Algérie – Iran: «L’Algérie a une position stratégique en Afrique»

Algérie – Iran: «L’Algérie a une position stratégique en Afrique»

par Notre Envoyée Spéciale à Téhéran (Iran) : Ghania Oukazi, Le Quotidien d’Oran, 8 août 2007

Deux grandes sociétés de l’industrie automobile s’apprêtent à s’installer en Algérie prochainement. Il s’agit de Khodro, le producteur de véhicules, et Sapco, le fabricant de pièces détachées.

Entres autres accords que l’Algérie et l’Iran viennent de signer à Alger en présence des deux présidents Bouteflika et Ahmedinedjad, un protocole d’accord pour la construction de véhicules de type camionnette. Les journalistes algériens en ont eu écho lors de leur visite lundi, du site de production de véhicules du groupe Khodro dans la banlieue de Téhéran. « Nous sommes en train d’étudier notre installation en Algérie, nous avons convenu avec les Algériens de ramener la technologie et eux le capital », nous dit Muschtabah Hadavand, le chargé de l’export pour la région Moyen-Orient. « Notre objectif est de produire le véhicule en Algérie pour permettre la baisse du prix des voitures » ajoute-t-il. Mais pour l’instant, les Iraniens préfèrent faire dans le montage de véhicules (SKD) pour lesquels ils fabriqueront la carrosserie et mettront la peinture en Iran. « Nous pensons commencer par le montage de camionnettes Pick-Up pour répondre aux besoins de l’agriculture algérienne qui se développe », affirme Hadavand. Il explique que « l’Algérie nous intéresse parce qu’elle a une position stratégique en Afrique, c’est pour cela que nous avons fait l’évaluation de son marché ». Le choix des Iraniens s’est porté sur l’Algérie parce qu’elle pourra ainsi, selon eux, devenir ce marché qui va approvisionner le reste des pays de la région, « mais aussi parce que le Maroc roule au GPL », une option que l’Iran n’aime pas, même si Hadavand rassure en indiquant que « nous avons la technologie du gaz, nous étudions la possibilité de l’exporter ». Pourtant, la voiture roulant au diesel pose problème aux Iraniens en raison de la crise en carburant qu’ils vivent depuis quelque temps.

Le président Ahmedinedjad a évité d’en parler aux journalistes algériens mais il a souligné que le gouvernement iranien a initié une stratégie pour pousser à la baisse de l’utilisation des carburants en général. « Dans trois ans, nous allons exporter de l’essence » dira-t-il pour rassurer et après avoir expliqué la mise en oeuvre de la stratégie en question. La crise du carburant en Iran est provoquée, dit-on, par l’importance de son parc roulant. Téhéran à elle seule possède plus de 7 millions de voitures. Il en existe 12 millions dans l’ensemble du pays. L’on saura à Téhéran que pour régler ce problème, le gouvernement a décidé de rationner l’utilisation de l’essence en distribuant ce que les Iraniens appellent « les cartes intelligentes » qui en limitent la quantité selon que l’utilisateur soit un particulier, un institutionnel ou un membre d’une chancellerie étrangère.

«NOUS VENDRONS MOINS CHER QUE HYUNDAÏ»

Khodro est par ailleurs en relation avec un concessionnaire algérien pour fabriquer la Samand. Son responsable de la stratégie en a parlé avec les journalistes algériens. Mehdizavideh commencera par expliquer l’évolution du marché algérien. « L’Algérie importe chaque année 150.000 voitures », dit-il en précisant que « 20% du marché algérien est dominé par la marque Hyundaï ». Khodro a déjà exporté 600 voitures vers l’Algérie pour un montant de 5 millions de dollars. Elle compte prendre 1% du marché algérien en y plaçant pour un début, 1.500 voitures pour atteindre 3.000 en 2008. « Nous sommes actuellement en négociations avec un privé algérien pour y placer la Samand et la conseiller aux Algériens comme taxi, une fois construite là-bas, nous la vendrons moins cher que la Hyundaï qui est notre grand concurrent chez vous » dit, pour sa part, le chargé de l’export pour la région Moyen-Orient. La Samand iranienne est déjà vendue en Algérie par la société Farmol de Rahmoune.

L’autre accord en négociation entre les Algériens et les Iraniens : la fabrication en Algérie de pièces détachées iraniennes. « Nous sommes en négociation avec les Algériens pour que la société Sapco que dirige M. Chavapour puisse fabriquer des pièces détachées en Algérie », nous dit Mushtabah Hadavand. « Nous sommes en train d’étudier le projet », souligne-t-il en expliquant que « nous fabriquons des pièces détachées et nous en avons exporté pour un montant de plus de 300 millions de dollars et pour 75.000 euros vers l’Algérie », ajoute Hadavand.

Sapco est en fait une filiale du groupe Khodro qui en compte plusieurs et qui emploie globalement 450.000 personnes et produit 6.000 véhicules par an. Khodro est une société iranienne à capital mixte, public-privé (ce dernier étant majoritaire), qui est entrée en production en 1990. « L’Iran est classé 16ème dans le monde avec une production dont le taux d’intégration atteint 90%. En 2006, la société a produit un million de voitures de marque Vanette » a expliqué avant son chargé de la stratégie, M. Afshah. Logan, Citroën, Peugeot sous plusieurs de ses gammes (celle-là est intégrée à 58%) y sont fabriquées au même titre que Renault, Suzuki (fabriquée à Korasan au sud de l’Iran) et autres Mercedes-Benz. Le groupe a produit 17.000 camions et couvre plus de 55% du marché en minibus et bus avec 525.000 unités produites. Il projette d’en produire 63.500 à la fin de cette année. Il a exporté vers l’Algérie pour 10 millions de dollars de bus. « Pour ce qui est de la Peugeot, l’usine a été autorisée par la maison-mère à l’exporter vers la Russie, la Turquie et la Chine » dit Afshah. En attendant, la Samand, « une voiture à 100% iranienne », a été vendue en 2006 à l’extérieur de l’Iran pour 10 millions de dollars. En 2006, Khodro a exporté 23.912 véhicules vers 32 pays dont l’Algérie pour un montant de 135 millions de dollars. Le groupe se projette dans plusieurs pays à travers la création de sites de production de véhicules, entre autres en Syrie, en Chine, au Venezuela, au Sénégal et en Egypte. « Certains sites sont déjà opérationnels et d’autres le seront pour bientôt » indique Afshah. Celui pour la construction de camionnettes Pick-Up en Algérie le deviendra en principe en 2008.