En attendant le sommet Bouteflika-Berlusconi à Alger
En attendant le sommet Bouteflika-Berlusconi à Alger
«C’est un peu l’Italie qui se déplace à Oran»
par Ghania Oukazi, Le Quotidien d’Oran, 24 septembre 2009
«Si on veut attirer la PME italienne en Algérie, il faudrait tenir compte de tous ces éléments de procédures administratives, douanières et partage de capital», a déclaré hier l’ambassadeur d’Italie.
Giampaolo Cantini a animé hier une conférence de presse pour annoncer la tenue de journées italiennes à Oran du 4 au 7 octobre prochain. Journées où s’entremêleront économie, culture et histoire. «Oran et d’ailleurs toute la région, est une réalité très dynamique dans l’histoire de l’Algérie, nous organisons cette manifestation économique et culturelle sur suggestion des responsables locaux. C’est une initiative qui a pour mission de répandre l’offre Italie et la diffuser en Algérie», a commencé par dire l’ambassadeur d’Italie qui semble avoir retenu «comme nous le disent souvent nos amis algériens» que «l’Algérie, ce n’est pas Alger».
Il sera question durant ces trois jours de retracer les relations entre les deux pays, d’en situer la complémentarité dans l’espace méditerranéen et d’en évaluer les échanges économiques et commerciaux. La culture sera toutefois à l’honneur. La responsable italienne en la matière soulignera qu’un programme de projections cinématographiques sera monté avec la cinémathèque d’Oran. Des activités de master class sont aussi prévues notamment dans le domaine de la musique. «Le volet formation est notre objectif dans notre programme culturel, c’est un volet important de coopération, de rencontre et de dialogue», expliquera-t-elle.
Ceci étant dit, les Italiens ont prévu à Oran de se pencher sur des secteurs précis comme le BTPH au sujet duquel ils attendent un briefing des responsables locaux «sur les opportunités de participation aux projets infrastructurels dans la région». Ils s’intéresseront aussi au secteur de l’hydraulique, de l’énergie solaire, de la pêche et du lait. Le directeur de l’institut italien pour le commerce extérieur (ICE), le bureau pour la promotion des échanges de l’ambassade d’Italie a rappelé à propos de la filière lait qu’une coopérative importante existe déjà à Oran en plus de nombreux autres producteurs.
Les premières retombées de ces journées, Samuele Porsia les voit déjà à travers l’organisation d’une mission algérienne prochainement à Umbria, une région italienne réputée pour ses activités dans le lait. «Il sera question de préparer un partenariat entre la région d’Oran et celle d’Umbria pour le développement de la filière lait», affirme, pour sa part, l’ambassadeur. Pour le chargé des affaires économiques, «il ne s’agit pas seulement de prospection de l’ambassade mais c’est un peu l’Italie qui va se déplacer à Oran». Il indique qu’«on est en train de travailler avec le ministère régional italien sur un programme sur la pêche et voir les spécificités de l’Oranie pour lancer des programmes de coopération concrets».
L’arbitrage au cœur des débats
La chambre de commerce d’Oran accueillera elle son homologue de Milan, spécialiste dans les services d’arbitrage. «Une gestion innovatrice des contentieux internationaux: une aide pour les entreprises opérant dans la région Méditerranée», «les efforts pour une justice privée au bénéfice des PME», «l’alternative à la justice ordinaire: la médiation, la conciliation et l’arbitrage, des instruments de justice privée, rapide et à un coût raisonnable», ces thèmes et d’autres seront débattus à Oran avec comme objectifs, dira l’ambassadeur, «de diffuser des informations sur l’arbitrage et faire connaître les services de la section arbitrale de la chambre de Milan». L’Italie compte ainsi faire connaître l’utilité de l’arbitrage dans les contrats commerciaux. «Nous avons déjà un travail qui s’est développé entre la section arbitrale de la chambre de Milan et la CACI», a indiqué l’ambassadeur.
Avant de dire ce que les Italiens pensaient des nouvelles dispositions de la LFC pour 2009, Giampaolo Cantini a tenu à réaffirmer avant «le grand intérêt des Italiens particulièrement l’industrie italienne pour investir dans la région». Et pour ce qui est des nouvelles dispositions, elles sont, dira-t-il, à vérifier sur le terrain. Il faut reconnaître que les investisseurs italiens ont été les moins râleurs à propos des dispositions de la LFC par rapport aux Allemands ou aux Français. L’ambassadeur parlera beaucoup de la PME «structure importante de l’industrie italienne» pour réaliser, a-t-il dit, «des synergies avec les PME algériennes». Les Italiens prévoient d’organiser durant les journées d’Oran des mises en contact d’affaires entre leurs entreprises et celles de la région oranaise. Il notera cependant que «si on veut attirer la PME, il faudra tenir compte de ces éléments de procédures administratives, douanières et partage de capital».
Un sommet Bouteflika-Berlusconi avant la fin de l’année ?
Dans la revue Crescendo publiée par l’ICE, Giampaolo Cantini écrit «dans le domaine économique, les amis algériens enregistrent avec satisfaction, les succès réalisés pendant les années récentes par l’Italie (…). Nos amis algériens se plaignent du fait que cette croissance aggrave, en même temps, la dépendance algérienne des importations (…) surtout se référant aux effets de l’accord d’association avec l’UE (…). Il s’agit d’observations et de critiques que nous enregistrons avec beaucoup d’attention.» Mais, continue-t-il de dire, «pour faire du partenariat industriel, il faut les conditions appropriées. (…). Il y a des projets d’investissement concrets qui attendent toutefois la définition du cadre de la politique économique et surtout de la législation sur les investissements étrangers.» Du côté italien, dit l’ambassadeur, «nous ne pouvons que souhaiter que les autorités algériennes accueillent la flexibilité de conditions surtout pour les projets des petites et moyennes entreprises (…)».
Interrogé sur l’éventualité de l’achat par l’Algérie de frégates italiennes pour 4 milliards d’euros, comme rapporté par un journal arabe paraissant à Londres, sans pour autant démentir l’information, l’ambassadeur a répondu simplement: «Certaines informations au plan factuel ne sont pas correctes.» Rome est par ailleurs toujours dans l’attente d’une rencontre au sommet Bouteflika-Berlusconi. «Les nombreuses visites d’officiels italiens en Algérie ces derniers temps ont été en prévision de la préparation du sommet bilatéral dont la date n’a pas encore été fixée», a souligné l’ambassadeur. «En principe, ce sommet devra se tenir à Alger parce que le premier s’est tenu à Rome en 2007, la date dépendra des autorités algériennes», a-t-il précisé.
L’ambassadeur écrit dans la revue Crescendo de l’ICE: «Avant la fin de l’année devrait se tenir le deuxième sommet Italie- Algérie, cette fois-ci à Alger. Le président du Conseil M. Berlusconi, suivant l’habitude pour ce genre de rencontres, sera accompagné d’un nombre significatif et important de ministres.» Il est persuadé que «sur les bases solides d’amitié et de coopération (…), il sera possible de consolider le cadre existant et lancer de nouvelles initiatives».
Les Italiens, les Chinois et le plan de relance
par G. O., Le Quotidien d’Oran, 24 septembre 2009
Les exportations italiennes de biens d’équipements industriels vers l’Algérie ont enregistré une hausse spectaculaire durant le premier semestre 2009, passant de 759 millions de dollars à 1,24 milliard de dollars, soit une progression de 63%.
C’est le directeur de l’Institut italien pour le commerce extérieur qui en a fait part, lorsqu’il a passé en revue les échanges commerciaux entre l’Algérie et l’Italie. Il a souligné que ces exportations représentent plus de 57% du total des exportations italiennes. «Durant le premier semestre 2009, les échanges commerciaux entre les deux pays ont enregistré une progression de 9,5% par rapport à la même période de 2008», est-il noté. les Italiens n’omettent pas, cependant, de souligner la baisse du déficit commercial de leur pays «engendré par la forte baisse des cours pétroliers, mais aussi par le maintien des exportations italiennes malgré le fait que l’Italie soit passée comme 3è fournisseur de l’Algérie avec 2,15 milliards de dollars après la France et la Chine». Les produits alimentaires italiens, en Algérie, affichent eux aussi «une encourageante progression de 41%, passant de 17 millions de dollars durant le premier semestre 2008 à 24 millions de dollars pour la même période de 2009. Les demi-produits, par contre, ont baissé de 30,93% passant de 931 à 643 millions de dollars durant les 6 premiers mois de l’année en cours».
Représentées à 98,3% par l’achat de gaz naturel et de produits pétroliers, les importations de l’Algérie ont, pour leur part, baissé d’une manière importante durant le 1er semestre 2009 (-43%) atteignant les 3 milliards de dollars. «Les échanges commerciaux de l’Italie avec l’Algérie ont atteint, durant le 1er semestre 2009, 4 milliards de dollars enregistrant par là même, une baisse de près de 30% (…)». Porsia estime, cependant, que «l’Italie continue d’être de la reconstruction et de la relance de l’Algérie. On apprend ainsi que les marchés publics, attribués aux entreprises italiennes durant le 1er semestre de cette année, ont atteint 4,5 milliards d’euros dont 80% dans le secteur énergétique. L’Italie, dit Porsia, a confirmé en 2007, des investissements hors hydrocarbures de l’ordre de 70 millions de dollars et si on inclut ceux dans les hydrocarbures, on en a pour une centaine de millions de dollars». Les diplomates italiens indiquent par ailleurs que «bien que l’Italie continue d’être assez présente dans le secteur des travaux publics à travers ses compagnies majors, il a été remarqué une forte prévalence des adjudications en faveur des entreprises chinoises». Le directeur de l’ICE explique : «c’est normal, les Chinois sont plus compétitifs. Nous nous confrontons à un nouveau concurrent. Les entreprises chinoises accaparent la part du lion du marché algérien qui, traditionnellement, revenait aux entreprises italiennes qui ont une expertise internationale». L’ambassadeur renchérit «c’est une concurrence forte en ce qui concerne les appels d’offres». Pour Porsia «c’est une donnée nouvelle, c’est une compétition ouverte à laquelle les entreprises italiennes continuent de participer. C’est déjà un bon signe de ne pas s’être retiré». La présence économique italienne en Algérie a, est-il noté d’ailleurs, «considérablement augmenté au cours de ces dernières années». Les entreprises italiennes en Algérie sont au nombre de 150 environ dont 40% opèrent dans le secteur de l’énergie, 40% autres dans le BTPH et 20% dans différents secteurs (PME, services, plastique, imprimerie, céramique…). L’Algérie est comptée comme deuxième destination des entreprises italiennes de travaux publics au niveau mondial. Ces entreprises participent dans la réalisation de grands projets dans le domaine des chemins de fer, la construction de barrages et de transferts, routes et autoroutes… Le directeur de l’ICE promet : «grâce à une importante politique de promotion, il y aura une participation massive de l’Italie au Salon algérien des travaux publics». Dans l’éditorial de la 6è parution de la revue Crescendo pour la période juillet-octobre, Porsia écrit «les chiffres sont tombés, et je peux l’annoncer aujourd’hui de manière officielle et solennelle, l’Algérie est le premier client de l’Italie sur le continent africain et le troisième dans toute la zone Afrique du Nord et Moyen-Orient (MENA) après les Emirats-Arabes-Unis et l’Arabie Saoudite». Il estime «l’information (est) d’autant plus importante du fait que les partenaires traditionnels comme l’Egypte et la Tunisie se retrouvent relégués loin derrière». Il espère que «les investissements directs italiens ne seront pas freinés par le nouveau contexte juridique qui est en train de se dessiner». Le directeur de l’ICE évoquera «le déficit commercial en défaveur de l’Italie, qui n’a cessé de se creuser ces dernières années pour s’élever à 5,6 milliards d’euros en 2008 (…)». Pour lui, «l’Italie qui a fait de l’Algérie un partenaire stratégique, et auquel elle a confié une part importante de son approvisionnement énergétique, s’attend à ce que l’Algérie, à travers le nouveau plan de relance 2009-2013 annoncé, lui en attribue une large part et que la mise à niveau de ses PME en soit confiée à l’expertise italienne». Ceci, dit-il, «afin de combler ce déficit qui n’a pas d’égal ni d’équivalent avec les autres pays de l’Union européenne». Il précisera qu’en ces temps de crise «de retour des nationalismes économiques et du souverainisme où les sacro-saintes règles de marché ont volé en éclat, cela reste possible et justifié». D’autant plus «comme le répètent fréquemment nos amis algériens», conclut-il, «l’Italie ne nous a pas abandonnés pendant la période la décennie noire».