation de «convaincre» nombre de ses opposants à revenir dans la voie de la «légalité» en jouant sur leur avidité à être du côté gagnant.

Le noyau dur de la contestation persistera certainement dans l’activisme anti-Belkhadem, à seule fin de sauver ce qui peut l’être pour lui. Mais il est clair qu’il a perdu la bataille et en subira les conséquences. Car Belkhadem exploitera la nouvelle donne créée pour le FLN par sa «victoire électorale» en fermant la porte de la direction du parti aux irréductibles parmi ses adversaires. Il va frapper fort et vite car la guéguerre des chefs n’a que trop duré et fait «désordre» pour un parti ayant gagné les élections et appelé à avoir un rôle charnière dans le processus d’achèvement des réformes politiques. Ce à quoi Bouteflika l’encouragera très certainement.

Les chefs de file de la contestation que Belkhadem a en ligne de mire se sont trompés du tout au tout en pensant que le mouvement qu’ils ont initié contre lui aboutirait à son lâchage par le chef de l’Etat, qui est aussi, pour rappel, le président d’honneur du parti. Ils ont été naïfs en pensant que les quelques signaux émis par Bouteflika à un moment de la confrontation qu’ils ont engagée avec Belkhadem signifiaient le retrait de son soutien à leur adversaire. En fait, le chef de l’Etat n’a jamais enlevé son appui à Belkhadem, qui, en le sachant, a fait front sans être démonté par l’offensive lancée contre lui et pouvait effectivement l’emporter vu la masse de ralliements qu’elle a value au noyau dur de ses contestataires.

Bouteflika savait que les adversaires de Belkhadem auraient la partie belle au cas d’une défaite électorale du FLN, voire d’un score gagnant mais étriqué. C’est l’une des raisons qui l’ont poussé à jeter tout le poids de son autorité présidentielle et de sa popularité sous la forme de son appel à voter au peuple, dont le FLN a été le bénéficiaire et, par voie de conséquence, Belkhadem qui en est le patron nominal.

En contestant Belkhadem intronisé par Bouteflika à la tête du parti, ses opposants ont conscience, ou sans s’en rendre compte, commis ce que ce dernier ne pouvait que considérer en tant que «crime de lèse-majesté», inspiré à ses auteurs par les forces au sein du pouvoir ayant voulu desserrer sa mainmise sur le principal parti à la veille d’échéances politiques dont les enjeux sont cruciaux pour l’organisation de la succession intervenant en 2014.

Le «redressement» dont devait être l’objet le FLN va effectivement avoir lieu, mais pas dans la forme que les contestataires de Belkhadem ont caressée.


Les dissidents n’ont pu réunir les 2/3 du CC : Le FLN dans le flou

par Salah-Eddine K., Le Quotidien d’Oran, 20 mai 2012

Les frondeurs du FLN déclarent le poste du SG «vacant». Ils espèrent, si tout va bien, réunir le CC du parti avant le 15 juin.

Les frondeurs au sein du FLN pourront organiser une session du Comité central de ce parti avant la date des 14 et 15 juin prochain. Ils estiment que d’ici là, la liste des membres du Comité central du FLN, opposés à la ligne Belkhadem, se verra augmenter et atteindra le nombre de 234, soit les 2/3 des membres du CC du FLN. Sous un soleil tapant, la réunion des contestataires s’est déroulée, hier, dans la cour de la kasma d’El-Madania-Alger au lieu du siège du parti à Hydra.

Les frondeurs font état du nombre grandissant de membres du Comité central qui rejoignent le mouvement des redresseurs. Ils ont élaboré et ont fait la lecture d’un projet de motion qu’ils présenteront lors de la prochaine réunion du Comité central du parti. Ce projet de motion est soumis pour adoption par les contestataires avant qu’il ne soit présenté au Comité central, les 14 et 15 juin, auquel a appelé l’actuel SG du FLN, Abdelaziz Belkhadem. Les frondeurs estiment que dans le cas où ils obtiendraient les 2/3 des membres du Comité central, ils organiseront une session de cet organe avant cette date, dès lors que le règlement le permet.

Ils sont actuellement 210 sur 351 membres du Comité central à avoir pris position pour la destitution du SG du FLN. «Il faut faire vite avant les élections locales», a martelé un ancien mouhafedh dans son intervention. Les opposants à Belkhadem s’estiment assez forts avec ce nombre, soit plus de la moitié, pour avoir leur mot à dire lors de la cession du Comité central, a-t-on indiqué.

Durant la matinée et sous un soleil tapant dans l’enceinte de la maison Derriche, un des cadres du mouvement fera la lecture du projet de la motion qui n’est en fait qu’un procès en règle à l’encontre du SG du FLN et de son Bureau politique, rendu «complice» de la situation actuelle du parti. Plusieurs accusations sont contenues dans cette motion. L’on reproche à Belkhadem de développer un discours à géométrie variable envers les uns et autres. Le SG du FLN aurait, selon eux, «foulé les principes du parti en tous points de vue». Ils estiment que les bons résultats obtenus lors des législatives du 10 mai dernier n’ont été possibles que grâce au peuple et… au président de la République. D’autres griefs sont retenus également contre le SG du FLN concernant la «démobilisation des citoyens et la mise en faillite du parti».

Lors de la cérémonie qui a été organisée, jeudi, au niveau du siège du parti à Hydra, au profit des députés nouvellement élus, de cadres du parti et de simples militants et sympathisants, Belkhadem, évoquant les «mécontents» au sein de son parti, les a exhortés à «prendre leur mal en patience et en silence ou mourir de dépit».

Le FLN est arrivé à la première place aux élections législatives, avec 221 sièges à l’APN, selon les résultats proclamés mardi par le Conseil constitutionnel.