La Chancelière Angela Merkel demain à Alger

La Chancelière Angela Merkel demain à Alger

Le gaz et les affaires

El Watan, 15 juillet 2008

Trois jours après le lancement officiel à Paris de l’Union pour la méditerranée (UPM), la chancelière allemande Angela Merkel a choisi de traverser cette mer pour se rendre en Algérie. Elle y séjournera deux jours comme pour signifier que les rapports bilatéraux sont plus concrets que les grands projets d’union à projection lointaine. Berlin avait pesé de tout son poids au sein de l’Union européenne (UE) pour modifier le projet français de l’Union pour la méditerranée, devenu depuis UPM. L’Allemagne, qui tente de porter un regard moins indifférent vers le Sud, entend donner un exemple à travers le renforcement de la relation avec l’Algérie, considéré comme « un pouvoir régional en Afrique et dans le monde arabe ».

L’Algérie est parmi les premiers pays arabes visités par Angela Merkel. Le gouvernement fédéral, qui a annoncé la nouvelle à Berlin, le 11 juillet, a indiqué que la chancelière aura des « entretiens politiques » avec le président algérien. Outre l’UPM, les discussions devraient porter, selon des sources diplomatiques, sur le Maghreb, la lutte contre le terrorisme, la situation des chrétiens en Algérie, après l’affaire de la convertie Habiba Kouider jugée à Tiaret, l’Afrique, surtout que le G8, dont l’Allemagne est membre, a décidé de concentrer ses efforts d’aide à ce continent, et la situation au Moyen-Orient.

En mai 2008, Angela Merkel, qui a évité de se rendre en territoires palestiniens, a participé aux festivités célébrant les 60 ans d’Israël, où elle a été le premier responsable allemand de haut rang à prononcer un discours devant la Knesset (Parlement). La venue à Alger s’inscrit donc dans une logique d’équilibrer les rapports avec les pays arabes. A Alger, Angela Merkel devra discuter avec des associations activant dans les domaines des droits humains. Berlin suit de près l’évolution de la société civile dans les pays du Sud. Les fondations Ebert et Konrad Adenauer, qui sont présentes en Algérie, mettent souvent l’accent dans leurs activités sur les aspects liés au travail des médias, aux droits humains et à l’éducation.

Accompagné d’une délégation d’hommes d’affaires, Angela Merkel assistera à un forum économique organisé demain à l’hôtel Sheraton par la Chambre algéro-allemande de commerce et d’industrie (AHK). Généralement, les allemands privilégient les contacts inter-entreprises pour élever le niveau des relations économiques. AHK Algérie, qui regroupe presque 450 membres algériens et allemands et qui active dans le pays depuis deux ans, mène un programme d’aide à la pénétration du marché algérien, supervisé et financé par le ministère allemand de l’Economie. En 2007, un coordinateur des relations économiques algéro-allemandes a été installé à Alger pour être l’interlocuteur des investisseurs. Le nombre des entreprises allemandes travaillant en Algérie avoisine les 140. L’Allemagne est le cinquième fournisseur de l’Algérie, après la France, la Chine, l’Italie et les Etats-Unis, et le 13e client seulement. AHK Algérie devra organiser, en octobre 2008, la première Foire algéro-allemande sur l’environnement, l’eau et les énergies renouvelables. Alger et Berlin sont liés, depuis le début 2008, par un accord de coopération dans le secteur de l’énergie solaire. Il porte notamment sur l’extension d’un câble solaire de 3000 km entre Adrar, au sud algérien, et la ville allemande d’Aachen. Le projet est estimé à deux milliards d’euros.

L’Allemagne, leader mondial dans le domaine des énergies nouvelles, comme l’éolien et le solaire, aide l’Algérie à construire une centrale électrique hybride gaz/solaire, dans la région de Hassi R’mel (Laghouat). L’Algérie, qui exporte des produits pétroliers vers l’Allemagne, sera davantage sollicitée à l’avenir pour renforcer la sécurité énergétique de ce pays, élevé comme priorité nationale après « le traumatisme » créé par la Russie en 2005 avec la crise avec l’Ukraine. Berlin veut aller au-delà du « 1% » des approvisionnements énergétiques assurés actuellement par l’Algérie, troisième fournisseur en gaz naturel de l’Europe occidentale. « Nous voulons diversifier nos ressources de gaz, s’il était possible que nos projets soient un peu soutenus par Mme Merkel nous serions ravis. L’Algérie serait un marché intéressant, d’autant plus que nous venons de nous implanter dans des pays proches : l’Italie et l’Espagne », a déclaré Wulf Bernotat, patron de EON (numéro un allemand de l’énergie), cité par les agences de presse. L’Allemagne, qui achète 43% de ses besoins en gaz à la Russie, souhaite développer le domaine du GNL avec l’Algérie. Mais les discussions ne sont qu’à un niveau exploratoire.

Les deux pays devraient renforcer également leur coopération militaire. La politique algérienne de diversifier les sources d’approvisionnement en équipements opérationnels intéresse Berlin. Cette question avait été évoquée lors de la visite à Alger, en novembre 2007, du chef d’état-major de l’armée allemande, le général Wolfgang Schneiderhan. A la même période, Horst Kohler est venu en Algérie devenant ainsi le premier président fédéral allemand à visiter le pays. Le président Abdelaziz Bouteflika a été également le premier à le faire pour l’Allemagne en 2001. Entre-temps, les ministres allemands des Affaires étrangères et de l’Economie sont venus à Alger explorer d’autres champs de coopération.

Par Faycal Metaoui


L’Allemagne veut renforcer ses investissements en Algérie

La chancelière allemande, Angela Merkel, effectuera, demain, une visite de travail de deux jours à Alger, accompagnée du ministre allemand de l’Economie et des Technologies et de 13 PDG des plus grandes entreprises cotées à la bourse allemande.

La chambre algéro-allemande de commerce et d’industrie à Alger (AHK) organise à cette occasion un forum placé sous le thème : « Algérie-Allemagne, un partenariat économique stratégique durable ». Outre la présentation de la nouvelle stratégie industrielle qu’effectuera le ministre de l’Industrie et de la Promotion de l’investissement, Abdelhamid Temmar, la rencontre sera sanctionnée par la signature de plusieurs contrats importants d’investissement de joint-venture. Les participants au forum se pencheront également sur les relations économiques bilatérales et les perspectives de partenariat entre les deux pays, tout en mettant en exergue les exemples de réussite de projets d’investissement allemands lancés en Algérie. Ces derniers, faut-il le rappeler, se sont considérablement multipliés favorisant l’implantation de grandes firmes allemandes en Algérie. Parmi celles-ci, on peut citer le groupe leader mondial de l’industrie gazière, Linde, qui a racheté, en avril 2006, 66% des parts de l’Entreprise algérienne de gaz industriels (Engi). Il compte, selon le directeur général de l’AHK, Andreas Hergenröther, augmenter sa part dans le capital pour obtenir, dans le futur, une acquisition totale de 100%.

Classée cinquième fournisseur de l’Algérie, l’Allemagne compte aujourd’hui 160 entreprises implantées sur le marché algérien, alors qu’elle n’en comptait qu’une trentaine en 2003. Il est à rappeler également que plusieurs sociétés allemandes, telles que Siemens, Henkel, Knauf et Dywidag, ont réalisé ces cinq dernières années, des investissements dans le cadre de la privatisation des entreprises algériennes et dans le cadre d’accords de coentreprises avec des PME privées. Selon le directeur général de la chambre algéro-allemande, les investissements allemands sont traditionnellement orientés vers la région de l’Europe de l’Est. Il n’en demeure pas moins qu’un intérêt particulier est désormais affiché par les Allemands à l’investissement direct en Algérie, mais aussi au renforcement des échanges commerciaux algéro-allemands. En 2006, l’Allemagne a été le plus grand exportateur au monde avec un volume d’exportation de près de 900 milliards d’euros. En direction de l’Algérie, les exportations allemandes ont été, en 2007, de 1,8 milliard de dollars marquant une augmentation de 20% par rapport à 2006.

L’Algérie exporte vers l’Allemagne des produits pétroliers et importe essentiellement des équipements industriels. En 2006, Alger et Bonn ont signé un double accord sur le remboursement par anticipation de la dette évaluée à 652 millions d’euros. Une dette totalement payée.Pour ce qui est du volume des investissements, M. Hergenröther affirme qu’ils sont de plus en plus importants, sans pouvoir, pour autant, avancer un montant précis : « les montants en dollars ne sont pas autant importants pour nous que l’impact que nous recherchons sur l’activité elle-même, l’emploi engendré, la formation des personnels, la certification aux normes internationales et le transfert de technologie », avoue le DG de l’AHK.

Par Lyes Malki


Un partenariat datant des années 1960

Le partenariat algéro-allemand était, dans les années 1960, à son plus haut niveau de par la présence de plusieurs entreprises allemandes de renommée mondiale.

Des entreprises clés en main ont été lancées dans le domaine de l’électroménager, l’électronique et autres., Durant les années de violence, alors que les sociétés étrangères étaient nombreuses à quitter l’Algérie, une dizaine de sociétés allemandes ont continué leurs activités à l’image de Deutz, spécialisée dans la fabrication des moteurs, Lieb Hebr pour les grues ou encore Linde pour le gaz industriel. D’autres entreprises allemandes, comme Lewa, Basf et Bauer et ZF se sont même associées à des entreprises algériennes pour se lancer dans un partenariat réussi comme celui de ZF avec SNVI pour la fabrication des boîtes de vitesses.

Par L. M.


Relations énergétiques entre Berlin et Alger

Faire oublier l’épisode trouble des contrats de GNL annulés

La visite de la chancelière allemande Angela Merkel sera à coup sûr marquée par des discussions sur l’approvisionnement de l’Allemagne en énergie et principalement le gaz.

Concernant le gaz, l’histoire entre les deux pays a été marquée par un épisode mouvementé. Celui de l’annulation au début des années 1980 des contrats de vente de GNL à l’Allemagne. Cet épisode avait jeté un véritable coup de froid dans les relations entre les deux pays, qui étaient pourtant exemplaires dans les années 1970. C’est avec les Allemands que le tissu industriel algérien avait été mis en place avec des investissements totalisant près de 30 milliards de dollars.

Cette relation avait été fortifiée par la signature de contrats de vente de gaz GNL algérien à l’Allemagne qui ne voulait pas rester dépendante du gaz en provenance de l’Union soviétique. Mais à la mort de Houari Boumediène, l’équipe Belaïd Abdesselam-Sid Ahmed Ghozali est évincée au profit d’une nouvelle équipe Abdelhamid Brahimi-Belkacem Nabi. La nouvelle équipe annule les grands contrats signés avec la compagnie américaine El Paso et l’Allemagne. Dans un entretien accordé récemment au quotidien le Soir d’Algérie, Sid Ahmed Ghozali, ancien patron de Sonatrach, interrogé sur ces annulations, avait déclaré : « Je laisserai à l’histoire le choix du qualificatif qui convient à l’opération qui a conduit à ce recul. Le gâchis qu’il a déjà provoqué est en soi suffisamment expressif. »

Belaïd Abdesselam va plus loin en estimant dans un de ses écrits : « Ceux qui, par leurs agissements, avaient abouti à le faire annuler avaient provoqué, au détriment de l’Algérie, un manque à gagner annuel de près d’un milliard de dollars US à la fin de la décennie 1980, malgré la baisse intervenue alors dans les prix du pétrole et sur lesquels était indexé le prix du GNL livré à la société américaine. Cumulé avec l’effet de l’annulation du contrat de même nature passé avec l’Allemagne fédérale, ce manque à gagner se montait, à la fin de la même décennie 1980, annuellement à près de deux milliards de dollars et, globalement pour toute la durée des années 1980, à trente milliards de dollars, c’est-à-dire un montant supérieur à la dette laissée à la charge du pays par le président Chadli Bendjedid, au moment où il dut quitter ses fonctions à la tête de l’Etat. » Au début de son premier mandat, l’actuel chef de l’Etat, Abdelaziz Bouteflika, avait critiqué l’annulation de ces contrats en direct à la télévision lors d’une visite d’un site de production de Sonatrach. Sur ce plan, l’actuel locataire d’El Mouradia sera à l’aise lors des entretiens qu’il aura avec la chancelière allemande Angela Merkel.

De même que l’actuel ministre de l’Energie et des Mines, Chakib Khelil, qui était conseiller à la présidence de Houari Boumediène, lors de l’élaboration des contrats, et qui avait ensuite été remercié par l’équipe qui avait annulé les contrats. Si la conjoncture internationale a beaucoup évolué, les problèmes d’approvisionnement restent les mêmes et l’Allemagne est toujours demandeur du GNL algérien. Les négociations peuvent réussir puisque en contrepartie du GNL, les Allemands peuvent offrir une technologie, dans laquelle ils sont leaders dans le monde, celle su solaire dont l’Algérie a grandement besoin. De plus, une société allemande (Wintershall) a été intégrée au projet de gazoduc le Galsi dès l’année 2001 et dans laquelle elle est actionnaire (avec 13,5%), puisque l’idée serait que la canalisation qui traverse la Méditerranée pour arriver en Italie via la Sardaigne soit connectée au réseau qui va jusqu’en Allemagne pour acheminer du gaz algérien. Cela pour le gaz naturel par gazoduc. Pour le GNL, une autre société allemande EON Rhurgaz (numéro 1 allemand de l’énergie) est en course. Des discussions auraient été lancées entre Sonatrach et cette compagnie, qui a déjà ouvert un bureau à Alger au mois de juin dernier. Si l’épisode des contrats annulés hante encore les esprits, les deux partenaires auront à cœur de se projeter dans l’avenir pour effacer le malheureux épisode du début des années 1980 et les ambitions sont grandes des deux côtés de rétablir une relation de confiance, qui a déjà débuté avec l’intégration de Wintershall dans Galsi.

Par Liès Sahar