L’Union méditerranéenne oppose Paris et Berlin

L’Union méditerranéenne oppose Paris et Berlin

par L’un de Nos Correspondants à Paris : S. Raouf, Le Quotidien d’Oran, 17 février 2008

Plus que jamais, l’enthousiasme méditerranéen de Paris bute sur l’indifférence de Berlin. Nicolas Sarkozy vient de l’apprendre, une nouvelle fois, à ses dépens. Le chef de l’Elysée a chargé son conseiller spécial, Henri Guaino, d’aller vaincre les réticences allemandes. L’homme de confiance est revenu bredouille.

Ses entretiens sur place lui ont fait comprendre que le détachement allemand à l’égard de l’Union méditerranéenne (UM) est loin d’être une réaction conjoncturelle.

Plus que sur la forme, l’opposition allemande porte sur l’essence même de l’idée de Nicolas Sarkozy. Berlin continue de reprocher à Paris de faire cavalier seul et de vouloir faire table rase d’un processus Euromed vieux d’une quinzaine d’années. Citée par la presse parisienne sous le sceau du «off», une source gouvernementale allemande pointe un projet français illisible.

L’Allemagne suggère à la France de s’en expliquer davantage auprès de ses partenaires européens. «Ce n’est que de cette manière qu’ils obtiendront le soutien nécessaire», précise la source gouvernementale.

Berlin s’en tient à un chantier méditerranéen dans le cadre d’une initiative européenne globale, allusion au processus de Barcelone.

Représentant personnel de Sarkozy pour le dossier de l’UM, Henri Guaino n’a pas rencontré Angela Merkel, mais a eu une série de discussions avec ses conseillers, au ministère des Affaires étrangères et au Bundestag (parlement).

Le ton de l’échange n’est pas de nature à aider au cheminement de l’idée de Nicolas Sarkozy. Un député social-démocrate a dit à Guaino que le projet, porteur d’»ennuis», risquait d’»affaiblir l’Europe». Président de la Commission des affaires étrangères du Bundestag, un élu du CDU s’est montré «sceptique à l’égard de cet instrument».

Un troisième s’est chargé d’invalider l’idée de Sarkozy. «Nous ne voulons pas de doubles structures et cela doit rester un projet de l’Union européenne dans son entier».

En déplacement dernièrement dans la capitale européenne Bruxelles, le ministre français chargé des Affaires européennes, Jean-Pierre Jouyet, a pris la mesure de réserves très prononcées chez certains membres de l’UE. Il a relevé que le projet «pouvait susciter des inquiétudes s’il venait à ignorer l’acquis» de Barcelone.

Mettant en garde contre le risque d’une «ligne de fracture» entre partenaires de l’UE, le ministre n’a pas caché son appréhension de voir le projet d’UM parasiter la présidence française de l’UE.