Le président Ahmedinedjed lundi prochain à Alger

Le président Ahmedinedjed lundi prochain à Alger

Les Iraniens veulent tenter leur chance sur le marché Algérien

par Ghania Oukazi, Le Quotidien d’Oran, 1 août 2007

Ouverture d’une banque iranienne, signature d’un accord aérien entre Alger et Téhéran, construction automobile et de logements seront, entre autres points, à l’ordre du jour de la visite à partir du 6 août du président iranien à Alger. S’il est évident que l’arrivée de Ahmedinedjed lundi prochain à Alger vise, comme disent les diplomates, « la consolidation et le renforcement des relations bilatérales entre les deux pays », elle se veut aussi une preuve que l’Iran n’est pas aussi isolé que le prétend l’Amérique de Bush.

En venant en Algérie, un pays dont l’importance géostratégique dans les esprits occidentaux n’est pas des moindres, le président iranien sait ce qu’il fait. Il n’a même pas besoin de le démontrer. D’ailleurs, l’on avance d’ores et déjà que durant cette visite, le dossier du nucléaire ne sera pas à l’ordre du jour. « A mon avis, il n’y aura pas de discussions sur le nucléaire, les deux chefs d’Etat aborderont les questions internationales d’actualité, c’est une tradition », indiquera l’ambassadeur d’Iran à Alger à des journalistes algériens qui devront s’envoler aujourd’hui pour Téhéran. Il précise que les deux pays « ont heureusement des points communs sur plusieurs questions politiques mondiales ». L’Irak et le Moyen-Orient en font en évidence partie. Hussein Abdi Abnih préfère parler économie et commerce, même s’il se refusera de préciser le niveau des échanges bilatéraux. Il avoisine les 7 millions de dollars, selon des sources diplomatiques algériennes. « Insignifiant ! » jugent-elles.

La visite d’Ahmedinedjed est justement pour fouetter ces échanges qui, faut-il le rappeler, n’ont (re) démarré qu’après la reprise en 2000 des relations diplomatiques entre Alger et Téhéran. Les pourparlers entre les Algériens et les Iraniens dans le domaine financier sont bien avancés. Il est prévu prochainement l’ouverture à Alger d’une banque iranienne de statut public. C’est la Banque de développement de l’export. « Le dossier a été déposé il y quelque temps auprès de la Banque d’Algérie », nous dit l’ambassadeur, qui annonce la venue demain à Alger d’une délégation de banquiers iraniens pour finaliser la procédure.

Il est évident que les Iraniens veulent tenter leur chance sur un marché algérien important et prometteur. Ils visent à bénéficier de projets inscrits dans le cadre du programme d’appui à la relance. Diplomatiquement, l’ambassadeur l’explique ainsi: « La relation entre l’Iran et des pays amis comme l’Algérie, le Venezuela et autres, c’est une relation privilégiée et leur développement et leur progrès sont les nôtres. Nous sommes prêts à développer l’économie de l’Algérie comme nous le faisons pour nous-mêmes ». En plus, «la relation avec l’Algérie est préférentielle parce que nous avons beaucoup de points communs: c’est d’abord un pays musulman, nous avons fait tous les deux deux grandes révolutions – les Algériens nous ont précédés – nos sociétés sont basées sur les principes de l’Islam… ». Concrètement et pour faciliter les déplacements entre les deux pays, notamment ceux des hommes d’affaires, Téhéran a tenu à ouvrir une ligne aérienne entre les deux capitales. Un accord sera signé à cet effet au cours de la visite d’Ahmedinedjed. Les Iraniens veulent aussi investir dans le domaine de la construction. « Ils voudraient construire des logements haut standing, des routes, des barrages, des voies ferrées…

Ils sont intéressés par l’acier et la sidérurgie…», dit l’ambassadeur. Il indique que des consultations sont menées entre Sonatrach et un groupement iranien pour des projets dans le pétrole et le gaz. Selon lui, des ingénieurs algériens spécialistes en la matière travaillent en Iran. Hussein Abdi Abnih estime qu’après la visite d’Ahmedinedjed et l’ouverture de banques iraniennes en Algérie, « les investissements iraniens seront comptés en milliards. Nous pouvons coopérer dans de nombreux domaines ». Il annonce l’ouverture prochaine à Alger d’une clinique dont la réalisation se fera par les soins du Croissant-Rouge iranien. « D’autres cliniques seront construites, Inchallah, dans d’autres villes algériennes ». dit l’ambassadeur. Mais ce qu’il ne dit pas, c’est que ce projet n’est pas du goût des Algériens, qui « refusent que leur soit faite la charité à travers une clinique pour les nécessiteux ».

Que pense Hussein Abdi Abnih de la création d’une OPEP du gaz ? Tout en précisant que l’Iran est l’un des instigateurs, il note « qu’après la réunion à Qatar des ministres de l’Energie, les experts ont commencé à travailler à Moscou pour définir les contours de cette institution qui sera importante, même pour les pays consommateurs ». Et si les Américains torpillent le projet après que le président Bush se fut déclaré publiquement contre sa réalisation ?, lui demandons-nous. « Y a-t-il une proposition qui est bonne pour le tiers-monde et que les Américains ont acceptée ?, s’est-il interrogé sur un ton d’étonnement. L’ambassadeur fait savoir au passage que l’Iran abritera à la fin du mois d’août une conférence des ministres des Affaires étrangères des pays non alignés, avec au menu les droits de l’Homme et les cultures. Ce rendez-vous est programmé, selon lui, pour préparer un sommet des chef d’Etat des mêmes pays, dont la tenue est prévue à Cuba.

 


Une ligne aérienne Alger-Téhéran

par G.O

Depuis la reprise de leurs relations diplomatiques en 2000, l’Algérie et l’Iran ont procédé à la signature d’un certain nombre d’accords. Des sources diplomatiques algériennes évoquent entre autres des accords dans le domaine judiciaire. Lors de la visite d’Ahmedinedjed, il sera procédé à la signature par les deux parties d’instruments de ratification en matière d’enquête judiciaire pénale et dont les accords ont été préalablement signés. Il est rappelé une première réunion de la commission mixte algéro-iranienne en 2003 à Téhéran, la 2ème devra, nous dit-on, se tenir à Alger avant la fin de l’année en cours. Les «modestes» ou «insignifiants» 7 millions de dollars d’échanges entre les deux pays sont essentiellement dans le domaine des hydrocarbures. L’on fait savoir que l’Iran vient de procéder à l’ouverture d’une société de concession de véhicules Khoudro. «Il est prévu l’ouverture prochaine à Alger d’une usine de construction de ces automobiles», nous indique-t-on. Au plan politique, l’on apprend que des mécanismes de consultations entre les ministères des Affaires étrangères ont été mis en place. Une rencontre au niveau des vice-ministres a eu lieu l’année dernière et une deuxième est prévue avant la fin de l’année en cours. L’année dernière a enregistré un ballet diplomatique intense entre Alger et Téhéran. Il est fait état de la visite à Alger de 7 envoyés spéciaux iraniens. Sans compter les deux visites, la dernière en juin, du MAE iranien en plus de Larizani, le chargé du dossier nucléaire. Les Iraniens tenaient par ces déplacements à informer régulièrement les autorités algériennes des développements du dossier nucléaire. «L’Algérie appuie le droit légitime de tout pays à acquérir le nucléaire civil et pacifique», nous disent nos sources diplomatiques qui notent qu’en plus «l’Iran est membre du traité de non-prolifération des armes nucléaires». Alger pense que le dénouement pacifique de ce dossier est possible «puisque les deux parties, l’Iran et les Etats-Unis, ont exprimé leur volonté de poursuivre les consultations à ce sujet. Il n’y a pas de raison pour que ça ne se règle pas positivement». Nos sources diplomatiques confirment la conclusion d’un accord aérien entre les deux pays, qui prévoit l’ouverture d’une ligne aérienne entre Alger et Téhéran. «Les Iraniens manifestent un intérêt évident pour le marché algérien, ils veulent prendre leur part», nous est-il dit. Pour cela, ils ont identifié, selon nos sources, un certain nombre de secteurs comme la construction y compris celle de la grande mosquée, le montage automobile… Les Algériens préfèrent ne pas parler de la clinique iranienne parce qu’ils estiment «qu’on n’en est pas à accepter des cliniques pour les nécessiteux».